Les élections du 6 mai ont provoqué un authentique tremblement de terre politique en Grèce, en faisant sombrer les partis du Mémorandum et en déstabilisant le système politique bourgeois, qui avait comme objectif de former « un gouvernement du Mémorandum », en profitant du bonus de 50 sièges, afin de poursuivre l’œuvre de destruction des gouvernements précédents.
En même temps, les résultats électoraux ont lancé un message fort à l’Europe : les « cobayes grecs » se rebellent et menacent de liquider les plans d’austérité menés par la totalité des classes dominantes européennes. Depuis lors, et devant la possibilité de former un gouvernement de gauche après les élections du 17 juin, la crainte des « quartiers généraux » bourgeois est évidente et se manifeste quotidiennement au travers d’attaques enragées contre Syriza.
La Nouvelle Démocratie, en tant qu’authentique représentante des intérêts du capital, avait mise au placard sa posture anti-Mémorandum en participant au gouvernement de Papademos. Depuis le 7 mai, elle ressort ses vieux habits en promettant de « renégocier » le Mémorandum qu’elle a voté et que Samaras avait promis à Merkel d’appliquer ! Devant le « péril de Syriza », Samaras n’hésite pas à rallier à lui tous les secteurs de la droite néolibérale, crypto-fasciste et extrémiste, en réutilisant la plus vile rhétorique anti-communiste.
Ceux là mêmes qui ont signé le massacre du peuple afin de sauver les profits des banques, qui sont incapables d’offrir une quelconque vision positive pour la société, brandissent aujourd’hui la menace d’une sortie de l’euro comme arme ultime afin d’enchaîner cette société. Ils identifient de manière délibérée le Mémorandum avec l’euro, cultivant la peur d’une possible sortie de la Grèce d’une zone euro également mal en point. Ils optent ouvertement pour la terreur et le chantage politique.
Le PASOK suit la même route et entre, sur ce terrain là, en compétition avec la ND dans le catastrophisme et les attaques diffamatoires contre Syriza. Sans aucune trace de remords, ceux qui ont détruit en deux ans les droits sociaux conquis pendant des décennies, pointent un doigt accusateur contre Syriza en l’accusant d’être irresponsable. Complètement déconnectés de la classe ouvrière et des couches populaires pauvres, ils condamnent toutes les politiques en faveur du peuple comme étant « populistes » et se limitent à ajouter à la recette de l’austérité une petite pincée de croissance. Ils dépassent toutes les limites de l’indécence quand ils détruisent la santé publique, abandonnant des millions de personnes à leur sort, tout en accusant Syriza parce qu’elle est contre cette politique et lutte pour la renverser.
Le camp de la terreur est occupé par le parti néo-nazi Aube Dorée qui, s’alimente de la poussière humaine créé par l’appauvrissement de vastes secteurs de la population et par la légitimité idéologique offerte par la Nouvelle Démocratie et le PASOK. C’est aujourd’hui une menace réelle pour la classe ouvrière et la gauche. Son émergence en tant que force parlementaire « légitime » ne doit amener aucune illusion sur l’affaiblissement de ses caractéristiques « extrémistes » ; cette force parlementaire est au contraire une couverture pour des actions de terrorisme sauvage contre les immigrés, le mouvement ouvrier et la gauche.
Contre le cauchemar du Mémorandum, la perspective d’un gouvernement de gauche jouit d’un énorme soutien parmi les travailleurs, les sans emploi, les employés et la jeunesse qui ont expérimenté dans leurs chairs ses conséquences. C’est l’expérience de deux années de luttes contre la Troïka, et la conviction dans de vastes secteurs du peuple « d’en bas » qu’il est nécessaire de bloquer la machine gouvernementale du Mémorandum, qui a rendu possible une telle perspective. La fissure qui s’est ouverte le 6 mai devrait mener à la subversion totale dans les élections du 17 juin, et c’est ce que peut garantir un vote massif en faveur de Syriza et la formation d’un gouvernement de gauche.
Un tel gouvernement devra cependant dès le premier jour s’affronter au système afin d’appliquer son programme, car les forces du capital, tant nationales qu’internationales, réagiront de manière virulente. La conquête du pouvoir gouvernemental par la gauche n’est qu’un pas en avant vers la conquête du pouvoir réel, celui des banques, des grandes entreprises, des médias, de l’armée et de la police. L’expérience historique démontre que cette bataille ne peut être victorieuse qu’à la seule condition d’obtenir le soutien d’un mouvement populaire et ouvrier organisé. C’est aussi une garantie pour qu’un tel gouvernement ne soit pas renversé, ou qu’il ne s’écroule pas sous la pression asphyxiante qu’il subira de la part de la classe dominante et des ses appareils de domination.
Seule la création d’institution de contrôle populaire et ouvrier, de syndicats et de comités dans chaque entreprise, d’assemblées populaires et de comités dans chaque quartiers, peut garantir qu’un tel gouvernement sera véritablement celui « du peuple, pour le peuple ». On doit comprendre qu’un gouvernement de gauche n’est pas un plan de sauvetage ou de gestion du système, mais une simple étape dans la bataille d’ensemble pour le pouvoir, pour nous y préparer de manière adéquate. Dans cette perspective, tandis que des milliers d’activistes et de militants se rapprochent de Syriza, il est nécessaire non seulement d’unir plus étroitement ses organisations membres, mais également de transformer Syriza en un parti unique avec des courants internes, afin d’inclure de manière créative toutes les forces dans ses rangs.
Pour cette raison, la nécessité de l’unité et de la coalition de la gauche (Syriza-KKE-Antarsya) devient urgente, vu qu’il s’agit de l’unique manière de garantir le rassemblement des forces ouvrières pour mener la bataille décisive. La même chose s’applique également au niveau européen, car seul un mouvement ouvrier coordonné et un nouveau printemps des peuples européens peut empêcher les tentatives d’isolement de la Grèce tentés par Bruxelles.
La prochaine bataille sera difficile et les défis sont énormes du fait de l’ampleur historique de la crise capitaliste. Nous marchons vers cette bataille avec le plus grand optimisme possible, en créant les conditions nécessaires à une victoire des forces ouvrières et avec l’objectif de construire une société sans pauvreté, sans chômage, sans fascisme et sans exploitation de l’Homme.
Kokkino, 9 juin 2012