TOKYO, CORRESPONDANT - Le premier ministre, Naoto Kan, a évité, jeudi 2 juin, d’être emporté par une motion de censure, mais au prix de l’engagement de se démettre avant la fin de son mandat. Cette motion, rejetée par une large majorité (293 voix contre et 152 pour), a été votée par le Parti libéral démocrate (PLD), principale formation d’opposition, et par le Nouveau Komeito (centriste), et soutenue par de petits partis conservateurs. Une trentaine de membres de la majorité gouvernementale (le Parti démocrate du Japon, PDJ), opposés à M.Kan, se sont abstenus. C’est le cas également du Parti communiste et du Parti social-démocrate, qui critiquent le gouvernement Kan, mais refusent de faire cause commune avec le PLD qu’ils estiment responsable des errements de la politique nucléaire, dont la catastrophe de Fukushima est la dramatique illustration.
LA GESTION DU DÉSASTRE DU 11 MARS EN QUESTION
Le rejet de la motion de censure assure la survie politique de Naoto Kan, qui ne sort néanmoins pas renforcé de l’épreuve. Déjà impopulaire avant le séisme du 11 mars, il est critiqué pour sa gestion du désastre nucléaire, le retard dans la construction des logements provisoires pour les 100 000 sinistrés et, selon ses adversaires, le reniement de ses promesses électorales. Son taux de soutien dans l’opinion est inférieur à 20 %.
Son engagement in extremis de se retirer avant la fin de son mandat, qui a dissuadé une partie de ses opposants au sein du PDJ de voter la censure, affaiblit encore sa position. « Une fois que j’aurai assumé mon rôle dans la gestion du désastre, je transmettrai mes responsabilités à une génération plus jeune », a-t-il déclaré peu avant le vote. Selon son prédécesseur, Yukio Hatoyama, M.Kan s’est engagé à démissionner à l’automne.
Un autre facteur a joué en faveur du premier ministre : l’opinion condamne le jeu politicien auquel se livrent les élus alors que le pays est confronté à son désastre le plus grave depuis 1945. Une indignation dont la presse se fait l’écho : « On ne change pas de cheval au milieu du gué », écrit le quotidien Asahi dans un éditorial, enjoignant aux hommes politiques de se rendre dans les régions sinistrées plutôt que de s’adonner à ce « jeu de massacre ».
Philippe Pons