Rouge n° 2180 du 16 novembre 2006
Surtout, cette mobilisation se situe dans une succession de luttes locales ou départementales qui se sont développées depuis la rentrée. Sans atteindre des sommets, cette grève démontre que le mécontentement et la volonté d’en découdre sont présents sur tout le territoire et concernent l’ensemble de cette entreprise, même si certains secteurs restent davantage mobilisés, comme les services du courrier (centre de tri et distribution) et les centres financiers.
Au vu des enjeux, personne n’était dupe : une grève de 24 heures ne pouvait pas permettre de faire plier le gouvernement et la direction de l’entreprise. La question posée aujourd’hui concerne les suites à donner à cette mobilisation. Tout d’abord, les fédérations syndicales doivent prioritairement travailler à conserver le cadre unitaire de la grève du 14 novembre. Ce ne sera pas évidemment facile, la CFDT ayant annoncé qu’elle s’associait à l’action, tout en ajoutant qu’elle limitait son mot d’ordre au retrait de la nouvelle directive européenne.
Il n’en reste pas moins vrai que les fédérations CGT, SUD et FO sont très majoritaires, ce sont donc sur elles que repose la responsabilité de conserver un front unitaire. Par ailleurs, la dynamique qui a permis le développement de conflits locaux pendant trois mois, doit être poursuivie et amplifié. Pour cela, toutes les occasions doivent être saisies et l’implication directe du personnel doit être une préoccupation constante des équipes syndicales. La coordination des centres en grève devient aujourd’hui une priorité. Ainsi, après l’Île-de-France, une coordination des centres de tri de Bretagne est aujourd’hui une possibilité qui n’est pas à écarter. Il est temps aujourd’hui de se donner les moyens de gagner.
La Poste : succès impératif
Rouge n° 2180 du 9 novembre 2006.
La grève des postiers, à l’appel de la CGT, de SUD, de FO, de la CFDT et de la CFTC, le 14 novembre, se place dans un contexte très tendu.
D’un côté, la Commission européenne vient de présenter un projet de directive actant l’ouverture totale à la concurrence, dès le 1er janvier 2009, avec la volonté de le voir adopté lors du Conseil des ministres européens de décembre. De l’autre, dans un souci d’adaptation à cette échéance de libéralisation, La Poste accélère les restructurations et son lot de reculs sociaux (service public, emploi, salaires et conditions de travail). Dans ce contexte, les résultats de la grève du 14 novembre seront analysés de très près par les dirigeants de l’entreprise (encore) publique et par son ministre de tutelle. L’échec est interdit !
Les organisations syndicales doivent également préparer les suites de cette mobilisation. Cette démarche semble d’ailleurs réaliste, au vu de l’évolution du climat social au sein de La Poste. Depuis la rentrée, des conflits locaux ou départementaux, dont la plupart ont un caractère reconductible, ont éclaté dans un nombre significatif de régions, chez les facteurs principalement, mais aussi dans les bureaux de poste et dans les centres de tri, donc dans presque tous les secteurs de La Poste . Et, autre élément positif, dans la majorité de ces mobilisations, si la direction n’a pas abdiqué, elle a été contrainte à des reculs, parfois importants.
Si la question d’une grève nationale illimitée n’est pas aujourd’hui un mot d’ordre crédible, les fédérations syndicales doivent pousser à la multiplication des conflits locaux, quelles qu’en soient les formes, et de travailler à leur coordination afin d’en donner une visibilité nationale. Mais, ce n’est pas une nouveauté, la construction d’un front syndical est toujours très difficile à La Poste. Le rôle des militants locaux et du personnel lui-même sera donc déterminant. À ce sujet, le conflit des centres de tri d’Île-de-France, réclamant une revalorisation des primes de travail de nuit et la fin des horaires atypiques, qui en est à sa quatrième semaine et qui s’étend à certaines villes de province comme Marseille et Nantes, doit servir d’exemple. La création d’une coordination des centres, sous l’impulsion notamment de militants de SUD et de FO, a permis de bousculer les jeux syndicaux traditionnels. La généralisation de ces formes d’initiatives, où les salariés peuvent débattre du contenu des revendications et des formes d’action est une nécessité pour la construction d’une mobilisation qui s’inscrive dans la durée et qui soit... victorieuse !
Enfin, la perspective d’une mobilisation d’ensemble des services publics, intégrant les usagers, se pose avec toujours plus d’acuité. Les grèves à la SNCF, le 8 novembre, aux Impôts et à La Poste, le 14 novembre, sur des sujets voisins, le démontrent. Et il ne s’agit pas d’attendre les élections de 2007 : la responsabilité des confédérations est engagée.