Nous nous adressions aussi aux gauchistes : Les lycéens sont mignons ! Nous sommes tous des obsédés sexuels ! Vive l’amour ! Bureaucrates, faites-vous enculer, c’est un plaisir fou !
Nous avons hurlé notre refus total du vieux monde : A bas la famille ! Et, en passant devant une colonne de gardes mobiles, l’arme à l’épaule et le visage suintant de haine, protégée par une chaîne du service d’ordre gauchiste, nous avons chanté : CRS, desserrez les fesses ! Et gauchistes, vous aussi ! Notre comportement joyeux a fortement déplu, bien sûr, aux gauchistes respectables. Visiblement, ils se sentaient visés par notre grande banderole : A BAS LA DICTATURE DES « NORMAUX » ! et par notre détermination trop voyante à leurs yeux de ne plus nous laisser étouffer, censurer, normaliser. Notre seule présence dans ce défilé et le fait que nous prenions ouvertement la parole semblaient remettre en question le scénario des différents gauchismes : servir le peuple et fermer sa gueule, surtout taire sa propre souffrance, son propre désir. Finis, pour nous, la mauvaise conscience, la culpabilité et le masochisme politiques… Maintenant, nous passons à l’offensive. (…)
Pour nous, la lutte des classes passe aussi par le corps. C’est-à-dire que notre refus de subir la dictature de la bourgeoisie est en train de libérer le corps de cette prison où deux mille ans de répression sexuelle, de travail aliéné et d’oppression économique l’ont systématiquement enfermé. Il n’est donc pas question de séparer notre lutte sexuelle et notre combat quotidien pour la réalisation de nos désirs, de notre lutte anticapitaliste, de notre lutte pour une société sans classes, sans maître ni esclave. (…)
Y en a plein le cul de mener des vies de robots (même gauchistes). Oser lutter contre l’oppression, d’où qu’elle vienne. Oser vaincre le robot et le flic que le capitalisme a voulu faire de chacun ou chacune de nous. Réapprendre à aimer, à jouir, à être ensemble, à créer notre vie, à faire la révolution par tous les moyens .
Guy Hocquenghem
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