Introduction – Constat
Parler des Quartiers Populaires, c’est avant toutes choses se pencher sur un ensemble de problématiques transversales qui s’enchevêtrent et finissent par fabriquer un écheveau de violences et d’inégalités que notre société ne peut plus décemment tolérer. Sauf si nous abandonnons les valeurs et les fondements même de notre République.
Est-il utile de dire à quel point les inégalités se sont creusées dans notre société ? Nous pensons que oui et nous sommes convaincus que les accepter, c’est aussi accepter consciemment notre défaite collective. Cette résignation et cette prédilection au déclin de notre pays participent à un manque de volonté et à la peur d’affronter les problèmes dans leur ensemble. Aussi les politiques de la ville qui se sont succédées et les “plans banlieues” à répétition n’ont eu qu’un faible impact sur l’économie et le malaise social de nos quartiers parce qu’ils sont intrinsèquement conçus comme des dispositifs “palliatifs” !
Nous affirmons que les problèmes de nos quartiers populaires sont les problèmes de notre société ! A les traiter séparément, nous ne faisons qu’aggraver l’écart entre les populations qui vivent dans ces territoires et le reste des citoyens. Cet écart se retrouve dans chaque secteur d’activité économique ou social. Les habitants de nos quartiers se sentent légitimement abandonnés par les pouvoirs publics et par les collectivités territoriales. La réponse apportée jusqu’à présent ne peut satisfaire personne : ni les habitants des quartiers populaires qui ressentent très durement les effets de la relégation sociale et économique dans laquelle ils/elles sont de fait maintenus, ni les classes moyennes et supérieures qui ont le sentiment de traîner un boulet économique derrière elles.
Cette méthode du traitement spécifique des quartiers populaires est donc, à notre avis, inefficace et contre productive parce qu’elle finit (même si ce n’est pas son intention) par dresser des pans entiers de la société les uns contre les autres.
Nous, Habitants et Acteurs associatifs des quartiers populaires de Marseille et Environs, sommes déterminés à engager un dialogue serein et constructif avec l’état et les institutions. Un dialogue basé sur le respect mutuel, l’identification et la reconnaissance claire et sans équivoques des compétences et expertises des différents protagonistes de ce travail d’échange et de réflexion.
En gage de sérieux et de crédibilité, voilà des mois que nous travaillons collectivement à l’élaboration d’une plate-forme de propositions que nous avons regroupées autour de 10 thématiques : Emploi - Éducation - Santé, Logement et cadre de vie - Sécurité - Environnement - Égalité et lutte contre les discriminations - Jeunesse et sport - Culture - Démocratie, Vie associative et Cohésion sociale. Chaque article de cette “Table de Revendications” sera brièvement introduit par quelques lignes de constat et immédiatement suivi par des propositions concrètes dont le CQPM est porteur et sur lesquelles nous voulons que des discussions s’engagent à court ou moyen terme selon l’acuité critique de la question.
Emploi
Au nombre des injustices que l’on inflige aux quartiers populaires, l’inégal accès à l’emploi est une des pires violences faîtes à nos concitoyens.
La crise économique actuelle frappe l’ensemble de la société, mais dans les quartiers populaires il n’est pas rare de trouver des taux de chômage avoisinants les 40%. Aucune économie ne peut durablement supporter les conséquences de tels taux de chômage. Il est urgent de réinsérer dans le monde du travail toute une partie des « ressources humaines » du pays.
Pour cela, il faut parier sur la mise en place d’un égal accès à l’emploi et sur le changement des mentalités des décideurs économiques et financiers et des administrations. On ne peut plus se contenter des discours volontaristes qui encouragent à l’entreprenariat sans que les partenaires de ces dites entreprises ne jouent pas le jeu, le rôle des banques et leur implication réelle est essentiel ! Que des jeunes français se tournent vers des investisseurs étrangers (Qatar…) doit poser question sur le statut des quartiers populaires et de l’ensemble de ses habitants.
1. Nous souhaitons qu’un dispositif d’incitation fiscale soit mis en place pour favoriser l’embauche par les entreprises d’habitants des quartiers populaires. Cette mesure viendrait rééquilibrer le handicap notoire que représente aujourd’hui l’inscription sur un CV d’une adresse en ZUS. Les emplois Francs reposent sur la même idée mais ils ne s’adressent qu’aux jeunes de 30 ans et il s’agit d’une aide de l’état qui pourrait pâtir de l’effet d’aubaine. Notre proposition a pour but d’une part de globaliser la démarche en l’étendant sur tout le territoire et d’autre part de laisser l’initiative aux entrepreneurs qui pourraient enfin se rendre compte du potentiel de compétence et de motivation qui se trouve dans nos quartiers. Par ailleurs, nous demandons un contrôle renforcé du dispositif ZFU et une stricte application de la loi.
2. Nous souhaitons que la Charte nationale de l’Insertion soit modifiée en faveur d’une réévaluation des préconisations de février 2005 qui étaient de consacrer à l’insertion professionnelle des habitants des ZUS au moins 5% des heures travaillées dans le cadre des investissements du projet de rénovation urbaine et 10% des emplois créés dans le cadre de la GUP ou de la gestion des équipements. Nous souhaitons que ces taux soient respectivement rehaussés de 5% pour la durée du PNRU restant. Et que les personnes embauchées dans le cadre de cette Charte bénéficient obligatoirement d’une formation qualifiante ou diplômante avant ou après leur embauche.
3. Plus globalement nous souhaitons que nos quartiers puissent devenir un des chantiers principaux de l’économie solidaire et sociale. Nous demandons à ce qu’un arsenal juridique et fiscal soit conçu pour permettre et faciliter l’implantation des “industries vertes” et des filières de recyclage. Les toits de nos immeubles commencent à se couvrir de panneaux photovoltaïques, nous souhaitons que des programmes de formation à destination des jeunes de nos quartiers soient dispensés pour que ces derniers puissent travailler dans la conception, le montage et la maintenance de ces équipements…
4. Nous demandons un audit pour évaluer le quota de personnes vivant et travaillant en zones franches. Ce dispositif est perçu par la population comme une aubaine fiscale dont eux ne profitent pas ! Souvent les entreprises bénéficient de l’allègement fiscal sans retour pour les quartiers dans lesquels elles sont implantées (EX : cité Bassens avec un taux de chômage cauchemardesque et des centaines d’entreprises autour !).
5. Nous souhaitons la mise en place d’un dispositif prioritaire d’accueil et de prise en charge des jeunes de nos quartiers qui aurait pour but de les orienter et de les accompagner dans la découverte « d’autres horizons » que les murs du quartiers. Ce dispositif serait décliné par le biais de stages, de formations socio-économiques, de stages. Il favoriserait aussi la mobilité des demandeurs d’emplois (diplômés ou pas) qui souhaitent travailler hors de Marseille, en France ou en Europe par l’attribution de Bourses de mobilité de travail.
6. Nous requerrons la mise en place d’un pôle « Employeurs » pour favoriser les emplois de formation en alternance ; les jeunes de nos quartiers se retrouvent souvent face au fameux « plafond de verre », ils réussissent les entrées en formation ou les écoles mais ne trouvent pas d’employeurs. Pour décrocher un boulot ces jeunes finissent par comprendre que pour l’heure tout ne fonctionne que par réseaux de connaissances. Nous demandons une mobilisation des employeurs sur cette question.
7. En termes de formation nous militons pour le développement des stages d’insertion jeunes et femmes en situation précaire ou ayant des difficultés au niveau de la langue française.
8. Nous voulons que les circuits de réinsertions professionnelles soient raccourcis et rendus plus efficaces, la multiplication des interlocuteurs, l’éloignement et l’encombrement d’organismes tel que Pôle Emploi et les missions locales transforment la recherche d’emploi en parcours du combattant. Nous demandons la mise en place de « bourse du travail » régulières et tournantes (Quartiers par Quartiers) qui regrouperaient des partenaires institutionnels, des entreprises et des associations travaillant sur l’emploi et l’insertion. Ces bourses se déplaceraient selon un agenda à programmer de quartiers en quartiers. Elles deviendraient une interface de connexion directe entre les besoins des entreprises et les demandeurs d’emploi de nos quartiers.
9. Nous voulons le transport gratuit (bus, tramway, TER) pour les 16-25 ans pour faciliter les démarches de recherches d’emplois et/ou de stages de formation, et plus largement leur mobilité.
10. Nous demandons a ce que dans la prise en charge politique des problèmes du chômage et de l’emploi, les quartiers populaires soient pris en compte dans la stratégie et le déploiement de mesures destinées au retour et à la création d’emploi. Nous pensons qu’il est urgent d’inclure dans ces réflexions les quartiers populaires. Les Emplois d’avenir et les contrats de génération doivent aussi bénéficier aux habitants de nos quartiers qui réclament au final un retour au droit commun !
11. Nous reprenons intégralement cette proposition du rapport remis au ministre de la ville par Mr Mechmache et Mme Bacqué (1) : “Mettre en place un dispositif de réinvestissement bancaire dans le développement local. Nous proposons de travailler à l’élaboration d’un dispositif permettant d’assurer la transparence des pratiques bancaires dans les quartiers populaires en vue d’augmenter le réinvestissement bancaire de l’épargne populaire dans le financement des petites entreprises. Nous nous inspirons pour cette proposition du Community Reinvestement Act qui oblige depuis 1977 les banques américaines à réinvestir une partie de l’épargne collectée sur les territoires en difficulté dans le développement local et favorise un contrôle des banques par les citoyens et élus locaux.”
12. Dans le cadre du Collectif des Quartiers Populaires de Marseille et Environs, nous reprenons cette proposition faite par une association membre. Cette action se nomme le « SAMU EMPLOI », c’est une action innovante qui a pour objectifs la revalorisation de l’individu par l’emploi, la prise de conscience citoyenne, l’accès à la formation et la création d’emploi pérenne. Cette action vise un public en difficulté face au monde du travail, la démarche s’inscrit dans une perspective de partenariat avec Pôle Emploi et la Mission Locale. Ce dispositif a été pensé pour une large population de demandeurs d’emplois de 16 à 40 ans.
1) Rapport remis à Mr François Lamy le 30/06/2013. « Le Pouvoir D’Agir ». Participation des habitants dans la politique de la ville.
Education
L’éducation est le socle sur lequel repose une société, elle prodigue un enseignement théorique, pratique dans divers domaines. Elle doit aussi être le lieu où l’égalité des droits s’exprime pleinement. La politique des ZEP et des ZES couplée aux remaniements successifs de la carte scolaire ont abouti au résultat actuel : une école à plusieurs vitesses avec des établissements sociologiquement ghettoïsés, des moyens et des objectifs différents et au final une inégalité des chances institutionnalisée !
13. Nous voulons dans nos quartiers des collèges à taille humaine dont la capacité serait limitée à 430 élèves au maximum. L’école doit aussi être pensée pour les enfants des quartiers populaires !
14. Par manque de moyens l’orientation se fait systématiquement par l’échec, nous voulons que cette méthode soit revue et que les trajectoires « négatives » puissent être compensées par des possibilités de parcours inverses (repasser du bac pro aux filières générales plus facilement…).
15. La logique du choix octroyé uniquement aux bons élèves doit être remise en cause…tout le monde doit pouvoir choisir en fonction de ses capacités et de ses objectifs !
16. Il faut réformer la carte scolaire, elle est devenue un outil social de discrimination de masse !
17. Pour réduire les violences et l’agressivité, il est nécessaire de former les équipes encadrantes des services publics et particulièrement le personnel qui gère les enfants pendant la cantine et le temps « hors scolaire ». Cela éviterait que les enfants reprennent les cours fatigués et excités.
Nous demandons que l’encadrement soit multiplié par 2, Qu’il y’ait un adulte pour 30 élèves et non pas 60 comme actuellement !
18. Nous demandons que les conditions d’accueil soient réunies pour la réussite scolaire et pour le bien être de nos enfants. Il ne sert à rien de mettre en place des actions d’éducation si le « bien être » est absent de nos établissements. Nous souhaitons que les enfants des écoles primaires aient tous des salles pédagogiques aménagées pour le temps cantine. Certaines communes, non loin de Marseille, en sont déjà dotées comme Aubagne, Plan de Cuques.
19. Nous voulons plus de classes pour l’inclusion scolaire (CLIS) dans nos quartiers. Nous demandons le retour des permanences d’infirmières et de médecins scolaires dans nos écoles et nos collèges. Pour les collèges et lycées en ZEP, une assistante sociale par établissement.
20. nous souhaitons le maintien, le renfort et le développement de parents relais école/quartier et collège/quartier pour la médiation enseignant parents.
21. Nous souhaitons la création de postes de médiateurs socio-sanitaires qui ferais le lien santé entre l’école et les jeunes (école, collège et lycée).
22. Les enseignants des ZEP et des ZES sont souvent débutants et/ou non titulaires, le turn-over y est constant et ne permet pas la formation d’équipes stables et soudées et de projets pédagogiques motivants et mobilisateurs. L’enseignement est une vocation tout comme les métiers de la santé, nos quartiers ont besoin de gens formés, psychologiquement solides et dont l’autorité est naturelle.
23. Nous demandons le dédoublement des classes (12 élèves/classe). La remise en place des réservoirs TZR (Titulaires en Zone de Remplacement).
24. Il faut que l’Education Nationale débloque des budgets pour les HSA (heures supplémentaires) permettant la mise en place de projets pédagogiques spécifiques et couvrant les besoins en soutien scolaire.
25. Nous demandons à ce qu’un effort conséquent soit réalisé en termes de sensibilisation, de formation et d’information des parents d’élèves. Dans nos quartiers l’implication des parents est difficile et si celle ci n’est plus abordée sous l’angle de la culpabilisation des parents, mais plutôt sous celui de la collaboration au projet pédagogique, les associations de parents d’élèves auront peut être plus de chance de recruter quantitativement et qualitativement.
26. Cette proposition concerne la petite enfance : Nous souhaitons qu’un effort soit fait dans la création de lieux de vies (solidaires et associatifs), pour élargir l’offre actuelle quasi inexistante en matière de ludothèque, bibliothèque et espaces de sociabilisation des tous petits. Nous demandons aux bailleurs sociaux et aux institutions de faciliter la mise en place de ces dispositifs d’accueils (crèches parentales, micro crèches…) qui aurait pour but de Créer un espace de vie en direction des parents et de leurs enfants, de renforcer le lien entre parents et enfants ; D’initier un espace d’écoute et d’échanges pour les familles. Et plus prosaïquement de permettre aux parents qui ont des rendez vous pour des entretiens d’embauche, des possibilités alternatives de garde ; Nous pensons là surtout aux familles monoparentales (30 à 40% des ménages des grands ensembles sociaux du parc locatif de Marseille).
Santé
La situation sanitaire de nos quartiers est éminemment préoccupante, nous assistons progressivement, comme dans les zones rurales à une désertification sanitaire. Les spécialistes sont introuvables dans nos quartiers. Les services d’urgences et d’hospitalisation sont constamment saturés et la restructuration globale des établissements de santé marseillais menace plusieurs structures dans nos quartiers. La précarité, l’insalubrité et le manque de suivi dans les soins ont conduit à la réapparition de maladie quasiment disparues (Tuberculose, Gale…).Le manque d’information et de prévention conduit aussi a une dégradation de l’hygiène de vie dans nos quartiers où “mal bouffe” et surconsommation médicamenteuse font des ravages.
27. Nous voulons qu’un audit national soit réalisé pour évaluer l’inégalité sanitaire qui ne cesse d’augmenter entre les différentes zones territoriales du pays.
28. Nous voulons que, dans le cas de Marseille, les établissements de santé des quartiers nord de la ville soient maintenus et pérennisés (Laveran, Paul Paret, Beauregard, Hôpital Nord…).
29. Nous voulons que l’ARS se penche sur le déséquilibre patent qui existe en termes d’équipements d’imagerie médicale et autres plateaux techniques, entre les quartiers nord et le reste de la ville. Ce déséquilibre devant aussi être mis en perspective avec la densité des bassins de populations lésés ! Nous demandons à ce que les instances représentatives des habitants puissent, au même titre que les CIQ, être concertées par l’ARS dès lors qu’une décision sanitaire impactant nos territoires est envisagée.
30. Nous voulons aussi qu’une solution soit trouvée au sujet du manque désastreux de médecins spécialisés dans nos quartiers. L’ordre des médecins doit être en mesure d’inciter ou d’obliger les spécialistes à organiser des permanences dans certains quartiers.
31. Nous demandons à ce qu’un effort substantiel soit réalisé dans la prise en charge des pathologies lourdes telles que le Diabète, la Néphrologie (patients dialysés) et les Cancers. Les patients de nos quartiers parcourent des distances inouïes pour leurs soins (qui sont parfois quotidien) du fait de l’absence totale de centre de dialyse et de chimiothérapie.
32. Il faut encourager la prise en charge de proximité des patients en ouvrant plusieurs maisons médicalisées polyvalentes.
33. Nous demandons à ce que des campagnes de prévention ciblées soient réalisées dans les établissements scolaires pour sensibiliser le jeune public aux risques du tabac, de l’alcool, des drogues et de l’obésité.
34. Nous demandons la mise en place de structures sportives dédiées aux seniors dans nos quartiers. Cette mesure préventive partout où elle a été expérimentée s’est révélée efficace en termes d’impact sur le bien être et la santé des usagers, mais aussi financièrement avantageuse pour la collectivité.
35. Nous demandons une couverture médicale générale gratuite pour les 18-25 ans, étudiants et/ou sans emploi.
Logement et cadre de vie
La théorie des « Grands Ensembles » a fait long feu, l’utopie des années 60/70 a fait place à un univers gris quasi carcéral a l’urbanisme oppressant. Si Marseille n’a pas de « banlieue » au sens usuel du terme, la « gentrysation » de l’hyper centre marseillais coupe aujourd’hui la ville physiquement en deux. Reléguant les classes populaires dans les quartiers nord de la ville. Cette politique est ressentie par les habitants des quartiers populaires comme une forme d’exclusion supplémentaire. Surtout que « logiquement » dans ces territoires finissent par se concentrer l’ensemble des précarités et des insécurités sociales et économiques. Si l’on rajoute à cela des transports qui ne répondent pas aux besoins criants de désenclavement de nombreuses cités on peut facilement rajouter le logement à la liste des difficultés majeures que subissent nos quartiers.
36. Nous voulons que la mixité sociale devienne une réalité et pas un vœu pieu. Pour cela nous demandons que la loi oblige les bailleurs sociaux à ouvrir l’intégralité de leur parc aux locataires et permette enfin au relogement de devenir un vecteur favorisant de mobilité et de cohésion sociale.
37. A situation de crise, réponse d’urgence ! Nous demandons l’application de l’Ordonnance de 1945 concernant la réquisition des locaux à usage d’habitation vacants ! Nous demandons aussi le blocage des loyers et leur limitation à 20% des revenus.
38. Nous voulons que les 20% de la loi SRU s’appliquent par arrondissement pour corriger la situation actuelle à Marseille où la quasi-totalité du logement social se concentre sur 4 arrondissements (13, 14, 15 et 16).
39. Pour se faire nous demandons à l’état et aux collectivités territoriales de libérer leurs possessions foncières dans les quartiers sud et l’hyper-centre afin de permettre la construction de logements sociaux.
40. Dans le cadre du programme ANRU, nous exigeons que l’obligation légale de concertation faîte aux bailleurs soit respectée ! La concertation signifie que l’on demande aux habitants et aux associations de locataires leur avis et qu’un réel processus de codécision soit mis en place. Aujourd’hui cette obligation est souvent détournée au profit d’une consultation arbitraire et asymétrique. Nous demandons au législateur de préciser et de formaliser le cadre de cette obligation.
41. Nous demandons la remise en place des « gardiens d’immeubles » et l’élargissement de leurs prérogatives. Ces derniers auraient des missions d’écoute et de dialogue, de respect des règles d’hygiène et de sécurité. Ils serait ainsi un facteur important du maintien du cadre de vie de nos quartiers.
42. Dans la même logique nous souhaitons que des « conseils de Résidents » soient mis en place dans tous les quartiers en rénovation urbaine. Les prérogatives et le pouvoir décisionnel de ces conseils devra être équitablement réparti entre les habitants (associations de locataires), les élus de proximité et les bailleurs sociaux.
43. Nous sommes pour une réflexion globale sur l’habitat social en accès à la propriété si celui-ci est encadré et accompagné de mesures d’accompagnement de maintenance et de restauration de ces parcs immobiliers.
44. Nous demandons, dans un premier temps, à ce que toute la transparence soit faîtes sur le mécanisme d’attribution des logements (bailleurs sociaux et contingents préfecture, mairie, CR et CG) et nous demandons à ce que des représentants du conseil des résidents puissent siéger et émettre un avis lors des commissions d’attribution !
45. Dans la continuité de la proposition précédente, nous militons pour la création de commissions non rattachées aux bailleurs. Nous demandons un organisme municipal en cogestion avec le Département et la Région pour travailler la distribution du logement avec en leur centre administratif de grosses associations familiale UNAF-UDAF et un délégué des associations spécialisée dans le logement (CNL, CLCV, CSF, CGL).Ces délégués seront nommés de deux ans au maximum afin de contrebalancer les risques de commercialisation des demandes de logement des personnes.
46. Nous demandons que lors des programmes de réhabilitation, de restauration et de reconstruction, le nouveau bâti réponde aux normes HQE (haute qualité environnementale).
47. Nous demandons que dans le cadre de la rénovation, une attention particulière soit apportée aux personnes âgées et aux personnes à mobilité réduite, trop souvent les travaux négligent cet aspect et confinent de nombreux habitants de nos quartiers dans leurs appartements. Aggravant ainsi leur état de dépendance !
48. Nous demandons l’application scrupuleuse de la loi concernant la transmission du bail aux ayants droits vivants sous le même toit que la personne disparue et précédemment titulaire du bail (Loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs).
49. Concernant l’attribution du numéro unique départemental de demande de logement, nous réclamons que la loi soit respectée et que les locataires demandeurs ne puissent plus être identifiés par les bailleurs pour que leurs demandes soient traitées en toute équité.
50. Nous voulons qu’en termes d’urbanisme nos quartiers ne soient plus uniquement envisagés que sous l’angle sécuritaire. Nous voulons qu’ils redeviennent des lieux de vie et d’échange avec des espaces verts entretenus, une voirie décente, un mobilier urbain moins agressif et des aires de jeux sécurisées.
Sécurité
La sécurité, sur tout le territoire national, mais plus particulièrement à Marseille est devenue un thème électoral central. Ce que nous craignons, c’est qu’il ne soit que cela ! Sans faire de procès d’intention à qui que ce soit, nous considérons le traitement médiatique et politique de la question comme inadapté, contre productif et éminemment instrumentalisé ! L’actualité Marseillaise est violente, il faudrait être fou pour ne pas le concéder, mais d’autres territoires présentent des statistiques criminelles bien plus effrayantes, sans susciter autant de réactions ! Marseille est un enjeu électoral...et presque tout est dit ! Aussi nous souhaitons rappeler que derrière les unes des journaux, les déclarations martiales et le levier puissant que représente cette surexposition dans la montée de la xénophobie. Il y’a une réalité sociale bien plus complexe que les slogans et les postures ne peuvent circonvenir ! Il y’a aussi une réalité humaine, très peu appréhendée de l’extérieur, une douleur des familles et un fatalisme de plus en plus prégnant dans nos quartiers. Le déterminisme ne peut pas tout expliquer, mais on ne naît pas délinquant, on ne naît pas trafiquant, on ne naît pas assassin ou victime...on le devient ! Ce qui nous interpelle et qui nous inquiète c’est le rajeunissement des protagonistes de cette violence. C’est aussi ce qui nous fait penser que ce phénomène est le produit d’une société, que la responsabilité est collective et que les victimes de ces meurtres sont les derniers maillons d’une chaîne de violence sociale, de discriminations en tout genre et qu’ils se trouvent situés au confluent de vastes mécanismes d’oppressions. Car la violence s’exprime de façon spectaculaire dans les médias, mais elle est omniprésente et omnipotente dans nos quartiers. Chaque pas est une lutte, chaque démarche un combat, chaque réussite un exploit. Tout n’est qu’adversité, mauvaise volonté, mauvaise foi ou malchance ! La violence est là, hideuse, dans l’échec scolaire et le manque de perspective, dans le chômage héréditaire et endémique, dans le mal logement et le mépris institutionnel, dans l’inégal accès à la santé et à la culture, sans même oser parler des loisirs. Tout est violent, l’abandon de l’état et le contact avec les institutions et les administrations ! Tout est conflit du “berceau à la tombe” (“from the craddle to the grave”). Cette violence là est celle de l’injustice sociale, de l’inégalité de droit et de traitement et on ne saurait sérieusement prétendre parler de sécurité sans s’attacher à combattre le mal à la racine ! Notre plateforme s’attelle à ce travail et nous espérons contribuer à faire partie de la solution. En terme de sécurité nous n’avons pas énormément de propositions à formuler, étant entendu que notre postulat de départ est que la violence est polymorphe et que l’ensemble des revendications, idées et propositions qui sont inscrites dans ce document, feront indubitablement baisser la montée de la criminalité.
51. Les familles de victimes ne peuvent plus décemment être délaissées, stigmatisées et méprisées par les pouvoirs publics. Nous demandons instamment à ce qu’une prise en charge psychologique soit automatiquement octroyée aux familles subissant ces drames !
52. Nous demandons à ce que les dossiers de relogement de ces familles soient versés aux contingents prioritaires ! Dans le cas contraire nous considérerons que l’état et l’ensemble des institutions ont encore une fois faillis et qu’elles commettent là un délit de non assistance à personnes en danger !
53. Bien entendu nous demandons à ce qu’un effort particulier soit réalisé à l’endroit de ces familles et que l’ensemble des ressources des parcs immobiliers des bailleurs sociaux soient consultés dans le cadre des relogements d’urgences !
54. Nous demandons à la Police et à la Justice d’être plus diligents dans le traitement et l’élucidation de ces affaires criminelles !
55. Nous demandons à ce que les forces de l’ordre qui travaillent quotidiennement dans nos quartiers (Police Nationale et municipale) soient formées aux problématiques et au public de nos quartiers. Peut être faudra t’il revenir à une police sectorisée, plus proche du territoire dans lequel elle agit
56. Nous demandons à ce que les effectifs de police qui exercent dans nos quartiers le soit sur la base du volontariat, de l’aptitude professionnelle et de leur compétence de terrain. La notion de police et de service public doit être concomitante.
57. Nous voulons des commissariats de proximité qui ne soient pas des oppidums, mais des lieux où la prévention, le dialogue avec les populations et la collaboration avec les travailleurs sociaux et les partenaires associatifs soient érigés en mode fonctionnement. Nous voulons une Police qui renoue avec sa fonction de service public.
58. Nous sommes pour le récépissé de contrôle ! Nous sommes pour une Police “Gardienne de la Paix” et pas simplement “Force de l’Ordre” (modèle anglais).
Environnement
Au nombre des crises qui impactent durement nos quartiers, il en est une qui est souvent remisée au second plan, lors même qu’elle est directement liée aux facteurs sociaux et économiques. L’environnement dans nos quartiers est dégradé, sur le plan de l’urbanisme et sur le plan environnemental. Nos habitats portent de jolis noms d’arbres mais pour la plupart ils ne respectent pas les règles de préservation des milieux naturels. Construits dans des matériaux énergivores et polluants, nos cités, nos écoles et nos hôpitaux sont des gisements d’amiante. Si des travaux de désamiantage ont été effectués dans les lieux publics, nos barres d’immeubles en sont encore farcies ! L’habitat social devrait prendre en compte la problématique de l’augmentation du prix de l’énergie et comprendre que les habitants des quartiers populaires ne pourront plus faire face indéfiniment à son coût prohibitif. Il faut commencer à envisager des stratégies énergétiques sur le moyen et long terme. Penser à un habitat qui tienne compte de l’humain et de la nature. L’écologie c’est aussi pour les quartiers populaires car nous sommes tout aussi soucieux que les autres de notre avenir et de celui des générations à venir. Les propositions que nous faisons là s’imbriquent dans les thématiques de la santé, du logement et du cadre de vie, mais aussi dans l’économique.
59. Nous réitérons la demande de bâti aux normes HQE. Mais plus encore nous demandons à ce que les plans d’urbanismes se fasse aussi plus audacieux en matière de “constructions écologiquement intelligentes”. Le logement social doit lui aussi intégrer des objectifs d’autosuffisance énergétiques de ses bâtiments.
60. Nous demandons la préservation des parcs et espaces verts de nos quartiers, ainsi qu’une prise en charge plus soutenue de leur maintenance.
61. Nous demandons la démocratisation des “jardins partagés”. Chaque quartier devrait avoir, sur site ou en annexe, un espace de reconnexion intergénérationnel avec la nature.
62. Nous pensons que les quartiers populaires doivent eux aussi être inclus dans la réflexion globale sur les modes de consommation. C’est pourquoi nous militons pour un raccourcissement des circuits de distributions et de mise en contact direct entre les producteurs et les consommateurs. Nous pensons à mettre en place des partenariats entre des AMAP (Association de Maintien de l’Agriculture Paysanne) et des “marchés de quartiers” qui seraient pilotés par les comités de quartiers/tables de concertations.
63. Nous sommes définitivement contre la monétarisation des ressources naturelles. Aussi nous sommes contre la DSP octroyée par MPM à VEOLIA et SUEZ dans la gestion des eaux de Marseille. Nous sommes pour que cette gestion soit remise à nouveau entre les mains d’une régie.
64. Nous voulons le développement des transports en commun dans les quartiers populaires, dans le cadre d’une double perspective économique de désenclavement et écologique de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Égalité et lutte contre les Discriminations
L’inégalité des droits et des traitements est le ferment de tous les désordres sociaux et politiques de notre époque. Dans un système qui se veut démocratique elle est d’autant plus intolérable ! Pourtant, si le constat est partagé sur la montée des inégalités et de l’injustice sociale, les solutions tardent à venir. Par manque de courage politique, par refus dogmatique, les autorités continuent à euphémiser le problème. Pourtant si ces inégalités ne sont pas correctement appréhendées elles finissent par faire système et devenir un véritable écheveau de discriminations institutionnelles ! Le danger mortifère est de créer, de facto, des catégories de citoyens, certains plus égaux que d’autres. Sur cette réalité les pires dérives viennent se greffer de toutes parts pour atomiser le sentiment d’appartenance à un destin commun. La République doit d’abord assumer le présent si nous voulons vraiment une France apaisée, riche de sa diversité et forte de ses principes et valeurs.
65. Nous réclamons le changement de l’intitulé du “Préfet à l’Egalité des Chances”. Nous avons besoin d’un “Préfet à l’égalité des Droits”. Dans “la patrie des droits de l’homme” il est difficile de reconnaître que les droits de certains sont bafoués, mais ne pas l’admettre c’est aussi continuer à creuser ces inégalités !
66. Nous voulons que les missions des délégués de préfet s’articulent en complémentarité avec celles des chefs de projets des territoires et inversement.
67. Nous demandons un durcissement des sanctions contre les entreprises condamnées pour discrimination.
68. Nous exigeons des pouvoirs publics un audit national sur l’état des discriminations dans le domaine de l’accès à l’emploi, au logement et à l’éducation. Il va de soi que cet inventaire se fera sur l’adresse et non sur des critères ethniques réels ou supposés.
69. Nous demandons une réelle prise en compte de cet obstacle à la cohésion sociale, par les partenaires sociaux. Les syndicats doivent former et sensibiliser leurs cadres et leurs sympathisants à cette question. Nous demandons un élargissement du domaine de compétence des commissions obligatoires à l’Egalité Professionnelle. La loi du 9 Mai 2001 oriente ces commissions sur la question de la parité, nous souhaitons que celles ci puissent aussi, officiellement, traiter des autres types de discriminations.
70. Nous sommes pour un nouveau débat et une nouvelle approche du concept mal nommé de “discrimination positive”. Nous ne sommes pas “moralement” convaincu par le concept, mais l’état actuel des relations sociales nous oblige à trouver, si ce n’est des solutions, au moins des palliatifs !
71. Nous préconisons l’utilisation et la généralisation du CV anonyme, ainsi que l’obligation de refus motivé (logement).
72. Nous demandons à ce que les opérations de “testings” soient utilisées comme un outil judiciaire et pédagogique !
73. Nous demandons la mise en place de “séjours pédagogiques ”inclus dans la formation des cadres, des entrepreneurs et des décideurs financiers et des cadres de la fonction publique. Ceux ci effectueraient des stages dans des centres sociaux, des organisations structurantes ou des associations dans les quartiers populaires pour être en contact avec un public qu’ils/elles ne sont pas forcément amenés à côtoyer dans leurs environnements professionnels.
Jeunesse et Sport
Le sport est une pratique sociale, individuelle ou collective qui comme la culture contribue à notre équilibre et à notre épanouissement. Le sport est aussi un formidable vecteur de sociabilisation. Il occupe dans nos quartiers une place importante dans le développement de la jeunesse. Nous pensons aussi que c’est un formidable outil pédagogique de transmission des valeurs telles que la solidarité, le goût de l’effort et le sens du dépassement de soi. Ces valeurs, sans tomber dans un olympisme emphatique, sont structurantes pour l’individu et pour le groupe. Volontairement nous omettons de citer le goût de la compétition. C’est là notre singularité, nous sommes pour une approche éthique du sport. La compétition finit invariablement par devenir une forme de prédation, or ce que nous souhaitons sublimer dans la pratique du sport c’est la notion de plaisir, de partage, d’esprit collectif, de solidarité et de lutte dans l’adversité. Nous ne pensons pas que le sport puisse être sérieusement envisagé comme un modèle de promotion social. D’ailleurs nous dénonçons les dérives mercantiliste de certains sports professionnels et nous les récusons intégralement dans la défense des valeurs auxquelles ils prétendent adhérer ! Le monde amateur nous offre souvent l’exemplarité recherchée, l’abnégation des animateurs, des entraîneurs, l’enthousiasme des jeunes pratiquants, la ferveur de celles et ceux qui les accompagnent sont autant de gouttes d’espoir versées dans un océan de dureté ! Mais cette pratique est entravée par de nombreux facteurs sociaux, économiques et politiques !
74. Nous proposons une réflexion nationale qui aurait pour but la rédaction d’une charte éthique de la pratique du sport. Celle ci serait affichée dans tous les clubs et associations sportives, elle pourrait aussi être débattue en classe par les élèves et les enseignants.
75. Nous demandons l’ouverture des piscines municipales et autres complexes sportifs au public, dans les quartiers populaires. Nous demandons à ce que celles ci soient restaurées et maintenues en état de marche.
76. Nous demandons le renouvellement des équipements sportifs qui aillent dans le sens de l’amélioration des conditions d’accès du public.
77. nous demandons à ce que des formations spécifiques soient dispensées aux encadrants de l’accueil du service public en lien avec les acteurs associatifs ;
78. Nous demandons à ce que les clubs qui le souhaitent puissent bénéficier de travaux de réfection de leurs terrains d’entraînement et de compétition amateur par les collectivités concernées. La fracture Nord/Sud à Marseille se lit aussi dans la topographie des surfaces de jeu : dans les quartiers Sud les terrains sont presque tous en pelouses synthétiques, au Nord nos jeunes jouent sur des terrains stabilisés (dangereux en cas de chute, traumatisant pour les articulations…).
79. Nous demandons aux collectivités et au ministère des sports d’organiser des tournois de sports collectifs ou individuels qui promeuvent le fair play et l’éthique. Les vainqueurs ne seraient pas forcément les meilleures ou les plus fortes, mais aussi celles qui auront le plus respecté l’esprit du jeu, les adversaires et l’arbitrage.
80. La pratique du sport coûte cher et elle doit être accessible à tous. Nous demandons au CG de faire un effort supplémentaire sur le chéquier “l’Attitude”. Nous souhaitons que ce dispositif fasse des émules et qu’il soit aussi octroyé aux élèves du primaire.
81. En matière de prévention nous demandons la mise en place de programmes de lutte contre les récidives, une alternative à l’emprisonnement des mineurs et jeunes adultes primaires. Cela peut se traduire par la mise en place d’un dispositif d’insertion et d’un accompagnement à l’emploi et d’aide aux jeunes et aux familles. Un lien doit être établi avec les familles (parents) des ces jeunes de nos quartiers concernés pour éviter la récidive. Nous réclamons la création de postes d’éducateurs spécifiques. Des réponses et un suivi pour les sortants de prison doit être assuré.
82. Nous demandons à ce que les jeunes âgés de 18 à 25 sans emploi bénéficient du RSA sans autre critère d’éligibilité.
Culture
Nous considérons la Culture comme un outil d’épanouissement individuel et comme un formidable levier d’émancipation collective. Nous pensons que la Culture ne peut se conjuguer en art majeur et en art mineur. Nous pensons aussi que la Culture est un langage universel qui permet la communication des hommes par delà les barrières de classes, les barrières sociales, religieuses ou ethniques. La Culture est une transcendance qui traduit notre humanité, il n’y a donc pas pour nous de Culture avec un grand C et de Culture populaire de masse qui serait une forme de culture en voie de développement. Nos quartiers recèlent de talents artistiques qui par manque de moyens, par mépris institutionnel se retrouvent bridés, mésestimés et relégués dans un ghetto culturel, leur expression est souvent entravée, encadrée et parfois étouffée. Nos quartiers ont indubitablement une Histoire et une Culture qui doit pouvoir s’affirmer et s’afficher sans complexe et sans tutelle intellectuelle.
83. Nous demandons la création d’un conservatoire des arts vivants dans les quartiers nord de Marseille. Nous demandons la création d’équipements culturels en nombre dans la partie Nord de Marseille (salles de cinéma, théâtres, musées, salles de spectacles de danse…) pour réduire l’inégalité de l’accès à la culture : La Culture pour Tous et partout !
84. Nous demandons à ce que la scène nationale du Théâtre du Merlan s’ouvre à la culture populaire des quartiers de Marseille en rendant accessible sa programmation aux artistes issus des quartiers et au public de ces mêmes quartiers.
85. Nous souhaitons que la programmation culturelle à l’échelon national, régional et local prenne enfin la mesure des attentes des publics populaires. La Culture (et surtout ceux qui la font) doit sortir de son ghetto élitiste et faire l’effort du VRAI brassage culturel ! Pour cela nous souhaitons que des modulations de prix soient réalisées pour permettre l’accès aux théâtres, à l’opéra et autres concerts de musique, nous demandons la gratuité pour les bénéficiaires du RSA et les ménages à faibles revenus…
86. Nous demandons à ce que la culture populaire ne soit plus mésestimée et que les artistes de nos quartiers soient aidés, accompagnés dans leurs démarches artistiques sans préjugés et avec bienveillance.
87. Nous demandons la mise en place de “jumelage” entre écoles élémentaires et collèges de la ville du Nord et du Sud de Marseille. Ces établissements seraient liés par des conventions de collaborations culturelles et éducatives.
88. Nous demandons la création d’espaces culturels de proximité en lien direct avec la population qui aurait un droit de regard et de proposition dans l’élaboration des programmes.
89. Nous demandons la création d’un musée de l’immigration et des quartiers populaires de Marseille.
Démocratie, Vie Associative et cohésion sociale
Le Pacte social est rompu, dans nos quartiers plus encore qu’ailleurs, et il est plus que nécessaire de remettre en contact le citoyen/habitant avec sa représentation locale ou nationale et les institutions en général. La vie associative est une composante incontournable du fragile équilibre de nombreux quartiers. Pourtant depuis quelques années les moyens alloués aux “organisations structurantes” et aux autres partenaires associatifs ne cessent d’être revus à la baisse. Cette politique baissière des subventions à un coût social difficilement chiffrable mais très spectaculaire. L’autre paramètre “péjorant” la vitalité démocratique est à mettre en lien avec l’apolitisation voulue et organisée sur nos territoires. Cette déstructuration (pour ne pas dire destruction) politique menée à grand renfort de pratiques clientélistes et affairistes a pour but de maintenir une illusoire sensation de “paix sociale”. Or sous les braises le feu couve, et nous n’avons pas encore finit de payer le coût social de ces systèmes décadents, autocrates et autistes. Le changement de gouvernance est nécessaire, mais il ne suffit pas, l’éducation populaire qui avait pour but de “former les citoyens” doit être réactivée, soutenue et encouragée par les pouvoirs publics. Autorités qui ne doivent pas craindre l’excès de démocratie, car il n’y a jamais trop de démocratie ! La démocratie citoyenne d’interpellation (DCI), concept issu du rapport de Mr Mechmache et Mme Bacqué, s’appuie en grande partie sur la mise en place des “tables de concertations”. Nous validons et nous adhérons à cette démarche, mais nous demandons à ce que ces tables de concertations soient aussi des tables de décisions. En clair nous demandons à ce que la démocratie d’interpellation soit le pendant décisionnel de la démocratie représentative et pas un gadget servant de faire valoir !
90. Nous demandons à ce que nos comités de quartiers soient de plein droit représentés dans les futures tables de concertations.
91. Nous revendiquons la mise en place de référendum de mandat électif consultatif. L’élu assumera ou pas (en conscience) la prise en compte des résultats de la consultation.
92. Nous sommes pour le non cumul des mandats et la limitation de ceux ci à 2 mandats consécutifs !
93. Si le mandat impératif n’existe pas, nous souhaitons que des bilans d’étapes des mandats des élus soient instaurés, pour que les engagements électoraux soient enfin contraignants pour la représentation nationale et locale.
94. Dans le cadre de la démocratie de proximité, nous souhaitons que les référendums d’initiative populaire deviennent plus accessibles et que le nombre des pétitionnaires soit revu à la baisse.
95. Nous souhaitons qu’une réflexion profonde soit engagée autour des questions de l’engagement et du statut du bénévolat. Nous savons que la démocratie à un prix (et pas seulement un coût), dans nos quartiers cet engagement est plus que nécessaire, mais il est entravé par la question financière intimement liée à celle de l’autonomie et de l’indépendance des citoyens/habitants.
96. Nous demandons à ce que la transparence soit faite concernant l’attribution des subventions aux associations et nous demandons à ce que des représentants associatifs, dûment cooptés par leurs pairs siègent et votent aux commissions, et que celles ci soient ouvertes au public.
97. Pour un meilleur suivi des dossiers nous demandons à l’état de rallonger la durée des missions des préfets. Les passations de pouvoir, les prises de contact répétitives, et les changements incessants d’interlocuteurs sont autant de frein à la mise en place des dispositifs et des coopérations entre acteurs de terrain et institutionnels.
98. Nous reprenons intégralement cette proposition du rapport remis au ministre de la ville par Mr Mechmache et Mme Bacqué (2) : “Mettre en place un système de sécurisation des associations en attente du versement de subventions la Caisse des dépôts et consignation. Par ailleurs les financements de fonctionnement seront accordés pour une durée de trois ans.”
99. Nous demandons aux législateurs de se pencher sur la question de la vie associative et sur le statut du travailleur social, dans le sens d’une lutte contre la précarisation de ces professions. De la même manière que dans le monde du travail les IRP sont reconnues, nous demandons la création d’IRQA (Instances Représentatives des Quartiers et des Associations) qui soient dotées de moyens et de prérogatives efficients. La relation de subordination entre l’associatif et le politique, ainsi que la question du clientélisme ne peuvent pas être combattues que par des bons sentiments, aussi il est crucial de faire le choix courageux du rééquilibrage de ces relations !
100. La démocratie est une denrée précieuse qui se cultive et qui prospère dans l’exemplarité, aussi nous demandons à ce que des mesures salutaires soient prises par les exécutifs politiques lorsque des membres de leurs organisations se trouvent mêlés à des affaires judiciaires. Tout cela dans le respect de la présomption d’innocence, mais dans la fermeté et surtout pas dans la duplicité !
101. La démocratie s’apprend et se transmet. Nous demandons à ce que dès le plus jeune âge (dès le cours élémentaire) nos enfants soient sensibilisés, par la pratique, au jeu démocratique. Nous voulons aussi que l’éducation populaire soit dotée de moyens, au même titre que la formation professionnelle continue, nous considérons que l’épanouissement du citoyen est un énorme enjeu de société.
(2 )Rapport remis à Mr François Lamy le 30/06/2013. « Le Pouvoir D’Agir ». Participation des habitants dans la politique de la ville.
Conclusions et Perspectives
Nous voilà au bout de ce document, qui compte 10 thématiques et 101 propositions, revendications, idées livrées telle qu’elles. Ce document est vivant et n’est pas figé dans l’espace et dans le temps. Il n’a pas vocation à devenir un dogme, un credo ou un codex sacré. Sa seule ambition est d’être et de rester une base de travail collective, un travail de référence, patiemment compilé depuis des mois au gré des assemblées populaires que le CQPM réunit tous les 15 jours. Les débats y sont intenses, électriques et passionnés. Mais toujours aussi passionnants, constructifs et enrichissants ! Oui le débat démocratique dans nos quartiers, comme ailleurs, n’est pas facile, il est parfois heurté, mais il est authentique et sans fard. Faire une synthèse des débats aurait été bien présomptueux, aussi nous avons pris le parti d’écrire le ressenti, les espoirs et les colères des habitants de nos quartiers. Mais surtout nous avons voulu mettre en avant ce formidable gisement d’intelligence que recèlent nos quartiers. Beaucoup croient encore que nos quartiers sont des friches politiques encore soumises au clientélisme et ravagées par les trafics en tous genres. Beaucoup se trompent, cette plateforme a pour objet de prouver qu’il existe bien une conscience politique dans ces quartiers. Que celle ci n’est pas partisane, mais indépendante et qu’elle est capable de produire des solutions, des recommandations, des orientations. Ce texte est le fruit d’une gestation commencée au lendemain du 1er Juin 2013, dans l’esprit fraternel qui avait animé le collectif du même nom, les femmes et les hommes du CQPM ont continué ce travail harassant du débat d’idée et de la confrontation des points de vue. Nous ne nous sommes épargné aucun effort, nous n’avons fait l’économie d’aucune conviction ni d’aucune persuasion pour aboutir à ce résultat. Imparfait mais sincère et sans calculs ! Cet ouvrage collectif est né des assemblées populaires qui se sont déjà tenues : au CS Agora, à la Savine, au local Schebba des Flamants, au local CSF Busserine, au CS Velten (centre ville) à Fonvert, à Picon. Il est voué à l’évolution au gré des prochaines assemblées qui sont et seront toujours la pierre d’angle de ce collectif. L’homogénéité des constats et des conclusions que nous tirons de nos débats vaut pour l’ensemble des quartiers populaires de Marseille et des environs. Il n’y a pas de fracture géographique dans la crise de nos quartiers, mais au contraire un constat partagé dans les quartiers populaires au Nord, à l’Est, au Centre et au Sud de Marseille.
Nous avons validé collectivement l’édition et la publication de ce document qui nous servira de base de négociation avec les partenaires institutionnels. Il est entendu que si des organisations syndicales ou politiques souhaitent discuter ou reprendre à leur compte une ou plusieurs des 101 propositions, nous y sommes, à priori et sous conditions, favorables. Pour autant, et pour ne pas trahir l’esprit d’indépendance qui anime le CQPM, personne ne peut prétendre représenter auprès d’une organisation politique ou syndicale, dans une liste électorale ou une administration le CQPM. Dans notre collectif il n’y a que des membres, pas de Leader Maximo ou de grand Timonier.
Nous terminerons en disant à quel point nous sommes fiers d’appartenir à ce collectif composé d’hommes et de femmes admirables, qui ont su (et savent) faire front commun, taire leurs dissensions et privilégier l’intérêt collectif par delà les contingences personnelles.