Menace de guerre généralisée. « Les Nord Américains sont sur deux fronts, avec la Chine et avec la Russie. Donc j’adjure que l’on comprenne que nous sommes menacés d’une guerre généralisée (...) Il faut empêcher la guerre d’avoir lieu. Et il faut donc empêcher l’engrenage qui en partant d’Alep peut nous amener jusqu’aux frontières de la Russie en passant par l’Europe. Je ne m’occupe que de nos intérêts. Notre intérêt c’est que la guerre s’arrête là bas et qu’elle n’ait pas lieu en Europe. ». (14 octobre 2016, revue de la semaine #2)
La solution ? Un partenariat avec Poutine : « Je n’ai rien à voir avec cet homme sinon une chose : je ne veux pas de la guerre en Europe, je m’y oppose de toutes mes forces. (...) Par conséquent ils sont nos partenaires encombrants, puissants ou tout ce que vous voudrez mais nécessairement des partenaires » (meeting de Strasbourg, 2017).
Cette manière de présenter les choses a, pour Mélenchon, un corollaire : celui d’ignorer le peuple syrien.
Concernant un peuple massacré par les bombardements
Fin 2016, alors que les bombes des régimes syrien et russe s’abattent sur les quartiers est de la ville d’Alep, Mélenchon, en campagne pour les élections présidentielles, rencontre quelques turbulences médiatiques et communique, le 15 décembre : « Ces dernières heures nous avons été tous bouleversés par la diffusion des images en provenance d’Alep et du bombardement que la partie est de cette ville est en train de subir. A cette occasion (...) on fait de moi un ami des bombardements sur cette partie de la ville, et évidemment, cela suscite en moi une immense indignation. Comment peut-on penser qu’il y a une personne ici ou là qui aime les bombardements et leurs conséquences ? Donc à ceux qui se poseraient des questions, je leur dis que comme eux je suis indigné, blessé ». Et, dénonçant ceux qui se taisent sur les bombardements sur Mossoul ou au Yemen il explique : « Tous les bombardements m’écœurent, pas certains seulement ». (15 décembre 2016, revue de la semaine #11).
Cette indignation non sélective est juste. Mais quelle conclusion politique en tire-t-il ? Qu’il faut que tous ces bombardements s’arrêtent et que cela doit être un des thèmes de sa campagne ? Que nenni.
On pourrait selon lui bombarder des zones peuplées, du moment que la cause lui semble juste et que les bombardements sont « classiques » : alors que la coalition internationale bombarde Raqqa (et détruira plus de 80% de la ville), Mélenchon s’insurge contre l’utilisation qu’elle fait de bombes au phosphore (des armes incendiaires) et réclame : « Je voudrais adjurer ceux qui prennent des décisions de renoncer à l’usage de ces armes là, quitte à utiliser les autres, c’est la guerre, c’est la guerre, on a compris, mais pas les armes au phosphore car c’est vraiment affreux ». (16 juin 2017, vidéo, revue semaine 32) Parce qu’un immeuble s’effondrant sur des êtres humains suite à l’impact d’une « simple » bombe, cela n’est pas affreux ?
Étranges positions lorsque l’on se présente comme un grand défenseur des peuples et que l’on a porté un slogan « L’Humain d’abord ».
Concernant un peuple massacré par les armes chimiques
Suite au massacre aux armes chimiques d’août 2013, Mélenchon écrit : « Il parait que le premier ministre va donner des preuves de la culpabilité du régime syrien dans l’attaque au gaz. Elles justifieraient la “punition” annoncée par François Hollande. Ces preuves seront les bienvenues. Ne doutons pas qu’elles seront examinées avec soin. Les précédentes “preuves” données par les Anglais et les Nord-Américains à propos des armes de destruction massive irakiennes sont trop présentes à nos esprits pour qu’on puisse songer à nous en faire avaler un avatar. Ce que j’apprends à propos de ces “preuves” dans les avant papiers de la presse écrite que je découvre m’inspire un doute. ». (Billet de blog, le naufrage syrien des solfériniens, 4 septembre 2013). C’est cet argumentaire qu’il reprendra après le massacre de Khan Sheikhun en avril 2017 et celui de Douma en avril 2018, effectués également à l’arme chimique.
Omar Ibrahim (Mémoire Créative de la Révolution Syrienne)
Mélenchon ne remet pas en cause le fait que des armes chimiques ont été utilisées contre des civils syriens et estime que cette utilisation est inacceptable. Mais pour lui, il n’y a pas de preuves permettant de faire porter la responsabilité au régime syrien de l’utilisation de telles armes, ou que ces preuves ne sont pas convaincantes.
Ceci interroge : les premières preuves auxquelles a accès Mélenchon, ce sont des photos et films de personnes mortes, agonisantes, blessées mais aussi de personnes les secourant et des témoignages des familles, proches, secouristes et blessés qui diffusent immédiatement des informations (par les réseaux sociaux ou par interview à des médias) et qui accusent le régime syrien. Mélenchon peut critiquer ce que raconte l’entourage immédiat des victimes. Mais quand on se présente comme défenseur des peuples, ne doit-on pas en premier lieu rapporter une parole, celle du peuple ? Et donc celles des populations touchées par ces armes (quitte à indiquer son désaccord) ?
En outre, si le plus souvent Mélenchon se borne à dire qu’il n’y a pas de preuves permettant d’accuser le régime, il n’hésite pas, le 11 avril 2018, à accuser des opposants à Assad. À propos du dernier massacre sur lequel il s’était exprimé et qui avait été très médiatisé, celui d’avril 2017 à Khan Sheikhoun, il explique : « Vous vous souvenez que la dernière utilisation d’armes chimiques en Syrie a été attribuée à ceux qu’on appelle les rebelles qui à cette époque était déjà purement et simplement bon euh des milices islamiques et qui voulaient provoquer un incident qui justifie une intervention contre Bachar al-Assad et son gouvernement. ». (Revue de la semaine #60).
Comment peut-on penser un seul instant qu’une population accepte de se faire tuer (ou que ses proches soient tués) par un groupe Y puis décide d’accuser les opposants à Y afin que Z viennent les sauver ? Les sauver de quoi ? Mélenchon ignore-t-il que les Syriens sont des êtres humains et que des tissus sociaux maillent leurs régions, villes, quartiers comme dans toute société humaine ?
Du coté de la physique, la chimie et la biochimie, là encore, Mélenchon gagnerait à revoir les bases. Notamment à propos des domaines de phase gazeuse ou liquide des molécules utilisées dans les armes chimiques, des degrés de toxicité et modes d’action de ces molécules, selon le type de diffusion. À Khan Sheikhoun, la mise en évidence de l’action d’un agent neurotoxique ne pouvait permettre une telle assertion [1].
En outre, en octobre 2017, un mécanisme d’enquête conjoint de l’ONU et de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) concluait à une attaque menée, à Khan Sheikhoun, par le régime syrien. Mais peut-être Mélenchon remet-il en cause les conclusions de l’ONU ? Et soutient-il le véto russe qui a permis d’empêcher la poursuite de ce mécanisme d’enquête ?
Concernant des ventes d’armes recommandables ou non
Mélenchon dénonce la vente d’armes de la France à l’Arabie Saoudite. En septembre 2015, lorsque, le projet de loi déposé par le gouvernement annulant la vente des navires Mistral (2 porte-hélicoptères) à la Russie a été voté, Mélenchon expliquait : « L’annulation de cette vente est une gabegie financière et une faute géopolitique qui met à mal l’indépendance de la France en matière militaire. » (billet de blog, Annulation de la vente des Mistrals à la Russie). Et d’ajouter : « le gouvernement français cherche désormais à revendre ses navires à d’autres pays parmi lesquelles l’Arabie Saoudite et l’Égypte soit une monarchie absolue et une dictature militaire, deux pays appliquant la peine de mort alors qu’elle fait l’objet d’un moratoire en Russie. ». En quoi ces critères feraient que la Russie est plus recommandable ?
En outre, si l’argument est de fonder le critère de livraison d’armes à un État sur le degré de répression interne de celui-ci, les faibles différences entre ces trois pays laissent interrogateurs. Les rangs de la France, la Russie, l’Arabie Saoudite et l’Égypte sont, d’après un classement en 2015 relatif aux libertés individuelles : 31e ; 134e ; 153e et 156e (avec pour note relative : 8,74 ; 5,63 ; 4,5 et 3,86). D’après un classement en 2015 relatif à la liberté de la presse, les rangs sont, pour ces mêmes pays : 38e, 152e, 164e et 158e (avec pour note relative : 21,15 ; 44,97 ; 59,41 et 50,17) [2]]. La France est indiquée pour comparaison.
Concernant l’origine de Daesh
Suite aux attentats de Paris du 13 novembre 2015, Mélenchon explique : « Si Daech a une réalité idéologique dans l’islamisme politique, alors c’est dans sa branche saoudienne. (...) Mais son ancrage local, sur le terrain, sa puissance territoriale entre l’Irak et la Syrie, prend racine dans la révolte des sunnites irakiens. Brutalisés par le gouvernement chiite à Bagdad sous la poigne du Premier ministre Maliki, l’homme des Américains (...) ils se sont révoltés. Ce sont les officiers de l’ex-armée de Saddam Hussein qui prennent leur revanche. Ceux-là ont introduit le concept “d’État” dans le projet initial confus des groupuscules islamistes locaux. Et quand ils renversent la frontière en terre qui sépare la Syrie de l’Irak, ils renouent aussi avec le panarabisme spécifique de l’idéologie du Baas dont les deux gouvernements irakien et syrien se réclamaient naguère.
Dans ces conditions, l’identité religieuse de Daech n’est qu’accessoirement importante. Elle l’est seulement pour sa capacité à rallier à une guerre de conquête territoriale un mouvement politique mondial conduisant près de 80 nationalités à être représentées sur place. Car c’est une guerre de conquête sur une zone qui contient une très grande part des réserves d’hydrocarbures du monde. ». (Billet de blog, 2 décembre 2015, La guerre du Levant montre ses contenus et ses contours).
Daesh existe alors depuis deux ans et correspond à une ré-émergence d’al-Qaida. Al-Qaida s’est formé au tournant des années 80-90 et a pour origine la politique des États-Unis et de l’Arabie Saoudite en Afganistan et en Irak. Cette organisation a connu plusieurs phases de développement et de déclin. La dernière phase de développement est celle qui aboutit notamment à la formation de Daesh (acronyme de État Islamique en Irak et au Levant) en 2013, et à la proclamation d’un Etat islamique en 2014. Cette nouvelle phase d’expansion provient, comme l’indique Mélenchon, de la répression menée en Irak par le gouvernement de Maliki, « l’homme des Américains »... mais également de l’Iran ! Toutefois, elle a aussi une autre cause non mentionnée par Mélenchon : le régime syrien qui a réprimé dans le sang ses opposants tout en favorisant le développement des islamistes et notamment d’al-Qaida. Pour preuve, entre autres, les centaines d’islamistes qui furent libérés des prisons de Assad en 2011, et parmi eux certains leaders comme Amr al-Absi (’Abu Atheer’) qui devint un haut dirigeant de Daesh. Le jeu du régime d’Assad consistant, selon le moment, à réprimer, favoriser le développement ou coopérer avec les islamistes, pour son propre compte, ne date pas de 2011.
Cet « oubli » de Mélenchon interroge d’autant plus qu’au même moment, le 19 novembre 2015, le Parti de Gauche publiait un article, signé Djordje Kuzmanovic et Théophile Malo, qui expliquait : « N’en déplaise à la diplomatie française, cette résilience de Daech n’est pas d’abord favorisée par le régime syrien. Pas plus que ne l’a été l’émergence de cette organisation et des autres forces djihadistes dans la zone qui - il est désolant de devoir le rappeler alors que même Tony Blair a fini par le reconnaître publiquement - ont d’abord profité de l’invasion de l’Irak par les États-Unis et des soutiens de la Turquie, du Qatar et de l’Arabie Saoudite. ». (Souligné par nous).
Dans ce même article, les auteurs reconnaissent clairement la répression de Assad en 2011 contre le peuple syrien : « On ne saurait nier que Bachar Al-Assad a réprimé dans la terreur un soulèvement au départ pacifique, dont nombre d’acteurs initiaux n’étaient pas assimilables aux arrière-pensées de leurs soutiens locaux et internationaux. Et on ne peut que souhaiter que le peuple syrien soit délivré, un jour, et des djihadistes et de ce régime-là. ».
Mais les assertions niant le lien entre Assad et le développement des forces islamistes de type Daesh interrogent. Cela correspond-il à une mauvaise connaissance du sujet ou à la volonté de présenter Assad certes comme un bourreau pour le peuple syrien mais aussi un bon allié pour combattre Daesh ?
« A bas le Parti Da’ech Arabe Socialiste »
Inscription qui rappelle que Daech est la création d’Assad et de son parti, le BASS (Parti socialiste de la résurrection arabe)
Concernant un peuple en lutte contre plusieurs forces contre-révolutionnaires
En janvier 2017, Mélenchon s’écrie : « On nous aurait menti, on nous aurait trompé. Ce ne serait pas une guerre de rebelles modérés contre un gouvernement, ça ne serait pas une guerre de religion tout ce que l’on nous a raconté mais une guerre de puissances ? Oui, c’est ce que je dis depuis le début. ». (Revue de la semaine #13).
Un tel propos étonne. Depuis 7 ans, le régime d’Assad utilise les armes contre les civils qui lui sont opposés ou qui vivent dans des zones qu’il ne contrôle pas (en témoigne encore en 2017 et 2018 le bombardement des écoles, de centre civils de femmes sans parler des hôpitaux de fortune, les tortures et morts d’opposants dans les prisons d’Assad...). L’assertion de Mélenchon évacue cette réalité.
En outre, en affirmant « c’est ce que je dis depuis le début », Mélenchon nie le fait que les Syriens qui ont pris les armes ne l’ont pas fait pour répondre à l’agenda de puissances étrangères mais pour essayer de faire en sorte que leurs familles et entourages cessent d’être massacrés par les agents du régime, tandis que des soldats ou généraux de l’armée désertaient car ils refusaient l’ordre de tirer sur leurs frères. Qu’une très grande partie des groupes armés opposants à Assad soient aujourd’hui dépendants financièrement, politiquement et/ou militairement de puissances régionales (ou, plus rarement des USA) est une réalité. Mais leur action ne peut, aujourd’hui encore, être réduite à celle d’agents se battant simplement pour des intérêts de puissances étrangères.
Enfin, s’il est juste de dire qu’il ne s’agit pas d’une guerre de religion, pourquoi Mélenchon explique-t-il : « il ne peut être question de continuer à persécuter les populations sunnites des villes où cette pratique de l’islam est majoritaire par le gouvernement central qui lui a des affinités chiites. ». N’est-ce pas ici réintroduire la religion ? Et pourquoi laisser croire que « seules » les « populations sunnites » seraient persécutées ou que Assad n’aurait pas l’appui d’une fraction de la bourgeoisie sunnite ?
Mélenchon n’a jamais nié la répression menée par Assad mais de telles affirmations interpellent. Pense-t-il que le soulèvement de 2011 aurait été déclenché par des forces islamistes sunnites (dirigées de l’extérieur) ? Et que parmi les manifestants, « nombre d’acteurs initiaux » se seraient faits duper ? Ou pense-t-il qu’en 2011 un soulèvement populaire aurait surgi et qu’il se serait ensuite fait récupérer, en partie ou complètement, par des forces islamistes ?
En 2017 à Marseille, abordant la « menace d’une guerre généralisée », il explique de façon générale que « Ces guerres ont eu parfois la religion pour prétexte mais elles n’ont jamais cessé d’être autre chose qu’une dispute pour accaparer les matières premières. ». Et de poursuivre : « On a vu comment commençait avec ce prétexte au Moyen-Orient, en Irak et puis en Syrie, un abominable conflit ». Mélenchon sait-il en plus que des guerres pour la liberté, des guerres d’indépendance, des guerres de classes... peuvent exister, y compris au Moyen-Orient ?
Concernant les formes d’islam politique
Pour Mélenchon, « Notre point de vu c’est celui des français et des intérêts de la France. L’intérêt de la France c’est la paix. Pour arriver à la paix, il y a une méthode, la coalition universelle pour en finir avec Daesh. », il n’y a « pas de différence entre Daesh et les autres branches de ce type notamment al-Qaida ». Ainsi dans certains de ses discours, cette coalition a pour objectif d’ « en finir avec les forces armées des milices de l’islamisme politique » et non seulement avec Daesh.
Cette position est liée à l’un de ses principes fondamentaux concernant la religion. Il n’y a pas, pour lui, d’islamisme modéré : « La religion en politique est toujours mauvaise » (interview dans le Parisien, décembre 2011). « Nous ne reconnaissons aucune guerre de religion. Nous ne faisons pas la guerre au catholicisme, nous faisons la guerre au cléricalisme. Nous ne faisons pas la guerre à l’islam, nous nous battons contre l’islam politique ». (Convention de la France insoumise, 25 novembre 2017).
Toutefois en Syrie, Mélenchon souligne les oppressions ayant lieu au nom de la religion de façon assez sélective : il y a celle de « forces armées des milices » de l’islam politique lié au sunnisme (comme Daesh) et celle du régime d’Assad qui persécuterait selon lui, au nom de la religion, les sunnites. Mais une donnée et non des moindre est évacuée : rien n’est dit sur la présence en Syrie du régime iranien des Mollahs qui y contrôle plus de 70 000 soldats et mercenaires combattant au nom du djihad chiite (contre 50 000 combattants de l’armée de Assad, chiffres des Gardiens de la Révolution Islamique à l’été 2016) et y développe son emprise politique, économique et sociale dans la société syrienne. Rien n’est dit, également, sur le Hezbollah. Ces groupes là ne sont-ils pas des « forces armées des milices » de l’islam politique ? N’oppressent-ils pas et ne répriment-ils pas sauvagement le peuple syrien ? N’ont-ils jamais, dans leur histoire, effectué des attentats à l’étranger ?
Concernant la géostratégie
Lors de son meeting à Marseille, en 2017, Mélenchon rappelait, après avoir cité l’ensemble des pays intervenant en Syrie et en Irak : « nous (...) avons refusé chaque jour de nous aligner et de choisir nos criminels préférés ». Mais la solution présentée par Mélenchon pour mettre fin à Daesh (et ses acolytes), est une coalition universelle, sous l’égide de l’ONU, de ceux qu’il nomme lui-même... des criminels. Est-ce là se placer du coté des peuples que demander une telle coalition ? Et en quoi la caverne de ces criminels, l’ONU, qui a montré sa capacité à soutenir, au moins financièrement le régime de Assad, peut-elle encore être considérée comme « neutre » ? Est-ce là sa conception du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ?
En outre, commenter le comportement d’un régime en termes de capacité intellectuelle interpelle quant à la qualité des analyses politiques de Mélenchon. Ainsi concernant les massacres aux armes chimiques dont beaucoup font porter la responsabilité au régime syrien, il explique : en 2017 « s’il l’a réellement fait, c’est d’une stupidité absolument inouïe », en 2018 « beaucoup d’observateurs se posent la question de la rationalité pour le régime de l’utilisation des armes chimique » car Assad aurait repris presque tout « son territoire ». Ces propos visent à rendre non crédible l’utilisation des armes chimiques par Assad. Or son objectif incessant depuis 2011 (et même avant) est de terroriser la population pour aujourd’hui et pour demain. En outre, en 2017 comme en 2018, Mélenchon réduit la situation en Syrie à un simple problème de territoire, évacuant ainsi le peuple syrien et ses aspirations.
La seule parole qui semble l’intéresser, c’est celle « des gens » qui pensent comme lui en terme géostratégique et d’alliance de puissances : « Parce que dans toute la région les gens se disent : à bien les Russes c’est des alliés fidèles et quand ils sont là ils y restent et ils nous défendent. Et c’est comme ça. ». Ces curieux « gens » estimeraient que le peuple syrien a besoin d’un protecteur et qu’il serait immature ? Mélenchon dénonce l’intervention turque à Afrin mais soutient-il celles de l’Iran et de la Russie en Syrie ? Soutient-il la présence des États-Unis et de la France ?
Le peuple syrien est la première victime de la répression sans nom du régime de Assad. Le peuple syrien est la première victime des puissances étrangères qui se sont invitées en Syrie, qu’elles gouvernent dans leur pays au nom de l’islam ou de la « démocratie », qu’elles se disent ou non « amies » de ce peuple. Le peuple syrien est la première victime de ceux qui se posent en défenseurs des peuples et ne raisonnent qu’en termes d’intérêts de puissances et nient le droit d’autres peuples à disposer d’eux-mêmes. Mélenchon en fait partie, mais il est loin d’être le seul. « Notre point de vu c’est celui des Français et des intérêts de la France » : sa défense de l’impérialisme français l’amène à opposer le « eux » et le « nous », qui ne désignent non pas d’un côté le grand capital et de l’autre les masses d’exploités et d’opprimés, mais des peuples.
L’insurgé