Positive en soi, l’annonce de la Maison blanche selon laquelle les jeunes sans papiers ne seront plus déportés a des airs d’une machination politique fort cynique.
La décision touchera 800.000 jeunes sans papiers. Agés de 16 à 30 ans, ils bénéficieront d’un visa et d’une carte de travail valables deux ans et renouvelables par la suite pour autant qu’ils n’aient pas de précédents pénaux. C’est un pas en avant important mais qui n’aide pas les autres millions de sans papiers.
Le statut de ces derniers figure parmi les questions les plus importantes en vue des présidentielles de novembre. Obama et Romney, le candidat Républicain présumé, sont tiraillés entre les exigences de fermeté de la droite d’un côté et la pèche aux voix latino’s de l’autre.
Poudre aux yeux
En annonçant cette politique le chef d’Etat a prononcé des belles paroles en faveur des jeunes en situation irrégulière. Mais derrière les paroles et la nouvelle politique, l’histoire est toute autre ! D’abord, le gouvernement d’Obama a déporté et expulsé plus d’immigrés que celui de Bush. Ensuite, la nouvelle politique exclut de la régularisation les millions d’immigrés qui ont moins de 16 ou plus de 30 ans. Enfin, la mesure pourrait aussi constituer une alternative bon marché à la revendication du mouvement pour le Dream Act qui assurerait la citoyenneté aux immigrés.
Par sa part Romney est plus coincé. Lors des primaires, il s’était positionné très à droite par rapport à ses rivaux. Il s’agissait pour lui de convaincre l’aile la plus conservatrice des républicains de l’authenticité de ses reflexes conservateurs. Mais face à Obama et à la nécessité de courtiser la communauté latino, il fait volte-face et se prononce en faveur d’une telle régularisation, ce qui va susciter de fortes réactions de la part des durs de son parti.
La chasse aux facies ? C’est constitutionnel
Presque en même temps la Cour suprême s’est prononcée sur la loi anti-immigré SB 1070, votée en 2010 par le parlement de l’Etat d’Arizona. La Cour a déclaré anticonstitutionnels certains de ses articles mais elle a validé la partie de la loi qui oblige la police à interpeller toute personne qui aurait « l’air d’un immigré ». Voilà lancée la chasse au Latino !
Pour les deux principaux candidats donc, la question de la régularisation des jeunes sans papiers n’est qu’un jeu politique. Pour ces jeunes, ce serait par contre la fin d’une peur, celle d’être expulsés du seul pays qu’ils n’aient jamais connu, la fin du stress des contrôles dans la rue, la fin de l’appréhension de ne jamais aller à la fac faute de pouvoir emprunter.
Pour leur part de plus en plus des jeunes se lancent dans la lutte pour les droits des immigrés. Des organisations comme Voces de la Terra et son organisation des jeunes lancent des campagnes de masse en faveur des droits des immigrés et des ouvriers, indépendamment des deux partis bourgeois.
Le 30 avril passé à Milwaukee par exemple, ils ont organisé une manifestation de rue de plusieurs milliers de gens pour marquer le premier mai. Pour Voces, les luttes autour des questions de l’immigration font parti des combats du monde du travail.
Au moment où les syndicats se lancent tête baissée dans la campagne pour la réélection d’Obama, une telle démarche sert d’exemple à tout le mouvement ouvrier et progressiste.
Keith Mann