Lors de l’émission de France 2 « Des paroles et des actes », le journaliste François Lenglet (qui s’est autoproclamé depuis quelques mois Gardien du Temple de l’Orthodoxie Budgétaire) a voulu démontrer graphique à l’appui que Philippe Poutou raconterait un peu n’importe quoi en matière de finances. Il a donc comparé une « estimation Poutou » des « allègements des charges des entreprises », de 172 milliards d’euros, à une « réalité Lenglet » de 30 milliards. Ah… l’ouvrier s’y perd, dans tous ces milliards !
Seulement voilà : l’« estimation Poutou » est en fait celle d’un rapport d’octobre 2010 (« Entreprises et niches sociales ») du Conseil des prélèvements obligatoires, installé auprès de la Cour des Comptes, qui dit : « Au total, les dispositifs dérogatoires fiscaux et sociaux applicables aux entreprises, entendus au sens large, représentent plus de 172 milliards d’euros en 2010 et constituent une part importante des recettes fiscales et sociales. »
Les « 30 milliards » d’ « allègements de charges sociales » de M. Lenglet correspondent en fait aux seules exonérations de cotisations sociales sur les bas salaires jusqu’à 1,6 smic, qui ne sont qu’une partie des niches sociales, qui elles mêmes ne sont qu’une partie de toutes les niches ! En 2010, le rapport du conseil des prélèvements obligatoires (que ne préside pas Philippe Poutou) disait d’ailleurs : « le coût des niches sociales applicables aux entreprises est également élevé : il est évalué à plus de 66 milliards pour l’ensemble des prélèvements sociaux ».
M. Lenglet a également ironisé sur notre proposition de réforme de l’ISF. Nous précisons donc notre projet : il faut abolir la dernière réforme de Sarkozy de l’ISF, qui a fait perdre 1,9 milliards d’euros annuels de recettes à l’Etat. Mais il faut aller beaucoup plus loin, car dans l’ensemble le taux de l’ISF est de toute façon faible et son assiette est trouée de partout (elle exclut les biens professionnels, les œuvres d’art, les voitures de collection, etc.) ! Quant à l’impôt sur les droits de succession, il a été réduit à très peu de choses par Sarkozy. Nous proposons donc une réforme radicale de l’assiette et du taux de la taxation des patrimoines, des successions et des donations, qui peut rapporter 19 milliards à l’Etat.
Enfin, si les chiffres ont un sens, les mots aussi. M. Lenglet comme beaucoup de soi-disant « experts » et de patrons, dit : « charges sociales ». Mais en l’occurrence, ce dont l’Etat exonère massivement les entreprises, ce sont des cotisations sociales, qui sont les recettes de la protection sociale et le salaire socialisé de l’ensemble des travailleurs. L’Etat dépense ainsi des sommes folles pour aider, pour « assister » le patronat et les actionnaires, et ceux-ci ne s’en servent pas pour moderniser, investir, embaucher, mais pour accumuler des fortunes privées scandaleuses et spéculer, comme le montre la crise actuelle. Décidément le capitalisme et les intérêts des capitalistes coûtent très cher à la société !
Alors vite, reprenons cet argent !