Fin décembre 2012, le principal camp de réfugié palestiniens de Syrie, celui de Yarmouk, au sud de Damas, a été bombardé par les forces du régime Assad et ravagé par des affrontements qui y ont éclaté. A toutes les frontières, le « sort tragique » des réfugié·e·s palestiniens et palestiniennes semble devoir se répéter, inlassablement.
A la frontière libanaise, Kaled Si Mohand, le 23 décembre 2012, souligne que des familles, parfois, ont été reçues par des Palestiniens de camps situés à Beyrouth ou à Säida. Mais d’autres, fort nombreuses, ont été contraintes de retourner à Yarmouk ou dans les environs.
Ainsi, Sihem Abu Setteh, Palestinienne, explique les raisons du retour : « Leurs conditions de vie sont extrêmement précaires. Personne ne leur apporte le moindre secours. Aucune organisation, aucune ONG, ni même l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens ne sont venues les aider. C’est pourquoi, certains préfèrent courir le risque de retourner mourir sous les bombes chez eux, plutôt que de rester ici mourir de faim et de pauvreté. » Les nouveaux réfugiés palestiniens au Liban doivent s’acquitter d’un « permis de résidence », à renouveler tous les mois, pour un montant avoisinant les 30 CHF ; ce qui constitue une somme gigantesque.
Le 26 mars 2013, The Atlantic rapporte un drame similaire. Le régime Assad a joué – dans tous les sens du terme – le rôle de « protecteur des Palestiniens ». Mais après les attaques contre le camp de Yarmouk, par milliers, les Palestiniens se sont enfuis en direction de divers pays, entre autres la Jordanie. Devant l’afflux de réfugiés, les militaires jordaniens contraignent les Palestiniens à la recherche de l’asile – ou pour parler vrai : d’un abri – de retourner en Syrie. N’ayant pas de carte d’identité syrienne, ils sont renvoyés vers le camp nommé Cyber City, près de la ville frontière jordanienne de Ramtha. Une sorte de « prison » avec des conditions de vie déplorables.
La politique présente de la Jordanie, qui a été annoncée publiquement en octobre 2012, contrevient au principe de non-refoulement (article 3 de la Convention de l’ONU contre la torture et les autres traitements inhumains). La Jordanie ne l’a pas signée. Certes, la Jordanie a reçu un très grand nombre de réfugié·e·s de Syrie, alors que, historiquement, sa population d’origine palestinienne est fort importante. La Jordanie manque d’un soutien international. Ce qui n’échappe à personne.
Toutefois les Palestiniens et Palestiniennes refoulés se trouvent piégés doublement : attaqués par les forces répressives syriennes, pris parfois entre deux feux, ils ne peuvent s’échapper car ils ne disposent pas de papiers syriens. Ce n’est là qu’un des drames qui marque au fer rouge la population de Syrie et la Syrie elle-même, mais il parle pour toute la région et son histoire.
En disant NON, massivement, au régime dictatorial d’Assad, la large majorité du peuple de Syrie a démontré, pour toujours, qui elle était. Cela à l’opposé des images et impressions véhiculées par les médias occidentaux, qui s’appuyaient, souvent, sur les « informations diplomatiques », il y a encore trois ans,
Nous reviendrons, dans un prochain article, sur les débats et conflits « dans les sommets » de l’opposition syrienne, ce qui n’est pas nouveau dans des batailles de cette ampleur. Il n’y a qu’à penser, avec les limites de l’analogie, aux oppositions et conflits qui ont marqué les mouvements de résistance durant la Seconde Guerre mondiale ou ceux de la décolonisation, dans lesquels, plus d’une fois, les « interventions externes » étaient un facteur de « l’organisation » politique et militaire du combat – et donc des heurts internes aux « résistants » – contre les occupants ou leurs séides.
La démission de Mouaz al-Kathib – qui a dénoncé le manque de soutien logistique des « pays occidentaux » pour que le peuple en lutte puisse se défendre – et la nomination de Ghassan Hito comme premier ministre par intérim est une des expressions phénoménologiques de la dureté et de la complexité de cette lutte anti-dictatoriale (au sens de renversement du régime dictatorial). Un renversement de la dictature qui sera la première étape nécessaire d’une révolution démocratique effective.
Dans ce genre de situation et de conjoncture, diverses puissances régionales et internationales agissent dans les coulisses. Les hésitations de François Hollande à apporter un soutien militaire aux « rebelles » en sont une illustration qui ne traduit pas seulement les tensions entre divers ministères français. Ainsi, le 28 mars 2003, François Hollande est revenu sur ses positions exposées le 14 mars à propos de la livraison de certaines armes. La France veut un contrôle total (voir Le Monde du 31 mars et 1er avril 2013) non seulement sur la destination des armes, mais sur ceux qui en disposent de concert avec leurs partenaires politiques. Cela pour assurer (ou du moins tenter d’assurer) une « transition dans l’ordre », pour ne pas dire dans le « désordre le moins grand possible ».
Afin de pouvoir appréhender ce qui se passe dans ledit « camp alaouite », qui fait souvent la une d’articles superficiels, voir par ailleurs une chronique – en date du 29 mars 2013 – d’Ignace Leverrier sur le thème : « Des Alaouites appellent leur communauté à rejoindre la Révolution » [1].
Rédaction A l’Encontre