Le 20 août, le plan de relance économique a été lancé [par le gouvernement Maduro]. En préambule à ces mesures, il faut avoir à l’esprit que le Venezuela, sous le gouvernement du président Nicolas Maduro [Maduro est en fonction depuis mars 2013], est frappé par la crise socio-économique la plus profonde depuis des décennies. Hyperinflation à des records historiques ; réduction de la capacité de production de la compagnie pétrolière d’Etat PDVSA [voir ci-dessous le post-scriptum les accords pétroliers annoncés le 28 août – Réd] ; destruction de l’appareil productif national privé et de l’Etat ; abandon systématique des campagnes et de la production agricole ; énormes dépenses liées au paiement de la dette qui ont limité la capacité d’acheter de la nourriture et des médicaments ; réduction sévère des réserves internationales de devises ; pulvérisation des salaires et du pouvoir d’achat des familles de travailleurs sont quelques-uns des indicateurs de cette crise sans précédent.
Le gouvernement a mis en branle tout son appareil de propagande, dans le seul but de présenter le plan comme quelque chose de favorable au pays. Premièrement, il tente de cacher sa responsabilité dans la crise profonde que nous traversons et, deuxièmement, de canaliser l’opinion publique – d’une manière qui lui convient – sur quelques aspects seulement. L’effort que nous, chez Marea Socialista, avons l’intention de faire est de motiver une analyse de l’ensemble des mesures. De la sorte, nous voulons alerter que nous sommes face à une offensive qui vise à faire porter aux masses laborieuses le fardeau d’une crise dont nous ne sommes pas à l’origine et qui met en danger notre souveraineté nationale. C’est pourquoi nous appelons à redoubler d’efforts dans les luttes qui se sont manifestées dans tout le pays au cours des derniers mois.
Pour passer à la présentation de certaines conclusions, nous avons choisi de décrire certaines des mesures que nous considérerons comme essentielles à la compréhension du plan dans son ensemble :
• Exonération des taxes [« impôts »] à l’importation et des droits de douane pour la détermination du type de régime douanier [1].
• Exonération de l’impôt sur le chiffre d’affaires pour PDVSA, ses filiales et les coentreprises [2].
• Prix de l’essence à la pompe [quasi nul] aux prix internationaux et subventions au moyen de Carnet de Patrie [ce qui assure, comme pour l’achat de divers biens, un contrôle sur la population. Réd].
• Dévaluation de 95,8 % du taux DICOM [taux de change du dollar], fixant le taux à 1 dollar = BsS.60 [bolivar souverain] = Bs.6 000 000 Bs, s’alignant ainsi sur le marché parallèle.
• Augmentation de divers services publics à l’heure actuelle et probablement après la reconversion.
• Augmentation de la TVA de 12% à 16% [3].
• Abrogation de la loi sur les délits de change.
• Augmentation du salaire minimum à la moitié d’un petro, c’est-à-dire BsS. 1800 = 180.000.000 Bs. [le petro est une cryptomonnaie adossée aux réserves pétrolière et aux minerais, le bolivar souverain est indexé, depuis août 2018, au petro.
Le plan de relance économique qui ne répond pas au problème de fond
La crise que nous vivons est de nature structurelle. Parmi ses aspects les plus importants : la fuite de plus de 500 millions de dollars [4]] ; la réduction de la production de pétrole de plus d’un million de barils par jour en moins d’un an ; la réduction du PIB pétrolier et non pétrolier ; la création de monnaie sans collatéral aucun ; le paiement de la dette illégitime et non soumise à un audit, parmi d’autres aspects. Aucune des mesures indiquées par le gouvernement ne va dans le sens de la résolution de ces problèmes, en particulier la nécessité de réactiver notre appareil productif.
L’ensemble de mesures marque plutôt un tournant dans au processus d’adaptation aux exigences du capital financier international. Nous sommes convaincus qu’au-delà de la soi-disant équipe de « conseillers », il y a une négociation avec des acteurs internationaux qui sont intervenus pour générer des conditions favorables à leurs intérêts. Ceci consolide les rapports entre le gouvernement du président Maduro, les entreprises nationales et transnationales. Ce qui, de plus, a comme répercussion d’accroître les mauvaises conditions de vie des masses laborieuses dans le pays et met notre souveraineté en grave danger.
Ce sont des mesures qui font partie d’un cours anti-populaire. Cette crise ne touche pas tous les secteurs de la société de la même manière, c’est pourquoi nous avons dit et continuons à dire : que ceux qui l’ont causée paient pour cela ! Mais le gouvernement, malgré sa rhétorique « ouvrière » avec ces mesures, alourdit les conséquences de la crise sur la grande majorité de la population vénézuélienne, les travailleurs, l’augmentation des taxes régressives telles que la TVA et la réduction des taxes sur les entreprises privées nationales et transnationales, l’augmentation progressive des services, entre autres, pour le prouver.
L’ensemble des mesures favorise les affaires des sommets gouvernementaux avec les entreprises nationales, les entreprises étrangères et les secteurs du capital financier international, qui mettent de côté les « différences » idéologiques avec le gouvernement face à leur option d’accroître leurs profits [5]].
Tableau : évolution du salaire minimum depuis 2013
Données réunies de diverses sources et compilées par Juan Garcia, membre du Groupe de travail national de Marea Socialista.
Compte tenu de l’orientation et de l’ampleur de ces décisions, le gouvernement national doit décréter une augmentation du salaire minimum pour tenter de cacher la substance effective de son paquet : l’ouverture du pays au capital international en violation de notre souveraineté.
Un salaire minimum vital est un salaire suffisant pour couvrir le panier de base. Selon le tableau 1 [reproduit ci-dessus], le salaire minimum au début de l’administration de Nicolas Maduro était d’environ 147,64 $. Dans les jours précédant le récent décret d’augmentation salariale de Maduro, cet équivalent serait tombé à seulement 1,03 $, ce qui représente une baisse de plus de 7000% en cinq ans. Selon la collecte de données sur les salaires minimums dans l’Amérique du Sud, le Venezuela se classe au plus bas de l’échelle, loin derrière le plus élevé qui est de l’ordre de 700 dollars
Le récent décret, dans le cadre du plan de relance économique du gouvernement national, place le salaire à un demi-petro, soit 1800 BsS. Sur la base des taux officiels qui impliquent une dévaluation de plus de 90 %, le salaire serait d’environ 30 $. Et malgré cela, le Venezuela reste le pays avec le salaire minimum le plus bas des pays d’Amérique du Sud.
Sans vouloir discréditer l’augmentation susmentionnée, nous rejetons profondément la propagande entreprise par le gouvernement qui en fait une grande conquête. Ce n’est pas le cas, car l’ampleur de la détérioration des salaires sous son gouvernement est sans précédent et, comme nous l’avons dit plus haut, nous restons avec salaire minimum le plus bas du continent.
De plus, nous rappelons le droit constitutionnel (art. 91) qui indique le panier de base comme référence pour la définition du salaire minimum dans le pays. Malgré le manque de données officielles, on sait que le panier de base dépasse actuellement de loin les 1800 BsS. Marea Socialista soutient la demande faite au gouvernement national de publier officiellement la valeur de ce panier. En outre, nous maintenons notre position résolue en continuant à accompagner et organiser les luttes afin d’atteindre le salaire que la majorité des travailleurs de notre pays méritent réellement. Et nous continuerons à insister sur la protection constitutionnelle introduite devant la Cour suprême pour assurer le respect de l’article 91 de la CRBV [6].
Dans le cadre de ce gouvernement, il n’y a pas de solution à la crise en faveur des travailleurs et travailleuses. Nous ne parlons pas seulement des mesures émises du 20 août, nous parlons de toutes les mesures précédentes qui vont dans le même sens : abandonner notre souveraineté par la création de zones économiques spéciales et le développement de projets tels que l’Arc minier de l’Orénoque ; se conformer fidèlement au paiement de la dette extérieure indiquée comme illégitime et odieuse ; ne pas prendre des mesures efficaces face au détournement continu de capitaux (devises), ni garantir des actions pour le rapatriement dudit capital ; s’aligner avec un ensemble de mesures sur les exigences du grand capital international ; tout cela au détriment des exigences de la population laborieuse et de la classe ouvrière.
La tâche fondamentale à ce stade consiste : à accompagner les travailleurs mobilisés pour un salaire qui couvrira le panier de base, une lutte qui doit être transformée en une unité politique afin de résister au paquet paupérisant du gouvernement ; à débattre des propositions économiques qui profiteront aux travailleurs et au peuple au lieu de profiter à la bureaucratie et à ses partenaires capitalistes ; construire une nouvelle alternative politique qui nous permettra de générer une autre option gouvernementale.
Organisez-vous et combattez avec Marea Socialista !
Marea Socialista
Texte élaboré par le « Groupe de travail national de Marea Socialista ».
Post-scriptum. Le président vénézuélien Nicolas Maduro a signé mardi 28 août sept accords avec des sociétés pétrolières internationales dans le but d’augmenter la production de brut d’un million de barils par jour.
« Nous avons signé les sept premiers accords sur 14 déjà négociés (…) nous nous engageons à augmenter (la production) de plus de 600’000 barils », a affirmé Maduro, lors de la cérémonie de signature des accords, retransmise à la radio et la télévision.
L’accord de PDVSA porte sur 14 champs pétrolifères du pays, dans le but de « récupérer la production d’un million de barils avec des investissements publics, privés, nationaux et internationaux ».
Parmi les entreprises qui ont signé les accords figurent la panaméenne Helios Petroleum Services [sise à Panama City et à Miami] et le groupe chinois Shandong Kerui [compagnie privée sise à Dongying au nord de la province Shandong] ».
« Nous accorderons aux entreprises participantes toute la sécurité juridique, toutes les facilités d’investissement qui seront reconnues par PDVSA », a déclaré le ministre Manuel Quevedo qui a aussi souligné que les portes du Venezuela (de ses ressources) étaient ouvertes aux investisseurs internationaux.
L’actuelle production est inférieure à celle de mars 1950 lorsque le pays a produit 1,38 million de barils par jour, selon des chiffres de PDVSA. (Réd. A l’Encontre)