Nous ferons plus complètement le point sur la campagne de solidarité en septembre.
A ce jour 13.000 euros ont été envoyés par ESSF à la coalition d’associations MiHands.
A ce jour aussi, les combats se poursuivent à Marawi, plus de deux mois et demi après le début du conflit le 23 mai 2017. La ville est intensément bombardée, bâtiment après bâtiment, pour déloger les tireurs du groupe djihadiste Maute. Les destructions sont très étendues.
Les combats se concentrent aujourd’hui dans un secteur plus réduit de la ville. L’université de Marawi a pu rouvrir ses portes. Cependant, le retour de la population dans les quartiers « pacifiés » ne va pas de soi. Ainsi, une marche de femmes maranao a été organisée pour imposer leur retour, mais elle a été bloquée par l’armée. Les habitantes craignent que ce ne soit pas seulement pour des raisons de sécurité (explosifs…). Des clans très riches habitent Marawi où les trafics foisonnaient (dont celui de la drogue), ils ont laissé dans leur maison de l’or thésaurisé et un armement de qualité. Le groupe Maute s’est certainement servi – les militaires peut-être bien aussi.
Au-delà de la bataille de Marawi, les conditions d’un conflit durable semblent être réunies. Les groupes salafistes djihadistes ont probablement gagné un pouvoir d’attraction sur des jeunes et sont à même de recruter – ils des armes de gros calibres, des ressources financières. L’armée peut tirer avantage d’une situation de guerre rampante : elle reçoit une aide militaire des Etats-Unis, bénéficiera d’un budget renforcé et pourra augmenter ses effectifs. Les USA montrent pour leur part qu’ils sont à même, dans le cadre des accords existants, de fournir un appui militaire multiforme que ni la Chine ni la Russie ne peuvent aujourd’hui offrir. Le président Duterte maintient la possibilité d’étendre à d’autres régions le régime de loi martiale actuellement en vigueur dans toute l’île de Mindanao (l’état-major ne souhaite pas actuellement que ladite loi martiale soit imposée dans l’ensemble du pays).
La population victime de cette crise majeure n’a pas son mot à dire. Elle est otage d’un conflit entre groupes et forces armées. Les Moros sont traités en suspect. Aux Philippines, porter des papiers d’identité n’est pas la règle si vous ne conduisez pas une voiture, ne voyagez pas à l’étranger… Les « personnes déplacées » (IDPs) par le conflit ont ainsi beaucoup de mal à passer les nombreux postes de contrôle militaires. Elles risquent de se retrouver confinées dans les centres officiels d’accueil, sous surveillance, quand elles n’ont pas pu trouver refuge chez des proches. Dans la province de Tarlac, les autorités proposent d’imposer une carte d’identité obligatoire aux seuls musulmans – alors que cette province se trouve au nord de l’archipel à quelque 1500 km de Marawi !
La solidarité doit en conséquence s’inscrire dans la durée et créer, avec persévérance, les conditions d’une coopération intercommunautaire active pour combattre les discriminations, les replis, les peurs (voir les précédents articles).
Quand les familles maranao ont fui les combats, elles pensaient pouvoir revenir chez elles quelques jours plus tard et n’ont presque rien emporté. C’est pourquoi elles manquent généralement de tout, depuis les ustensiles de cuisine jusqu’à de quoi accueillir un nouveau-né. Le temps passant, l’aide alimentaire d’urgence ne suffit plus et il faut fournir des produits alimentaires frais.
La population a dans sa majorité cherché refuge auprès de proches un peu partout à Mindanao et au-delà, dans le reste de l’archipel. Dans la province de Lanao del Sur (capitale Marawi) elle est pour l’essentiel cantonné dans des centres officiels d’accueil, contrôlés par l’armée. Le plus gros contingent de réfugié.e.s se trouvent dans la province de Lanao del Norte. C’est là que MiHands a porté l’essentiel de son effort.
MiHands intervient quotidiennement à Iligan, la principale ville de Lanao del Norte, mais aussi à la frontière entre les deux provinces de Lanao (nord et sud) dans des municipalités plus reculées. Les organisations membres de cette coalition envisagent la possibilité d’étendre géographiquement leur action, mais sans faire doublon, d’autres réseaux intervenant par exemple efficacement à Cagayan de Oro (province du Misamis oriental).
MiHands reçoit l’aide destinée aux « personnes déplacées » sous forme liquide (collecté sur place), matérielle (colis) ou par transferts bancaires envoyés tant par des réseaux nationaux qu’internationaux.
MiHands travaille en « flux tendu ». Dès qu’elle reçoit de l’aide, elle la distribue à des familles dans le besoin.
Toutes les activités de solidarité menées par les associations membres de cette coalition sont par ailleurs officiellement enregistrées auprès des services administratifs chargés de recenser l’aide fournie aux victimes du conflit de Marawi. Cela n’empêche pas MiHands de subir la pression du régime de loi martiale imposée dans toute l’île.
Non seulement l’acheminement de l’aide peut être considérablement ralenti par la multiplication des postes de contrôle militaire, mais l’armée trouve « suspectes » toute activité militante indépendante et les place sous surveillance. Or, les réseaux populaires investis dans l’aide aux populations déplacées sont témoins des violations de droits humains et sont amenés à protéger les victimes. Ils considèrent que cela fait partie de leur mandat humanitaire.
Un cas, notamment, m’a été rapporté. Une personne psychologiquement instable, incapable de faire face à un interrogatoire musclé, a été torturée (brûlures de cigarettes, notamment) – avant d’être libérée, les militaires se rendant compte que ses aveux et propos étaient par trop incohérents. Ils ne veulent cependant pas qu’il témoigne. Depuis sa libération, il doit être protégé, c’est-à-dire transféré fréquemment d’un logement à un autre – avec sa famille –, sachant que les « forces de l’ordre » retrouvent sa trace ; et la trace des humanitaires qui les aident. Le devoir d’assistance coûte cher (location d’appartements, entretien d’une famille), il est aussi risqué.
Une aide alimentaire et matérielle massive arrive à Mindanao où interviennent de multiples agences. Beaucoup moins nombreux (et en général beaucoup moins argentés) sont les réseaux qui ont une conception « globale » de l’humanitaire et de ses diverses dimensions : « quotidienne » certes (nourriture, hygiène…), mais aussi psychologique, paramédicale, adaptée aux enfants, facilitant la reconstitution et l’insertion sociales, préservant ou redéveloppant les solidarités (notamment intercommunautaires), défendant les droits des victimes… Toutes choses qui ne sont possibles que dans la proximité et qui impliquent un effort militant soutenu.
Pierre Rousset
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