Vous l’aurez sans doute remarqué, le G20 sous présidence française aura été étrangement absent dans la communication de l’Elysée. Mais que fait Nicolas Sarkozy, qui allait moraliser le capitalisme lors des derniers G20 et impulser un « nouvel ordre mondial » ? Le G20 qui va se tenir en France s’annonce bien vide. Nicolas Sarkozy a multiplié les annonces en direction de la « société civile » pour mieux dissimuler la vacuité des décisions finales. Le G20 restera fidèle à lui-même : d’un côté une finance sauvée par les contribuables qui reste libre de toute nouvelle contrainte, de l’autre des plans d’austérité sociale qui se multiplient.
Les tensions nouvelles au sujet de la crise de l’euro annoncent un fiasco au sommet du G20. L’Union européenne et la zone euro exposent au grand jour leur incapacité à mener une réelle politique monétaire et économique qui puisse s’attaquer aux racines de la crise. Et les autres grandes puissances économiques, qui craignent la contagion, sont parties pour demander au G20 des comptes à leurs homologues européens. Les pays émergents proposent même de leur venir en aide via le FMI : les tractations du G20 marquent un chamboulement dans l’ordre mondial et dans les rapports Nord-Sud. Et Nicolas Sarkozy ne se rend plus au G20 comme donneur de leçon, mais comme mauvais élève.
Dans ce contexte, l’annonce du référendum en Grèce à quelques jours du G20 n’arrange pas du tout le chef de l’Etat. La parole va être donnée aux citoyens grecs et il est très probable que ceux-ci refusent le plan d’aide européen, assorti d’un nouveau plan d’austérité sociale sous contrôle étroit des institutions européennes et du FMI : baisse drastique des salaires, hausse des impôts, casse des services publics... Ces mesures se multiplient en Europe mais se révèlent à la fois inefficaces et injustes. Et les citoyens grecs l’ont bien compris.
Le G20 est un pilier important de ce dispositif, qui consiste à faire payer la crise non pas à ses principaux responsables, la finance et les grandes banques, mais à l’ensemble des citoyens, salariés, retraités, chômeurs ou étudiants. Le G20, qui a impulsé le sauvetage massif de la finance, a également relancé le FMI, premier artisan des plans d’austérité. Il a laissé croire, en pleine crise de la finance, à sa reprise en main, tout en rejetant toute mesure qui réduirait le volume global des transactions financières - telle la taxe Tobin - ou la taille des institutions financières - telle la séparation des banques de dépôt et de crédit -. Le comble de la supercherie a été atteint avec les paradis fiscaux et judiciaires : selon le G20, ils ne seraient plus que quelques-uns dans le monde (exit la Suisse, le Liechstenstein, Monaco...), grâce à la signature de quelques conventions qui ne remettent aucunement en cause le secret bancaire.
Le G20 porte des orientations politiques très claires en terme de libéralisation des marchés et d’extension des marchés financiers, qui se concrétisent lors de chaque sommet du G20 par l’appel à la conclusion des négociations de l’OMC. Pour légitimer ses politiques aux yeux des populations, il s’est emparé de questions telles que la « dimension sociale » de la mondialisation, le développement, l’écologie, l’agriculture... « auto-saisine » sans aucune conséquence, sauf celle de déguiser la logique précédemment décrite et de vider les autres institutions internationales, en particulier les Nations Unies, de leurs prérogatives. Le G20, club très fermé des 20 pays les plus puissants du monde, participe ainsi au recul du multilatéralisme et à la détérioration de la démocratie mondiale.
Face au G20, plus de 10 000 personnes ont manifesté le 1er novembre à Nice pour « les peuples d’abord, pas la finance ». Les altermondialistes mettent en avant des alternatives claires, crédibles, qui ne dépendent que de choix politiques. Elles commencent par un désarmement des marchés financiers : une taxation sur les transactions financières (à un taux suffisant pour contrer les spéculations et pour dégager les fonds nécessaires aux biens publics mondiaux), une suppression des paradis fiscaux et judiciaires ou encore la mise sous contrôle démocratique des banques. Une réponse durable à la crise passe également par un partage des richesses et la préservation de la planète. Au fond, les mouvements citoyens qui émergent partout dans le monde (les indignés en Europe, Occupy Wall Street aux Etats-Unis...) partagent ce que porte le mouvement altermondialiste depuis longtemps : une réelle démocratie et des décisions politiques qui se fassent au service des citoyens et non pas de la finance et des plus riches.
Aurélie Trouvé, présidente d’Attac France