La Corée du Nord prête à fermer un site de tirs de missiles en présence d’inspecteurs internationaux
Après deux jours de discussions, les présidents du Sud et du Nord se sont mis d’accord sur « des mesures concrètes pour la dénucléarisation »
La Corée du Nord fermera son site d’essai de Tongchang-ri, a annoncé mercredi 19 septembre le président sud-coréen, Moon Jae-in.
Le président sud-coréen, Moon Jae-in, n’arrivera pas les mains vides pour sa rencontre, attendue au plus tard le 24 septembre, avec son homologue américain, Donald Trump, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies : M. Moon peut désormais se prévaloir des « mesures concrètes pour la dénucléarisation » décidées par la Corée du Nord et annoncées, mercredi 19 septembre, au terme de deux journées d’intenses discussions, à Pyongyang, avec le dirigeant du Nord, Kim Jong-un.
Au cours d’une conférence de presse qui a suivi la signature de différents accords à Baekhwawon, la luxueuse résidence des hôtes étrangers de la Corée du Nord, Moon Jae-in a signalé que Pyongyang était déterminé à accepter la présence d’inspecteurs internationaux lors de la fermeture de son pas de tir de missiles de Tongchang-ri. Kim Jong-un envisage également d’arrêter de manière permanente le site nucléaire de Yongbyon, qui abrite l’unique réacteur du pays et des installations de recherche sur l’atome, à condition toutefois « que les Etats-Unis adoptent des mesures équivalentes dans l’esprit de la déclaration américano-nord-coréenne du 12 juin », référence au premier sommet de l’histoire entre dirigeants nord-coréen et américain. Une exigence de réciprocité qui reste à préciser, et à négocier avec Washington.
C’est la première fois que la Corée du Nord se montre aussi déterminée dans le dossier de la dénucléarisation, a pu constater Moon Jae-in, qui a souligné la volonté des deux Corées de faire de la péninsule une « terre de paix sans armes nucléaires et sans menace nucléaire ».
Reste à savoir si ces décisions convaincront Donald Trump. La première réaction du président américain était positive : « Kim Jong-un a consenti à des inspections nucléaires, il a accepté d’aboutir à des négociations et de démanteler de manière permanente un site de test et une rampe de lancement (…). Pendant ce temps, il n’y aura pas de fusée ni de tests nucléaires. Les dépouilles de nos héros vont continuer à revenir aux Etats-Unis. Et puis la Corée du Nord et du Sud vont enregistrer une candidature commune pour accueillir les Jeux olympiques de 2032. Très enthousiasmant ! », a-t-il tweeté dans la nuit, sans évoquer toutefois la réciprocité attendue de la part des Etats-Unis, mentionnée par Kim Jong-un.
M. Trump considère le sommet de Singapour, lors duquel il a rencontré M. Kim, en juin, comme un succès. Même si Washington a, depuis, montré son impatience quant au fait de ne pas disposer d’un inventaire détaillé des armes et des installations nucléaires nord-coréennes.
Les annonces de Pyongyang pourraient faciliter la tenue d’un nouveau sommet américano-nord-coréen que M. Moon devrait appuyer auprès de M. Trump. Restent les questions essentielles d’une déclaration officielle de la fin de la guerre de Corée (1950-1953) sur laquelle se sont engagés Séoul et Pyongyang, et qui, pour l’instant, gêne les Etats-Unis, ainsi que celle de la levée, à terme, des sanctions économiques imposées à la Corée du Nord. Et celles, tout aussi fondamentales, du stock d’ogives et de missiles nord-coréens, et des contreparties exactes que Pyongyang attend pour arrêter son site de recherche nucléaire.
« Tournant dans l’histoire »
En attendant, MM. Moon et Kim se sont réjouis des avancées obtenues. « Nous avons planté les graines de la paix, et elles ont porté leurs fruits », s’est félicité Moon Jae-in. Soulignant la force des engagements à même de « faire passer une nouvelle étape aux relations entre le Nord et le Sud », M. Kim a parlé de son côté d’une « avancée vers une ère de paix et de prospérité dans la péninsule » et promis de se rendre à Séoul « dans un avenir proche », une visite historique qualifiée par Moon Jae-in de « tournant dans l’histoire de la Corée ».
Outre les questions nucléaires, les deux voisins ont signé un accord dans le domaine militaire, devant permettre de réduire les risques de confrontation et de guerre dans la péninsule. Cet accord était attendu. Le 13 septembre, les militaires des deux pays s’étaient retrouvés pour faire avancer les discussions. La Maison Bleue, la présidence sud-coréenne, avait laissé entendre avant le début du sommet qu’il ne restait que « quelques points d’achoppement » pour y parvenir.
Des postes avancés dans la zone démilitarisée (DMZ) seront supprimés d’ici à décembre et des zones tampons seront établies le long de la DMZ et des frontières maritimes, pour éviter les risques de confrontation. La joint security area (« zone de sécurité commune ») à Panmunjom sera nettoyée de ses mines d’ici à octobre.
De même, MM. Moon et Kim prônent la relance des visites au site touristique nord-coréen du mont Kumgang, suspendues après que des soldats du Nord avaient abattu une touriste du Sud en 2008, de l’aide humanitaire, d’une intensification des réunions des familles séparées par la guerre de Corée (1950-1953) et veulent faire avancer la connexion des réseaux ferroviaires et routiers des deux pays avant la fin de l’année, un projet qui tient particulièrement à cœur à M. Moon. Les deux dirigeants envisagent même de présenter une candidature pour organiser les Jeux olympiques d’été de 2032.
Ces annonces ont été formulées au terme de deux journées de discussions à Pyongyang, théâtre, du 18 au 20 septembre, du troisième sommet intercoréen de 2018. Elles ont lieu treize ans exactement après la déclaration du 19 septembre 2005 « sur l’avancement des relations intercoréennes ». La Corée du Nord avait alors déjà accepté de renoncer à ses ambitions nucléaires en échange de garanties pour la sécurité et d’un approvisionnement en énergie, ainsi que d’une aide économique.
Philippe Mesmer (Séoul, envoyé spécial)
• LE MONDE | 19.09.2018 à 06h09 • Mis à jour le 19.09.2018 à 11h09 :
https://abonnes.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2018/09/19/la-coree-du-nord-annonce-l-arret-permanent-de-sa-principale-installation-nucleaire_5357019_3216.html
Le Nord-Coréen Kim et le Sud-Coréen Moon commencent à s’apprécier
La proximité inédite entre les dirigeants des deux Corées lors du sommet de Pyongyang apporte au Sud une nouvelle perception du Nord.
A quoi tient la réussite d’une partie d’échecs diplomatique ? A des mots, des gestes, des images. L’avenir dira si le sommet intercoréen, organisé du 18 au 20 septembre, à Pyongyang, aura marqué un réel changement dans l’histoire de la péninsule avec l’annonce faite, mercredi 19, par le président Moon Jae-in et le dirigeant du Nord, Kim Jong-un, de l’arrêt du site de tirs de missiles de Tongchang-ri et la promesse de suspendre les installations nucléaires de Yongbyon sous condition de « réciprocité » américaine, ainsi que de mesures pour réduire les tensions nucléaires et développer les échanges entre le Nord et le Sud.
Ces déclarations ont été prononcées lors d’une conférence de presse commune à Baekhwawon, la luxueuse résidence des hôtes étrangers de Pyongyang en Corée du Nord, théâtre de leur deuxième journée de discussions, mais également du travail de communication entrepris pour accompagner ces négociations intercoréennes. Ainsi, toute la matinée, la caméra du gouvernement sud-coréen a vagabondé dans ses couloirs, choisissant de s’attarder sur Kim Yo-jong, sœur de Kim Jong-un, en pleine discussion avec Chung Eui-yong, responsable de la sécurité nationale à la présidence sud-coréenne, avant de se concentrer sur les deux leaders, apparaissant au détour d’un couloir, suivis de leurs épouses.
Ces images n’ont rien d’un hasard. Elles apparaissent désormais comme des éléments constitutifs des sommets. « Nous avons souhaité changer l’image de Kim Jong-un, que les administrations conservatrices n’hésitaient pas à diaboliser, et promouvoir les initiatives de paix, explique un officiel du Sud. C’est un choix fait dès le discours d’ouverture du Nouvel An de M. Kim », en janvier, quand il a répondu positivement aux appels au dialogue de Moon Jae-in.
Le premier sommet du 27 avril au village de la trêve de Panmunjom a été largement couvert médiatiquement. Pour celui de Pyongyang, Séoul a insisté auprès de la partie nord-coréenne pour organiser un maximum de diffusions en direct – une première. « La poignée de main du premier sommet intercoréen de l’histoire, en 2000, entre Kim Dae-jung et Kim Jong-il avait été diffusée en différé », rappelle l’officiel.
« Intimité quasi familiale »
Pour les initiatives en faveur de la paix, Séoul a organisé une vraie campagne de communication. Un site Internet permet aux Sud-Coréens de réagir et d’exprimer leurs attentes. Au moment des sommets, un écran géant est installé dans le centre de Séoul.
Et cela fonctionne. Le 18 septembre, M. Kim a accueilli M. Moon à Baekhwawon par une tournure à la fois polie et teintée d’humour. « La résidence n’est peut-être pas aussi luxueuse que celle des autres pays développés, mais tout a été humblement fait pour que votre séjour y soit agréable. » Opportunément saisie par la caméra, la déclaration a immédiatement été reprise sur Twitter au Sud, comme l’avait été celle ayant émaillé le sommet d’avril. Ce fut le cas de la fameuse tirade de M. Kim sur les naengmyeon, les nouilles nord-coréennes si populaires au Sud : « Nous avons fait l’effort d’amener des naengmyeon directement de Pyongyang, avait expliqué le dirigeant nord-coréen. J’espère que monsieur le Président profitera de ces naengmyeon venues de loin, même si, cette fois, je ne sais pas si nous sommes si “loin”. »
Cette mise en images avait fait découvrir au Sud la finesse de Kim Jong-un et sa bonne éducation, si importante pour les Coréens. Elle avait aussi permis aux deux leaders d’afficher une réelle proximité. Poignées de main, accolades, tapes amicales. « Ces contacts entre personnes qui ne se connaissent pas peuvent surprendre dans la société coréenne où la distance reste de mise. La proximité affichée relève d’une sphère plutôt privée, d’une intimité quasi familiale », analyse Benjamin Joinau, anthropologue de l’université Hongik de Séoul.
L’impression donnée tient aussi à la capacité des deux parties à jouer des symboles chers aux Coréens. Le sommet en cours se tient à quelques jours du Chuseok, l’importante fête des récoltes, fin septembre. « J’aimerais ramener un beau cadeau au peuple coréen pour le Chuseok », a glissé M. Moon à M. Kim.
L’alchimie semble avoir pris
Cette bonne entente affichée ne serait pas forcément feinte. Elle découlerait également du caractère des deux hommes, réputés francs et directs, et au contact facile. Le style diffère en tous les cas des sommets de 2000 et de 2007 entre des présidents sud-coréens et Kim Jong-il (1941-2011), père de Kim Jong-un. Beaucoup plus distant, il ne manifestait guère d’enthousiasme.
Désormais, entre le président de 65 ans, avenant, tout en élégante sobriété, et le dirigeant de 34 ans, souriant et enthousiaste, l’alchimie semble avoir pris. « M. Moon a même conquis Kim Yo-jong », confie un habitué de la Maison Bleue, la présidence du Sud, au sujet de la jeune sœur du leader nord-coréen.
Si bien que les Sud-Coréens tendent à oublier que Kim Jong-un a brutalement éliminé son oncle et plusieurs dignitaires vieillissants de l’appareil nord-coréen, et a sans doute fait assassiner son demi-frère aîné, Kim Jong-nam. Ils lui font aujourd’hui plus confiance qu’au président américain, Donald Trump.
Cette perception nouvelle sert les objectifs de M. Moon, dont le rôle tient à la fois d’aiguillon de la paix sur la péninsule et de médiateur entre M. Kim et M. Trump. « L’une des qualités de Moon Jae-in est de savoir s’effacer pour laisser briller les autres », explique l’habitué de la Maison Bleue. Ce qui aurait contribué à la réussite du sommet américano-nord-coréen du 12 juin, à Singapour, et pourrait favoriser l’organisation d’une deuxième rencontre Kim-Trump, comme M. Moon compte le plaider la semaine prochaine auprès de son hôte américain, lors d’un déplacement à New York.
Philippe Mesmer (Séoul, envoyé spécial)
• LE MONDE | 19.09.2018 à 11h05 • Mis à jour le 19.09.2018 à 11h38 :
LE MONDE | 19.09.2018 à 06h09 • Mis à jour le 19.09.2018 à 11h09 :
https://abonnes.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2018/09/19/entre-moon-et-kim-une-complicite-tres-affichee_5357252_3216.html
Candidature commune des deux Corées aux Jeux olympiques de 2032
Après leur défilé commun aux JO d’hiver de Pyeongchang en février, Séoul et Pyongyang continuent leur rapprochement diplomatique par le sport.
Les deux Corées ont annoncé mercredi 19 septembre une candidature commune aux Jeux olympiques de 2032, projet ambitieux et nouvelle illustration de la diplomatie du sport après des JO d’hiver qui avaient servi de catalyseur au spectaculaire dégel en cours.
Ce projet, qui exigerait un niveau de coopération et de confiance mutuelles sans précédent entre les deux pays, figure dans une déclaration commune publiée à l’issue du sommet intercoréen de Pyongyang entre les dirigeants nord-coréen Kim Jong-un et sud-coréen Moon Jae-in.
« Le Sud et le Nord sont convenus de participer conjointement et activement aux compétitions internationales, y compris les Jeux olympiques d’été de 2020, et de coopérer en vue d’une candidature commune pour accueillir ensemble les Jeux olympiques d’été de 2032 », souligne le texte, sans plus de précisions. La décision du Nord de participer aux Jeux d’hiver organisés en février à Pyeongchang, en Corée du Sud, avait marqué un remarquable changement de cap dans la péninsule divisée.
L’année précédente, les tensions avaient atteint des sommets alors que la Corée du Nord multipliait les tirs de missiles et menait son sixième essai nucléaire. Kim Jong-un et le président américain, Donald Trump, échangeaient alors insultes personnelles et menaces apocalyptiques.
Niveau de coopération extraordinaire
Les JO de cet hiver en Corée furent l’occasion pour les athlètes des deux Corées de défiler ensemble pendant la cérémonie d’ouverture, derrière un drapeau de l’unification montrant une péninsule exempte de partition. Nord et Sud ont également formé leur première équipe olympique unifiée, des joueuses de hockey sur glace.
Depuis, la diplomatie du sport s’est poursuivie, avec la constitution d’équipes communes pour les championnats du monde de tennis de table ITTF et plusieurs compétitions des Jeux asiatiques en Indonésie.
Le patron du Comité international olympique, Thomas Bach, a fait savoir récemment qu’il était ouvert à des discussions entre les deux pays pour un défilé et des compétitions communes aux jeux 2020 de Tokyo.
Une éventuelle participation nord-coréenne à l’organisation des JO constituerait un événement totalement inédit. Cela exigerait de la part d’une Corée du Nord recluse et minée par la pauvreté une capacité d’ouverture et de puissance financière qui lui font pour l’heure défaut. Organiser des Jeux olympiques exigerait également un niveau de coopération extraordinaire entre deux ennemis de la guerre froide qui sont toujours techniquement en conflit, la guerre de Corée (1950-1953) s’étant achevée sur un armistice et non sur un traité de paix en bonne et due forme.
• LE MONDE | 19.09.2018 à 11h53 • Mis à jour le 19.09.2018 à 12h36 :
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Coopération et dénucléarisation au programme du sommet intercoréen de Pyongyang
Le dictateur du Nord, Kim Jong-un, accueille le président du Sud, Moon Jae-in, la troisième rencontre entre les deux dirigeants cette année.
L’accolade fut longue et chaleureuse. Sous un ciel légèrement obscurci, mais laissant entrevoir un bleu rappelant celui du drapeau de la Corée unifiée, le dirigeant nord-coréen, Kim Jong-un, et son épouse, Ri Sol-ju, ont accueilli, mardi 18 septembre, peu après 10 heures (heure locale) à l’aéroport Sunan de Pyongyang le président du Sud, Moon Jae-in, et son épouse, Kim Jung-sook, arrivés à bord du Boeing 747 présidentiel parti au petit matin de la base aérienne de Seongnam, au sud de Séoul.
Sur le tarmac se massaient des personnalités du régime, comme Kim Jo-yong, sœur de Kim Jong-un, et des centaines de personnes, des femmes en jeogori (tenue traditionnelle) aux couleurs pastel et des hommes en costume sombre. Tous ont salué l’accolade en agitant des drapeaux nord-coréens, de la réunification, ou des bouquets de fleurs, scandant des « mansae », alors que jouait une garde d’honneur.
Les deux dirigeants se retrouvent pour la troisième fois en 2018, après les sommets du 27 avril et du 26 mai organisés au village de la trêve de Panmunjeom, dans la zone démilitarisée (DMZ).
C’est aussi la troisième fois qu’un président du Sud se rend à Pyongyang, après Kim Dae-jung (1926-2009), en 2000, et Roh Moo-hyun (1946-2009) – venu, lui, par la route – en 2007. Ils avaient été accueillis par Kim Jong-il (1941-2011), le père de Kim Jong-un.
Pourparlers avec Washington dans l’impasse
Pour cette visite de trois jours, retransmise en direct au Sud, M. Moon a fait le déplacement avec une délégation de près de 200 personnes : des ministres, des dirigeants des principaux chaebols (« conglomérats »), comme Samsung, LG ou Hyundai, ainsi que des stars de la K-pop qui devraient participer, mardi soir, à un spectacle de gymnastique de masse titré La Mère patrie resplendissante conçu pour le 70e anniversaire de la Corée du Nord, qui a été célébré le 9 septembre.
Deux sommets sont prévus, l’un mardi après-midi et un autre mercredi matin. D’après le secrétaire général de la présidence sud-coréenne, Im Jong-seok, trois sujets devraient dominer les discussions. Le premier porte sur l’amélioration des relations intercoréennes, conformément à la déclaration de Panmunjeom du 27 avril, dont l’un des effets concrets fut déjà l’ouverture d’un bureau de liaison, le 14 septembre à Kaesong, en Corée du Nord. Des projets humanitaires, voire économiques, pourraient aussi être discutés. Il s’agirait, explique Woo Jung-yeop, de l’institut Sejong, de « déterminer ce qui peut être fait et ce qui doit attendre la levée des sanctions ».
Vient ensuite la relance des négociations entre Pyongyang et Washington sur la dénucléarisation. Depuis le sommet du 12 juin, à Singapour, entre M. Kim et le président des Etats-Unis, Donald Trump, ces pourparlers semblent dans l’impasse. Une visite à Pyongyang, prévue à la fin d’août, du secrétaire d’Etat américain, Mike Pompeo, a ainsi été annulée. Les deux parties peinent à rapprocher leurs positions, notamment, estime Cheong Seong-chang, de l’institut Sejong, car « les Américains manquent d’une vraie stratégie et ne savent pas vraiment quoi proposer qui soit acceptable par Pyongyang ».
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Comme il l’a fait lors des deux précédents sommets, M. Moon devrait donc jouer les médiateurs. Il pourrait tenter d’obtenir des avancées, voire des éléments du programme nucléaire du Nord. Son rôle est d’autant plus important que Kim Jong-un aurait sollicité un second sommet avec Donald Trump, dans une lettre envoyée au début de septembre et qualifiée de « très chaleureuse, très positive » par le président états-unien.
Réduction des moyens militaires
Vient enfin la réduction des tensions dans la péninsule, sujet technique car il doit se traduire par une réduction des moyens militaires déployés le long de la DMZ. C’est pourtant là qu’un accord pourrait, selon M. Im, être conclu au cours du sommet même si « des points restent à régler ». Le 13 septembre, les militaires des deux Corées ont évoqué les mesures permettant de stopper les « actes hostiles » et de créer une zone de paix en mer Jaune (mer de l’Ouest) qui serait également une zone de pêche partagée.
La question de la déclaration de la fin de la guerre de Corée (1950-1953), que les deux dirigeants souhaitent formuler avant la fin de l’année, sera aussi discutée. Mais, rappelle Woo Jung-yeop, « il faut pour cela l’accord des Américains ».
Des annonces dans le domaine de la coopération, voire sur l’économie, ne sont pas exclues. Il pourrait notamment y avoir une relance des séjours touristiques au mont Kumgang – site de Corée du Nord inscrit sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco et qui fut accessible aux visiteurs du Sud jusqu’en 2008.
Compte tenu de la courte durée du séjour, les deux dirigeants devraient, selon M. Im, entrer rapidement « dans le vif du sujet ». Les discussions pourraient se tenir au siège du Parti du travail, au pouvoir, où se trouvent les bureaux de M. Kim.
En marge de ces pourparlers, M. Moon devrait visiter Pyongyang, notamment certains quartiers, comme celui dit du Mirae – avenue réservée au monde de la science, inaugurée en 2016 – et celui de Ryomyong, terminé en 2017. Un dîner pourrait avoir lieu mercredi au restaurant de spécialités de la mer Taedong, récemment ouvert, voire à l’Okryugwan, connu pour ses naengmyon, spécialité de nouilles froides très appréciée au Sud.
Philippe Mesmer (Séoul, envoyé spécial)
• LE MONDE | 18.09.2018 à 05h40 • Mis à jour le 18.09.2018 à 09h42 :
https://abonnes.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2018/09/18/cooperation-et-denuclearisation-au-programme-du-sommet-intercoreen-de-pyongyang_5356470_3216.html