Toulouse Infos : Avez-vous des informations précises aujourd’hui sur la situation des Kurdes de Kobanê ?
Ahmet Alim : Je n’ai pas de contact sur place, mais nous nous tenons informés grâce aux sites internet. Pour le moment, il n’y a pas de danger immédiat, car les combattants ont réussi à repousser Daesh hors de la ville. De plus, la présence d’un représentant kurde dans le QG de la coalition permet une meilleure coordination avec les combattants et des frappes aériennes plus efficaces. Cette situation soulage les combattants qui ont pu repousser Daesh qui était entré dans la ville il y a dix jours.
TI : La Turquie a annoncé ce lundi une première mesure concrète pour aider les combattants kurdes qui défendent la ville syrienne de Kobanê en révélant qu’elle autorisait les « peshmergas » irakiens à rejoindre la ville assiégée via son territoire. C’est une bonne nouvelle pour Kobanê ?
Ahmet Alim : Ça fait longtemps que nous demandons à la Turquie de laisser passer les combattants kurdes et l’aide humanitaire. Ils se sont rendus compte que l’aide arrivait quand même et suite au largage d’armes par les Américains, ils ont été obligés de prendre cette décision. C’est une bonne nouvelle qui va permettre de lutter efficacement contre Daesh.
TI : Que doit faire la communauté internationale et la France en particulier ?
Ahmet Alim : La France doit renoncer à appuyer la proposition de constitution d’une zone tampon entre la Syrie et la Turquie et doit aider matériellement les Kurdes. Les combattants n’ont pas besoin de renforts au sol, mais plutôt d’armes. Pour le reste, les combattants maitrisent la ville et les hommes attendus d’Irak seront suffisants.
TI : On parle beaucoup en ce moment de jeunes ou de familles françaises qui vont mener le djihad, comment expliquez-vous cette situation ? Vous fait-elle peur ?
Ahmet Alim : Ça ne me fait pas peur, mais c’est inquiétant, car ce sont des personnes sans repères, sans orientation et qui ne savent pas réellement pourquoi ils partent là-bas. Ils ne trouvent pas leur rôle dans la société et pensent pouvoir servir une cause. Mais l’Islam, ce n’est pas ce que dit Daesh.
TI : La communauté kurde de Toulouse et de France doit-elle avoir peur sur le sol français ?
Ahmet Alim : Non.
TI : Vous avez constitué un « Collectif Urgence Solidarité Kobanê Soutien au Peuple Kurde ». Où en êtes-vous et à quoi va servir ce collectif ?
Ahmet Alim : Nous avons créé ce collectif la semaine dernière pour sensibiliser l’opinion publique sur ce qui se passe à Kobanê. Notre position est claire et nette, nous demandons de l’aide militaire pour Kobanê, le droit à l’autodétermination du peuple kurde, l’inscription de Daesh comme mouvement terroriste et de retirer le PKK de cette liste.
TI : Que pensez-vous du traitement de ce conflit par les médias français ?
Ahmet Alim : Les médias français ne traitent pas ce conflit comme il le faut, car ils utilisent trop souvent les sources étatiques au détriment de personnes de terrain. Il faut être plus au contact de ce qui se passe sur place, car les communications des États ne sont pas très objectives. De plus, ce conflit devrait être mieux relayé, car son enjeu est mondial. Car si Daesh, qui n’a connu que des victoires faciles, tombe la première fois qu’il est opposé à une vraie résistance, il fera surement moins rêver certains jeunes Français.
Propos recueillis par Guillaume Truilhé