Dans un rapport publié vendredi, l’ONG War On Want accuse les chaînes de supermarchés britanniques Tesco et Asda (filiale du groupe américain Wal-Mart en Angleterre) et la chaîne de magasins Primark d’exploiter la main-d’œuvre féminine qui fabrique leurs vêtements au Bangladesh.
Le document, paru vendredi 8 décembre et intitulé « Fashion Victims » (« victimes de la mode »), affirme que six ateliers de Dacca, au Bangladesh, emploient plus de 5 000 personnes (principalement des femmes) pour le compte des groupes britanniques et que « même les opératrices de machine à coudre les mieux payées touchent seulement 16 livres par mois, ce qui correspond à 5 pence de l’heure pour les 80 heures qu’elles doivent régulièrement faire chaque semaine ». « Les groupes comme Primark, Asda et Tesco peuvent vendre leurs produits à bas prix au Royaume-Uni car des femmes sont exploitées au Bangladesh. Ces entreprises ne font pas respecter leurs engagements en matière d’éthique par leurs fournisseurs à l’étranger », a encore dénoncé Louise Richards, directrice de l’ONG, appelant le gouvernement britannique à agir.
L’industrie textile du Bangladesh avait déjà ouvert une enquête en octobre après un reportage de la chaîne de télévision britannique Channel Four qui montrait des enfants, dans des usines du Bangladesh, fabriquant des vêtements pour le compte de Tesco. Ainsi, bien que Tesco, Asda et Primark se soient engagés officiellement à payer un salaire mensuel de 22 livres (32,5 euros), qui correspond au minimum vital au Bangladesh, les fiches de paie commencent à 8 livres (11 euros) par mois dans les ateliers, souligne le rapport.
JUSQU’À 96 HEURES DE TRAVAIL PAR SEMAINE
Selon l’ONG, les abus concerneraient aussi la durée du travail. Là encore, les trois entreprises demandent à leurs fournisseurs de ne dépasser qu’exceptionnellement le plafond de 48 heures hebdomadaires, avec un jour de congé par semaine pour chaque employé. Pourtant, explique t-on,« les personnes interrogées travaillent jusqu’à 96 heures par semaine – soit le double – et perdent souvent leur jour de congé. Il est arrivé que les propriétaires de l’usine imposent jusqu’à 140 heures de travail supplémentaire par mois, souvent non payé, sous peine de licenciement ».
Les trois groupes ont toutefois rejeté les accusations portées par War On Want. Tesco a été un des premiers à réagir, affirmant que le groupe, qui possède 563 supermarchés au Royaume-Uni, « propose des vêtements bon marché à ses clients britanniques, dont nombre de familles à faibles revenus, mais pas au prix de mauvaises conditions de travail chez ses fournisseurs ».
« Nous sommes membre de l’Initiative pour un commerce éthique et pleinement engagés dans la campagne destinée à améliorer les conditions de travail au Bangladesh », a rappelé par la suite un représentant des 160 enseignes Primark.
Le groupe Asda a quant à lui assuré avoir inspecté les 13 000 fournisseurs de ses 313 supermarchés pour s’assurer qu’ils n’exploitaient pas la main-d’œuvre. Le marché britannique de l’habillement (33 milliards de livres en 2006), très concurrentiel, est de plus en plus dominé par les chaînes à bas prix et les supermarchés, y compris pour les vêtements dits de qualité.