Il y a un an, comme 2, comme 3 ou comme 4 j’étais venu devant vous, dans ce douloureux temps de la commémoration. Cet exercice nécessaire est aussi un temps qui permet de mesurer les avancées, mais aussi les manques et les carences.
L’association des sinistrés du 21 septembre 2001 est bien placée pour dire les turbulences, les complications et les désillusions.
En finir. Nous n’avons pas d’autre but. C’est pour en finir que nous avons au printemps dernier lancé une grande campagne d’information et de proximité, pour que chacun ait eu un jour l’information lui permettant, s’il le souhaite, de faire valoir son droit, de se voir pris en compte justement, pour que soient reconnues les troubles, les séquelles, les aggravations. Depuis trois mois, deux cent nouveaux dossiers ont été ouverts à l’association, prouvant ainsi qu’il fallait poursuivre notre action avant d’en finir. Depuis quelques temps, nous savons que nombreux sont ceux qui, au sein du Comité de Suivi des Victimes veulent supprimer la Commission de Recevabilité qui ouvre la voie à l’indemnisation. Nous nous opposons de toutes nos forces à cette volonté, la Commission doit poursuivre son travail tant que le flot ne s’est tari. On ne décide pas de la fin, on la constate. Des manques, il y en a, encore et toujours mais il y a aussi des absences.
En mai dernier, nous nous sommes adressés à nos élus et en particulier à ceux qui président aux destinées des différentes collectivités locales. Nous voulions entendre, clairement et définitivement leurs positions sur le volet pénal de cette affaire. Nous voulions comprendre les raisons de leus absences, le pourquoi de leur silence judiciaire. Pas de réponse, comme si notre question était saugrenue, déplacée, iconoclaste. Pourtant, nous avons tous en mémoire cette exigence de justice, formulée par des personnes victimes de l’explosion. Nous savons aussi, que dans d’autres catastrophes, n’ayant pourtant généré aucune mort, aucune blessure, les communes et les départements se sont faits le relais de cette exigence. C’est en particulier le cas dans l’affaire de l’Erika dans laquelle, Total, affréteur du bateau et propriétaire de la cargaison a été mis en examen en novembre 2001. Mais à Toulouse, rien, silence et négociation, arrangements et marchandages. La justice ne saurait être une affaire d’argent. Que Total ait payé, paye et paiera ne change rien, nous sommes dans une autre dimension, dégagée de considérations mercantiles. Qu’en aurait-il été, si, comme des gens aux intentions plus que louches ont tenté de le faire croire, ce drame avait été l’œuvre de terroristes ? Aurions-nous assisté à des négociations financières avec tel ou tel groupe fanatique ?
Nous irons au procès représenter nos adhérents, nous irons avec l’association des familles endeuillées, nous irons.
Au printemps dernier, nous avons eu l’immense satisfaction d’apprendre que Mr Fauré, manutentionnaire sous-traitant avait bénéficié d’une levée de sa mise en examen. Nous avons appris aussi que le groupe Grande Paroisse était enfin mis en examen. Pour satisfaisante qu’elle soit, cette décision de justice n’est pas suffisante. Il est évident que seul le groupe Total tirait les ficelles. C’est lui qui avait acheté cette usine, c’est lui qui voulait la vendre, c’est lui, qui au fil du temps, à coup d’économie, à force de désinvestissement à permis qu’advienne ce drame. C’est bien la mise en examen du groupe qui permettra de mettre au jour cette logique qui fait si peu de cas du facteur humain. Aujourd’hui, comme hier, avec la même détermination, nous réclamons la mise en examen du groupe Total.
Nous la réclamons d’autant plus fort que nous savons bien que des petites mains travaillent dans l’ombre pour discréditer l’enquête, pour semenr le doute, pour discréditer les experts, les policiers, tous ceux qui travaillent à la recherche d’une vérité qui ne s’invente pas mais se met au jour, lentement, avec rigueur, dégagée de toute pression, de tout intérêt.
La liste est longue des théories fumeuses qui n’ont qu’un but : dédouaner l’industriel en surfant sur la vague très à la mode de la théorie du complot. La rumeur est facile à propager, dure à tuer. Chacun à son avis, son opinion. La vérité n’a rien à faire de l’un comme de l’autre. La vérité ne peut naître que de l’accumulation d’éléments objectifs, tangibles, incontestables. Ceux qui connaissent le dossier d’instruction savent que tel est le cas. En juin dernier pendant six heures, les parties civiles ont pu entendre les conclusions des experts, voir la reconstitution de l’explosion faite au centre militaire de Grammat, tous ceux qui étaient venus sans à priori, sans opinion toute faite ont été sidérés par la rigueur de la démonsatration. Seul, Maître Soulez Larivière, avocat de Total s’est évertué à dénigrer toute compétence à la vingtaine d’experts indépendants qui ont travaillé pendant 5 ans sur ce dossier. Ajoutons, pour donner la mesure de l’insondable vacuité de la défense de Total, que Maître Soulez Larivière était absent lors des conclusions des experts, préférant, au même moment tenir une conférence de presse pour dénoncer des conclusion qu’il n’a jamais entendues.
5 ans, ce n’est pas non plus assez pour que cesse la haine d’une poignée d’individus qui, il y a deux semaines me prenaient encore à partie, me crachant au visage. Ceux-là égarés sur les voies d’une collaboration aveugle avec leur employeur n’ont d’autre objectif que de jeter un voile opaque sur le réel, se contentant d’invectiver, de diffamer, d’agresser dans une posture négationniste désespérée, prouvant ainsi qu’ils ne sont capables ni de mémoire, ni de solidarité.
5 ans enfin, c’est peut être assez pour qu’advienne le procès mais il ne nous appartient pas d’en décider. Si nous pouvons souhaiter qu’il se tienne dans des délais raisonnables, il reste encore des étapes à franchir, alors, seulement, nous pourrons en finir.