Bangladesh – Enquête sur l’industrie de l’habillement
Dans une enquête exhaustive [1], le New York Times revient sur le drame de l’usine bangladaise Tazreen Fashion, qui en s’embrasant a provoqué la mort de 112 personnes fin novembre 2012. Objectif : comprendre comment une usine déjà accusée de violations des règles de sécurité par des audits commandités par des grandes marques a pu continuer à confectionner des vêtements vendus par C&A, Wal-Mart ou Sears, au détriment de la vie des employés.
Partant des conditions de l’incendie de l’usine (un bâtiment encore en construction, des tissus inflammables posés à même le sol à côté des générateurs électriques), l’enquête démantèle l’industrie à 9 milliards de dollars un acteur après l’autre : des usines défectueuses aux sociétés d’audit chargées de les inspecter, des intermédiaires qui fournissent les commandes, aux marques internationales qui les contactent, en passant par les consommateurs avides de prix cassés.
« L’incendie est un corollaire de l’industrie de l’habillement, dans laquelle les grandes marques et les détaillants, encouragés par des centaines de millions de consommateurs à travers le monde, sont toujours motivés par le profit immédiat », conclut le quotidien. « Ceux qui subissent le coût sont ceux qui ont péri dans l’incendie », ajoute Richard M. Locke, vice-président du département de management du Massachusetts Institute of Technology (MIT), cité par le journal.
7 décembre 2012
* http://bigbrowser.blog.lemonde.fr/2012/12/07/bangladesh-enquete-sur-lindustrie-de-lhabillement/
La presse internationale s’interroge sur les responsabilités après le drame de Dacca
Le courroux populaire est à la mesure du drame humain qui s’est noué ce week-end au Bangladesh. Lundi 26 novembre, plusieurs milliers d’ouvriers du textile ont manifesté à Savar, dans la banlieue de Dacca, la capitale, pour réclamer justice, relate le New York Times [2]. L’objet de cette indignation peu coutumière ? Les circonstances dans lesquelles ont péri au moins 112 personnes samedi, victimes d’un incendie qui, pendant près de onze heures, a ravagé une usine de confection de vêtements. Celle-ci, construite en 2009, fournissait notamment de grandes enseignes étrangères comme Walmart [3] ou C & A.
D’après les témoignages recueillis auprès des rescapés, dont le Daily Star se fait l’écho [4], les ouvriers auraient reçu l’ordre de rester à leur poste alors même que l’alarme avait retenti. De surcroît, plusieurs audits avaient déjà dénoncé des failles béantes en matière de sécurité, révèle le Globe and Mail [5]. Pour tout dédommagement, la compagnie Tazreen Fashion, propriétaire de l’usine, a indiqué qu’elle verserait 1 200 dollars (à peine plus de 900 euros) à la famille de chaque employé mort dans l’incendie.
« PIÈGES MORTELS »
Cette tragédie, pour laquelle un jour de deuil national a été observé mardi, illustre les dangers d’un secteur ≥ [6] qui emploie entre 3,5 et 4 millions de personnes à des salaires dérisoires (de 40 à 80 euros par mois) et représente 80 % des recettes à l’exportation du pays. De fait, rappelle le New York Times [7], plus de cinq cents ouvriers sont morts dans des incendies d’usine depuis 2006. Un terrible constat que corrobore le Christian Science Monitor [8], dénonçant l’incurie de leurs propriétaires.
Si l’Asie du Sud est confrontée, de manière tristement récurrente [9], à ce genre d’accidents, c’est parce que certains facteurs font de ces installations de véritables « pièges mortels », explique le Guardian [10] : leur localisation dans des quartiers pauvres et congestionnés, le manque d’entraînement des soldats du feu et la corruption systémique qui frappe les inspecteurs chargés de veiller à la sécurité. Le tout sur fond « d’apathie » [11] coupable des autorités.
Pour Gulf News, industriels, autorités locales et clients internationaux partagent tous une même responsabilité [12]. Ainsi que les consommateurs occidentaux, juge le Guardian, qui devraient s’interroger sur la pertinence d’acheter des vêtements à prix cassés [13]...
* Le Monde.fr | 28.11.2012 à 12h25 • Mis à jour le 28.11.2012 à 17h27
Mise à jour le mercredi 28 : Une première version de cette article indiquait de manière erronée que l’usine produisait également des vêtements pour H&M.