Amsterdam,
Les élections municipales néerlandaises du printemps dernier avaient bénéficié à la gauche, aussi bien pour le Parti du travail (PVDA, social-libéral) que pour le Parti socialiste (SP, gauche radicale). Mais, peu avant les élections parlementaires du 22 novembre, les sondages donnaient un avantage à la coalition de droite sortante dirigée par le Premier ministre, Jan Peter Balkenende (Alliance de la démocratie-chrétienne, CDA). Pendant cette campagne, le PVDA n’a pas réussi à se présenter comme une véritable alternative.
Ce n’est pas si surprenant. Il y a peu de différences, sur les questions sociales et économiques, entre les programmes des deux grands partis, le CDA et le PVDA. Balkenende a réussi à mener des contre-réformes en douceur, qui sapent toujours plus l’État- providence, réduisant les allocations sociales et privatisant davantage les soins médicaux, sans rencontrer trop d’opposition. Il n’est pas évident que le PVDA revienne là-dessus. Si la question de l’immigration a peu marqué la campagne électorale, c’est que, sur le fond, les grands partis sont d’accord pour réduire le flux d’immigration et « intégrer » les immigrés. Ceux qui cherchent à se faire naturaliser doivent désormais connaître la langue néerlandaise, mais aussi passer des épreuves sur l’histoire et la culture néerlandaises que beaucoup de Néerlandais « de souche » auraient du mal à réussir.
Les travaillistes ont cherché, avec un certain succès, à capter les voix d’électeurs issus de l’immigration. Cela explique, en partie, leurs gains aux élections municipales. Ils avaient même un certain nombre de candidats d’origine turque sur leurs listes. Mais, en suivant l’exemple de la CDA, et en excluant tous ceux qui refusaient de dénoncer le génocide arménien, ils ont beaucoup perdu. Aujourd’hui, le gouvernement sortant est en train d’examiner un projet de loi pour interdire le voile intégral dans les lieux publics. Cette mesure, qui ne toucherait qu’une minorité infime de musulmanes aux Pays-Bas, est vue par les musulmans comme une stigmatisation de leur religion. Pour l’instant, aucune opposition n’est venue du PVDA.
Dans cette campagne plutôt morne, seul le SP a fait des propositions attrayantes. Le parti avait, avant les élections, neuf sièges sur les 150 que comptait la Chambre de députés. Il était susceptible d’en gagner onze de plus. Pour beaucoup d’électeurs traditionnels de gauche, le SP apparaît comme la seule façon de défendre les acquis face au néolibéralisme. Le SP a aussi remis la question européenne au centre des débats politiques. Seul parti significatif à avoir mené la campagne pour le « non » en 2005, il interroge aujourd’hui les grands partis, restés plutôt discrets sur le sujet depuis le référendum, sur leur attitude en cas de nouveau projet de Constitution européenne.
Le SP n’est pourtant pas dépourvu d’ambiguïtés. Sur la question de l’immigration, il se prononce en faveur des contrôles, surtout en ce qui concerne les travailleurs venus des nouveaux pays de l’Union européenne, en expliquant que les immigrés font baisser les salaires des Néerlandais. En même temps, il n’exige pas (heureusement...) le renvoi de ceux qui sont déjà là, mais souhaite qu’ils aient tous les droits dont disposent les Néerlandais. C’est un sujet de débat dans le parti. Plus largement, le SP a adopté une position qui le dit prêt à participer à un gouvernement présidé par le PVDA. Le PVDA a également évoqué cette hypothèse. Or, il est difficile de voir comment le SP pourrait participer à un gouvernement dirigé par le PVDA, tout en maintenant sa position sur de défense des acquis sociaux ou son opposition à la présence des troupes néerlandaises en Afghanistan.