Jeremy Corbyn lors de son discours de clôture du congrès annuel du Labour, mercredi 26 septembre, à Liverpool. REUTERS/Hannah McKay
À une majorité écrasante, les délégués du Labour ont adopté une motion sur le Brexit, mardi, lors du congrès annuel du parti à Liverpool. Un texte suffisamment vague pour satisfaire à peu près tout le monde et ne froisser personne : “Si nous ne parvenons pas à provoquer l’organisation d’élections législatives anticipées, alors le Labour s’engage à soutenir toutes les options restantes, y compris l’organisation d’un second référendum”, peut-on y lire, selon The Guardian.
Seulement, un tel flou a laissé la place à des interprétations contradictoires de la position officielle du parti sur la question. Lundi, le ministre fantôme [“shadow minister”] des Finances, John McDonnell, fidèle lieutenant de Jeremy Corbyn, a catégoriquement exclu l’idée de soumettre l’option “rester dans l’Union européenne” aux électeurs en cas de nouvelle consultation.
Craintes pour les bastions du nord
Le lendemain, devant une salle composée en majorité d’anti-Brexit, le shadow ministre du Brexit, Keir Starmer, a assuré, au contraire, que la perspective d’un maintien dans l’UE “ne pouvait définitivement être exclue”. “À ce rythme, le Parti travailliste devra nous tenir informés de ses revirements politiques d’heure en heure. Enfin, si eux-mêmes sont au courant”, ironise John Crace, auteurs des billets satiriques du quotidien de gauche.
D’autant que les propos de Starmer n’avaient pas été validés avant sa montée sur scène, de quoi faire bondir le leader du syndicat Unite, affilié au parti travailliste. “Pour le syndicat, la route menant à Downing Street doit passer par les bastions autrefois industriels du nord du pays, majoritairement favorables au divorce avec Bruxelles”, contextualise l’hebdomadaire New Statesman.
Éoliennes par milliers et emplois dans le renouvelable
Pour la clôture du congrès, mercredi, Jeremy Corbyn a choisi de bâtir son discours sur les fondamentaux qui l’ont mené à la tête du parti : une dénonciation du capitalisme “avide” et un accent placé sur l’investissement. Après avoir réitéré son opposition au “no deal” ainsi qu’au Brexit préconisé par Theresa May – contre lequel les députés travaillistes voteront quoi qu’il arrive – le dirigeant travailliste a appelé à une “révolution verte”.
En cas d’arrivée au pouvoir, le Labour “entend ramener les émissions nettes de CO2 à zéro d’ici à 2050”, détaille The Times. Jeremy Corbyn a également fait part de sa volonté d’ériger plus de 13 000 éoliennes et d’améliorer l’isolation des logements à travers le pays.
Pour ce faire, des emprunts à hauteur de 250 milliards de livres seront nécessaires, tout comme la création de 400 000 emplois pour atteindre l’objectif de 85 % d’énergies renouvelables d’ici à 2030. “Jeremy Corbyn essaie de faire passer des choses radicales pour des propositions tout à fait raisonnables, et ça semble fonctionner”, a réagi sur Twitter, James Forsyth, de l’hebdomadaire conservateur The Spectator. “C’est son meilleur discours depuis son arrivée à la tête du Labour, confirme Sebastian Payne, du Financial Times. Grâce à un langage conciliant qui dépasse les limites de son parti, mais très peu sur les détails de son programme et la réalité économique. C’est à la fois un bon défi et un signal d’alarme pour les conservateurs avant leur congrès de ce week-end [du 30 septembre au 3 octobre].”
Un congrès ignoré du grand public
Lundi, le parti s’était déjà fermement ancré à gauche en proposant une reprise par les employés d’un maximum de 10 % du capital de leur entreprise. Autre cheval de bataille du Labour version Corbyn, la promesse de nationaliser certains secteurs de l’énergie, ainsi que le rail, a été renouvelée en vue d’une éventuelle accession des travaillistes au pouvoir.
Au sortir de quatre jours de congrès dominés par le Brexit, “le parti travailliste a réussi à conclure son congrès sans grosse engueulade sur le Brexit et avec un vague accord, ce qui doit être considéré comme un succès”, tranche le Daily Telegraph. “Le fait est que la plupart des gens ordinaires ne s’intéressent pas aux congrès des partis et ceci devrait servir Corbyn. Les électeurs perçoivent peut-être certains points évoqués dans les discours principaux mais il est très peu probable qu’ils suivent ce qu’un membre du cabinet fantôme a déclaré à propos d’un deuxième référendum.”
Sasha Mitchell
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