“8 000 francs guinéens, c’est bon !” C’est le mot d’ordre qui domine une bonne partie des conversations au sein de la population guinéenne. 8 000 GNF (76 centimes d’euro), c’était le prix du carburant à la pompe avant une augmentation de 25 % au début du mois de juillet, portant le tarif à 10 000 GNF (95 centimes d’euro).
Selon les autorités, ce réajustement du coût de l’essence est lié à la remontée des cours du pétrole. Cette hausse a poussé des syndicats et la société civile à appeler à manifester leur mécontentement dans la rue les 16 et 23 juillet. La manifestation du 23 juillet, interdite par les autorités guinéennes, a été dispersée dans la capitale Conakry, et plus d’une vingtaine de personnes ont été interpellées, avant leur libération dans la soirée, rapporte le site d’information Guinée Matin.
Interrogé sur la crise, le Premier ministre Kassory Fofana justifie l’interdiction des marches populaires. “Entre la loi et l’ordre public, je choisis l’ordre public, sans lequel rien ne peut être fait. La démocratie a ses obligations, elle a ses droits, mais ses devoirs aussi”, retranscrit Le Djely.
Le média en ligne Africa Guinée constate une radicalisation des syndicats, qui appellent désormais à une grève illimitée et “annoncent également l’arrêt du service minimum à l’aéroport, au port et dans les structures sanitaires.” Un mot d’ordre peu suivi d’après Guinée Matin qui décrit une situation tendue à Conakry : “Les forces de l’ordre, composées de policiers et de gendarmes, quadrillent certains endroits sensibles et veillent au grain”.
Impact sur les prix des denrées
Cette hausse du prix du carburant s’est directement répercutée sur le prix des denrées de base. À Kindia, ville située à 135 km de la capitale, un commerçant témoigne auprès de Guinéenews : “Beaucoup de clients se plaignent de nos prix. Pour transporter un carton de Conakry à Kindia, le prix était à 1 500 GNF. Il faut débourser désormais 2 500 à 3 000 GNF.”
Cerise sur le gâteau, l’augmentation à la pompe sert de prétexte aux transporteurs pour imposer leur loi tarifaire. “Malgré les prix officiels fixés par l’Union nationale des transporteurs routiers et le ministère des Transports, les usagers assistent avec impuissance à l’augmentation fantaisiste des frais de transports fixés par les chauffeurs et autres propriétaires de véhicule de transport”, rapporteGuinéenews.
Crise politique depuis des années
Sur son portail Ma Guinée plurielle, le célèbre blogueur Alimou Sow ironise sur la crise du carburant, attestant que sur les réseaux sociaux, “les habituelles photos de mariages clinquants et les selfies dégoulinant de narcissisme compulsif ont fait place à des publications plus engagées.”
L’auteur remarque également une inquiétante coagulation des crises en Guinée et constate que la paralysie du pays est également due à “une véritable épidémie de rupture de ponts sur les principaux axes routiers. Pas moins de quatre ouvrages de franchissement stratégiques se sont affaissés en moins de deux mois”. Il poursuit enfin son analyse sur des problèmes qui “masquent mal la crise politique qui mine le pays depuis plusieurs années et qui fait régulièrement des dégâts”. Celle-ci “couve toujours”.
Sidy Yansané
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