Marianne Ebel – Comment est conçue cette « caravane » de la Marche mondiale des Femmes ?
Clara – Notre Caravane partira de nos réalités de femmes pour mettre en évidence, au-delà de nos différences, des façons de lutter contre l’austérité, la pauvreté, et de résister aux violences masculines, à la misogynie, la lesbophobie, etc. Nous voulons construire la solidarité et créer des connexions entre toutes les femmes qui s’opposent aux injustices et aux inégalités. Des millions de femmes n’en peuvent plus de subir ce patriarcat colonial, capitaliste, militaire, fasciste et raciste. Au fil de notre voyage, nous rassemblerons la mémoire de leurs résistances. Nous connecterons les mouvements féministes de la base et mettrons en évidence leurs luttes et leurs alternatives. Avec notre Caravane nous voulons valoriser la force des mouvements et des luttes en Europe, et accroître la solidarité dans ce contexte difficile.
Quel sera votre parcours ?
Notre voyage de 8 mois commencera au Kurdistan. Le lancement de la caravane est organisé en Turquie par les coordinations locales de la MMF qui travaillent avec leur sœurs kurdes pour abolir les frontières qui divisent nos corps et nos luttes. Des féministes d’Europe et du monde se retrouveront le 6 mars à Nusaybin pour un forum public, où une délégation visitera le camp des réfugié·e·s syrien·ne·s soutenu par les résistant·e·s kurdes. Le lendemain, des femmes venant des deux côtés de la frontière de Nusaybin – Mardin se retrouveront pour une marche, avant le départ pour Diyarbakr (Amed) pour une grande manifestation le 8 mars. Passant par Izmir, notre route se poursuivra en direction de la Grèce pour arriver le 17 mars à Thessalonique. Les 11-12 avril il y aura une rencontre de femmes roms à Bucarest, les 17-18 avril une marche lesbienne féministe à Belgrade et le 27 avril un événement antifasciste à Ljubljana. Nous nous arrêterons à Milan, avant d’arriver en Suisse en mai. Nous avons rendez-vous à Nantes début juin ; de là nous nous rendrons en Belgique, puis en Allemagne (juillet) avant de nous arrêter en Pologne où aura lieu un campement féministe international début août. Nous retournerons ensuite vers le Sud : passant par la Hongrie, l’Autriche, nous irons à Rome, avant de nous rendre à Marseille, puis en Catalogne, au Pays Basque, en Galice et arriver le 17 octobre au Portugal où aura lieu un grand événement international de clôture de l’Action Internationale.
Quelles sont vos ressources ? Comment préparez-vous ce voyage ?
Le groupe des jeunes féministes MMF travaille depuis deux ans déjà en collaboration avec les coordinations nationales MMF en Europe. Ce projet demande beaucoup de travail mais aussi...de l’argent ! Or, nous avons très peu de subventions, nous avons donc lancé une campagne européenne de financement participatif qui devrait être une importante source de revenu (www.verkami.com/locale/fr/projects/10679)
Nous avons besoin du soutien d’un maximum de personnes et d’organisations. Notre petit groupe est très motivé pour parvenir à réaliser cette action de dynamisation et mise en lien des mouvements populaires en lutte en Europe aujourd’hui. Peut-être parce que nous sommes surtout des jeunes femmes, nous souhaitons garder l’espoir de changer ce monde oppressif.
Comment imaginez-vous les arrêts ?
La Caravane comportera plusieurs vans/voitures, qui permettront le transport des femmes et du matériel permettant le lien entre les étapes locales. Certains trajets seront organisés avec des marches à pied ou des parcours à vélo. Le nombre d’événements qui seront organisés aux niveaux local, national et régional et le nombre de femmes qui pourront participer à cette expérience unique dépendront aussi de nos ressources. Nous travaillons en alliance avec différents groupes de femmes, organisations, collectifs et réseaux progressistes. Nous recueillerons les mémoires, les priorités, les stratégies et informerons sur les résistances des femmes d’ailleurs. Pour enregistrer et diffuser les témoignages, nous utiliserons bien sûr les moyens de communication à notre disposition (Internet, radio, vidéos, photos…) La visibilité des actions par le web est l’un des aspects essentiels de l’Action, c’est pourquoi l’équipe de la Caravane se transformera, avec le soutien des femmes qui nous rejoignent, en équipe de reporters militantes. Aves les femmes rencontrées tout au long du trajet, nous voulons partager nos réalités, nos utopies et nos stratégies de résistance. Nous voulons encourager chacune à lutter, et nous donner les moyens de la solidarité sous toutes ses formes.
En Suisse la Caravane sera accueillie dans plusieurs villes lors du week-end de l’Ascension et de la Pentecôte. Quelles sont vos attentes, vos espoirs ?
Au Tessin, les femmes préparent une marche de Chiasso à Airolo. Nous espérons qu’il fera beau ! Ce sera une occasion pour échanger nos expériences, rencontrer peut-être aussi des femmes rurales et parler avec elles de la souveraineté alimentaire, qui est un thème central de toute la 4e action planétaire MMF dans laquelle s’inscrit notre voyage. A Zoug, c’est des multinationales qu’il sera question, paradis fiscal oblige… A Neuchâtel, Berne, Fribourg et Lausanne nous serons de passage, avec un accueil local. Puis nous convergerons de toute la Suisse, enfants, femmes et hommes solidaires, à Genève pendant le week-end de Pentecôte.
Propos recueillis par Marianne Ebel
Coordination MMF/Suisse