Les Shanghaïens vont se remettre à circuler à l’ancienne, en taxi. A partir de jeudi 26 janvier, seules les voitures immatriculées à Shanghaï pourront utiliser la plate-forme Didi, qui domine le marché des VTC en Chine. La mesure avait été adoptée fin décembre 2016 par plusieurs municipalités, dont Pékin, Canton et Shenzhen.
Mais la ville la plus peuplée de Chine est la première à l’appliquer. Samedi 21 janvier, les chauffeurs non shanghaïens ont été informés par SMS que leur temps sur la plate-forme était compté. Un coup dur pour Didi – 97 % de ses 410 000 chauffeurs qui travaillent à Shanghaï n’ont pas le permis de résidence (hukou) de la ville – et pour les conducteurs eux-mêmes.
Depuis 2011, les Shanghaïens s’étaient habitués à tapoter sur leur téléphone pour commander une voiture. Aux plus belles heures de la concurrence entre les plates-formes, Didi contre Kuaidi, puis, après une fusion, Didi-Kuaidi contre Uber, les prix étaient bradés pour attirer les clients.
« Nous voulons juste gagner notre vie »
Mais, depuis le rachat des activités d’Uber en Chine en août 2016, Didi contrôle 90 % du marché des VTC en Chine. Les tarifs des courses ont flambé. Sans la plupart de ses chauffeurs à Shanghaï, le service risque de se limiter à son activité originale : permettre de commander des taxis traditionnels.
La seule alternative pour les chauffeurs qui voudraient continuer consiste à louer une voiture immatriculée localement, mais le coût supplémentaire de 6 000 yuans (800 euros) par mois paraît rédhibitoire. Acheter l’est encore plus : à Shanghaï, les plaques sont vendues aux enchères. Il faut compter 200 000 yuans environ.
Beaucoup de chauffeurs avaient déjà prévu de jeter l’éponge, en voyant leurs revenus baisser depuis que les trajets ne sont plus subventionnés par les plates-formes. Mais, pour les autres, la nouvelle règle passe mal. « Nous voulons juste gagner notre vie », dit un chauffeur, qui conduit de temps en temps après ses heures de bureau.
La ville de Shanghaï a défendu la mesure en accusant les VTC d’être responsables de la pollution et de la congestion de la ville. Mais beaucoup pointent le puissant lobby des taxis – un métier réservé aux détenteurs d’un hukou – qui proteste contre la concurrence déloyale des VTC. Contrôlés par la ville, les taxis ont l’oreille du gouvernement municipal.
Simon Leplâtre (Shanghaï, correpondance)
Journaliste au Monde