A l’ère où le printemps arabe touche les pays arabes dictatoriaux, il convient de s’attarder sur les plaies combien nombreuses qui ébrèchent le paysage de la sexualité dans cette partie du monde.
Dans bon nombre de pays arabes, l’homosexualité est un délit passible au moins d’emprisonnement, au plus de peine de mort. Pourtant, certains poètes du monde musulman ont pu toutefois célébrer l’homosexualité, comme, par exemple, le poète arabo-persan Aboû Nouwâs.
Cependant, la situation dans le monde arabe est très grave, l’homosexualité y est très mal acceptée, d’abord elle est interdite par la loi (dans la plupart des pays arabes) et elle est très mal vue par une société très conservatrice et traditionnelle, guidée la plupart du temps par des valeurs religieuses.
La communauté homosexuelle dans les pays du monde arabe est donc une des minorités les plus opprimées. Au Liban, pourtant pays reconnu tolérant dans certains aspects comme par exemple en matière de coexistence religieuse, l’homosexualité est aussi un tabou, rendant les personnes qui présentent ce genre d’identité sexuelle des personnes souffrantes de leur entourage, dépitées de leur existence. Le Code pénal libanais de 1943, modifié en 2003, stipule dans son article 534 : « Les relations sexuelles contre nature sont punies d’emprisonnement pour une durée entre un mois et un an, et d’une amende entre 200 000 et un million de livres libanaises ». Le Liban possède donc un étroit avantage par rapport aux autres pays qui l’entourent où le châtiment réservé est beaucoup plus imposant !
Par ailleurs, on peut affirmer que peu de choses relient les deux grandes communautés qui constituent la trame sociale du Liban, chrétienne et musulmane, sur le statut sexuel, personnel et celui de la femme par exemple. Etrangement, sur l’homosexualité, on peut dire qu’elles se retrouvent avec la même hargne et le même emportement.
Ainsi, le parcours d’une personne homosexuelle au Liban demeure celui d’un combattant. Cela commence à l’école où elles sont stigmatisées souvent pour leur seule présupposée attitude, au travail, postes clés d’où elles sont souvent écartées, et même de leur propre famille qui les rejette une fois au courant de ce qu’elles sont. C’est une tragédie humaine ou tous les actes ont ceux d’une vraie pièce horrible de rejet, de violence et de cruauté. Un père d’un jeune homosexuel nous disait au cabinet lors d’un entretien qu’il souhaiterait que son fils soit porteur d’un cancer qui tue, d’une tumeur plutôt que de cette tare dont la famille ne se départira jamais !
Les exemples pullulent de personnes homosexuelles qui visitent psychiatres et psychologues pour changer d’identité, sommées par leur famille à intégrer le tout dominant cercle de l’hétérosexualité. Et quelle déception pour elles et pour leur parent quand on leur annonce qu’il n’y a pas à changer, que rien n’est pathologique et qu’en médecine, l’on ne change qu’une anomalie !
C’est dire la férocité de nos sociétés envers des personnes qui n’ont rien fait, rien demandé, juste qu’elles ont été choisies par dame nature pour être différentes dans leur sexualité de la masse qui les entoure. Certes, en Occident, l’homophobie persiste et peut même prendre du terrain dans certains pays, avec souvent un amalgame navrant comme par exemple il y a deux ans lors de la médiatisation des histoires de pédophilie dans l’Eglise, le mélange entre homosexualité (état nullement pas pathologique) et pédophilie, vraie paraphilie à traiter vigoureusement. C’est dire le chemin encore à parcourir, partout dans le monde. Mais dans nos contrées, il y a urgence, car il ya un réel rejet, presque une négation !
Sami Richa, chef de service de psychiatrie à l’hôtel-Dieu de France de Beyrouth