Les accords d’Arusha signés en 2000 avaient permis au Burundi, petit État d’Afrique centrale, de sortir d’une guerre civile de dix ans. Ces accords prévoyaient un équilibre entre les Hutu et les Tutsi dans les principaux organes dirigeants du pays et une impossibilité pour le président de briguer un troisième mandat...
En violant cette disposition, Pierre Nkurunziza s’est maintenu au pouvoir, en dépit de nombreuses manifestations qui ont été durement réprimées, avec un projet politique clair : la remise en cause de ces accords qui, d’ailleurs, n’ont jamais été signés par son organisation le CNDD-FDD. Déjà en 2013, il tentait de réviser la Constitution du pays [1].
Une politique ethniciste du pouvoir
Les manifestations contre le troisième mandat de Nkurunziza étaient essentiellement urbaines, jeunes, associant aussi la société civile et rassemblant indistinctement Hutu et Tutsi. C’est cette dynamique que le pouvoir tente de casser en développant une politique de répression ciblée sur les Tutsi, accompagnée par une propagande raciste.
Ce sont plus d’un millier de personnes qui ont été assassinées, des charniers ont été découverts, des milliers de personnes croupissent en prison dont certaines subissent des tortures, plus de trois cent mille personnes sont réfugiées dans les pays limitrophes, notamment la Tanzanie et le Sud Soudan, mais restent à la merci des tueurs du régime. L’essentiel des victimes de cette répression sont d’origine Tutsi et de nombreux témoignages confirment que les pires traitements sont infligés avant tout à cette communauté.
Pour mener à bien cette politique, le pouvoir a épuré la plupart des services de police et de l’armée des Tutsi, mais aussi des Hutu qui refusent cette politique...
Un risque de génocide
Pierre Nkurunziza, qui a été le premier président africain à féliciter Trump pour son élection, plonge le pays dans l’isolement en refusant la présence d’une force de maintien de la paix de l’Union africaine, en se retirant de la CPI, en rompant sa collaboration avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations unies. Une façon pour lui de se faciliter la tâche pour imposer des mesures extrêmement préoccupantes.
Le recensement ethnique dans l’ensemble de l’administration [2], le déploiement de téléphones portables aux Conseils locaux de sécurité qui permet un maillage du territoire, la distribution de machettes aux populations, le creusement de trous censés servir à l’installation de latrines qui peuvent servir de charniers [3]. Des mesures du même type que celles prises par les extrémistes Hutu qui ont préparé le génocide des Tutsi au Rwanda.
Les extrémistes du pouvoir, à l’image de Révérien Ndikuriyo (président du Sénat) ou de Pascal Nyabenda (président de l’Assemblée nationale), ne se cachent plus pour proférer des menaces à l’encontre de la communauté tutsi et mènent une propagande raciste.
Actuellement cette politique n’a pas de prise sur la grande majorité de la population, mais les difficultés économiques dans lesquelles se débattent la grande majorité des Burundais pourraient à terme changer la donne.
Paul Martial