Le remaniement ministériel partiel opéré par Monsieur Youssef Echahed la semaine dernière, a suscité de très vives réactions, en particulier de la part de l’opposition démocratique et de l’Union Générale Tunisienne du Travail.
En réalité, l’ardeur de ces réactions n’est pas due au limogeage de Monsieur Abid Briki du ministère de la fonction publique en soi.
Abid Briki, qui n’avait pas informé des raisons de son éventuelle démission avant qu’il ne soit remercié, a fait preuve de cohérence avec les choix gouvernementaux hostiles au peule, il y avait grandement contribué, soit en ce qui concerne la fonction publique (licenciement de milliers de fonctionnaires, gel des salaires…), soit en ce qui relève des institutions publiques (la privatisation sous couvert de restructuration par exemple).
Le chef du gouvernement ne peut donc pas reprocher à Abid Briki des positions contradictoires avec la ligne gouvernementale. Il lui a reproché son manque de discipline quand il est allé, en premier, faire part de son éventuelle démission aux médias. D’ailleurs, Abid Briki n’a à ce jour fourni aucune explication sérieuse à sa démission, ce qui tranche en la faveur, d’une lutte d’influence et d’un un conflit d’intérêt parmi l’équipe dirigeante, et non d’une divergence de principes.
Les réactions véhémentes de l’opposition démocratique, se justifient par les nouvelles nominations et par les déclarations faites à cette occasion par Youssef Echahed et par sa ministre des finances peu de temps avant. Il est certain qu’il y a une volonté manifeste de précipiter la mise en place des mesures austères, dictées par le Fond Monétaire International, des mesures hostiles au peuple et à la patrie, qui vont encore aggraver le chômage, la pauvreté des classes laborieuses et populaires, et qui vont de surcroît renforcer la dépendance de notre pays vis à vis de l’étranger.
Par ailleurs, la nomination d’un membre du bureau exécutif du syndicat du patronat à la tête d’un ministère en charge de la fonction et des institutions publiques, révèle encore une fois les desseins dangereux du gouvernement et à travers lui ceux de la coalition qui le soutient.
Ce gouvernement qui a fait preuve d’échec et d’incompétence, n’a plus d’autre choix que celui d’exécuter, sans gène et de façon flagrante, les politiques défavorables au peuple et à la patrie, pour satisfaire les visées de ses bienfaiteurs : les lobbys de la corruption et de la contrebande à l’intérieur du pays et ceux des entreprises et des institutions financières de l’étranger.
Il est certain que cette voie suivie par le gouvernement ne va pas régler la crise dans notre pays, elle va au contraire l’aggraver, comme nous l’avons démontré plus d’une fois au Parti des Travailleurs et au Front Populaire.
Il est aussi évident, que ces choix vont amplifier la colère populaire, compte tenu de leurs répercussions sociales catastrophiques sur l’emploi, le pouvoir d’achat, la santé, l’éducation et l’ensemble des services publics. Ce que nous constatons déjà jour après jour.
Les protestations sociales s’accentuent et se propagent dans les différentes régions, alors que l’équipe dirigeante réagit en multipliant la répression, ce qui va sans doute, nourrir la colère et engendrer des mobilisations plus accrues que celles connues par le passé, et qui avaient conduit à la révolution du 17 décembre 2010 – 14 janvier 2011. Une révolution dont la coalition réactionnaire dirigeante tente incessamment de s’emparer et détourner les acquis, en particulier ceux qui ont trait aux libertés.
Face à cette situation, toute la responsabilité incombe aux forces démocratiques, progressistes et sociales pour contrecarrer les visées du gouvernement de coalition. Des dirigeants qui, rappelons le, aggravent la pauvreté et la misère des classes laborieuses et populaires, détournent leurs revendications morales et matérielles, hypothèquent le pays et son avenir aux forces étrangères colonialistes, et œuvrent pour le retour de la répression et de la tyrannie.
Il est évident que le Front Populaire, dont notre parti le Parti des Travailleurs est l’une des composantes principales, a une responsabilité historique en cette période.
La voie est ouverte devant le Front Populaire dont les positions ont régulièrement été corroborées par les faits, lui permettant d’acquérir une confiance grandissante parmi la population.
Le Front Populaire doit convaincre qu’il est porteur de l’alternative en mesure de concrétiser les espoirs des millions de personnes qui ont fait la révolution sans parvenir à en cueillir les fruits.
Mais des conditions essentielles sont à réunir.
– Le Front Populaire doit définir clairement ses objectifs, préciser son programme pour offrir une alternative concrète et convaincante à la crise qui secoue le pays. Il doit aussi ajuster son comportement politique quotidien, en précisant les revendications, les slogans, les formes de lutte et les alliances.
– Le Front Populaire doit prendre part, sans hésiter, à la lutte sociale et populaire, pour accéder à l’honneur d’en prendre effectivement le commandement.
– Le Front Populaire doit réussir à réunir la majorité de la population autour de son projet, c’est une condition sans laquelle nous ne pourrons réaliser aucun changement réel au profit de notre pays, de notre société et de notre peuple.
Dans ce contexte, le temps revêt une importance cruciale, le Front Populaire doit s’adapter aussi rapidement que les exigences du moment et s’accommoder au rythme de leur développement.