Un poète qatari a été condamné jeudi 29 novembre à la prison à vie. Son crime : avoir critiqué l’émir et fait l’éloge du « printemps arabe », que Doha a encouragé en Libye, en Egypte, en Tunisie, au Yémen et en Syrie. "Un tribunal qatari a condamné à la perpétuité Mohammed Al-Ajami, alias Ibn Al-Dhib, jugé sous trois accusations : incitation au renversement du régime, diffamation du prince héritier, Tamim Ben Hamad Al-Thani, et atteinte à la Constitution, a déclaré à l’AFP Me Néjib Al-Naïmi.
Il a ajouté qu’il allait interjeter appel la semaine prochaine contre ce verdict, rendu « au terme de six audiences, pour la plupart secrètes ». L’avocat a indiqué avoir émis en vain des réserves sur la composition du tribunal, dont le président, un Soudanais, « était lui-même juge d’instruction » dans l’affaire de son client.
« UNE ATTEINTE SCANDALEUSE À LA LIBERTÉ D’EXPRESSION »
En vertu des accusations retenues contre lui, le poète était passible d’une peine de cinq ans de prison au maximum, a encore dit Me Naïmi, un ancien ministre de la justice du Qatar, soulignant que « la perpétuité ne s’applique qu’en cas de tentative de coup d’Etat ».
Amnesty International s’est aussitôt élevé contre le verdict qui a « toutes les caractéristiques d’une atteinte scandaleuse à la liberté d’expression », et appelé à la libération du poète, présenté comme « un prisonnier d’opinion ».
« POÈME DU JARDIN »
Le poète avait été arrêté le 16 novembre 2011. Amnesty avait indiqué que la justice du Qatar lui reprochait d’avoir écrit en 2010 un poème critiquant l’émir, mais que selon des militants du Golfe, la véritable raison de son arrestation est son « Poème du jardin », écrit en 2011 alors qu’avait commencé le « printemps arabe ».
Ce poème rend hommage à la révolution tunisienne et exprime l’espoir que le changement touche d’autres pays arabes, affirmant : « Nous sommes tous la Tunisie face à une élite répressive. » Richissime état gazier du Golfe, le Qatar a été épargné par la vague de contestation qui a soufflé sur le monde arabe.