“Le débat est relancé”, annonçait Le Soir mercredi 26 septembre. Dans son édition du jour, le quotidien belge publiait la lettre ouverte d’un collectif d’universitaires, d’associations, ainsi que de personnalités congolaises demandant la restitution des œuvres pillés pendant la période coloniale.
“Plus de 90 % des œuvres d’art classique africain sont en dehors de l’Afrique”, dénoncent les signataires.
Pillées pendant la colonisation, elles se trouvent désormais au British Museum, au musée du Quai Branly, ou au musée de Tervuren [en périphérie de Bruxelles]. Les Africains du continent qui désirent montrer leur patrimoine à leurs enfants ne le peuvent pas. Tout ou presque a été dérobé. On ne saurait fonder le dialogue interculturel sur des pillages précédés par des meurtres coloniaux : les biens volés doivent être restitués.”
Cette pétition s’inscrit dans un contexte qui a vu la restitution de biens coloniaux par le Canada ou l’Allemagne et un engagement du président Macron à ce sujet. Mais surtout, elle survient à quelques semaines de la réouverture du musée royal de l’Afrique centrale de Tervuren. Fondé en 1910, en pleine époque coloniale, le musée est fermé pour travaux depuis plusieurs années, afin de repenser la vision qu’il offre de l’Afrique.
Outre “la restitution des trésors volés à l’Afrique ainsi que des restes humains issus des massacres coloniaux” et des réparations financières, les signataires de la pétition demandent “un moratoire sur la réouverture du musée et l’exposition des objets dont on sait qu’ils ont été acquis par le vol, le pillage, la conversion forcée, etc.”.
Un musée d’art ouvrira bientôt à Kinshasa
Dans ce débat, rappelle Le Soir, on entend régulièrement évoquer “l’argument selon lequel ces trésors sont conservés dans de meilleures conditions dans les musées occidentaux que dans leur pays d’origine – on sait par exemple que nombre de pièces rendues au Zaïre [actuelle République démocratique du Congo] à l’époque de Mobutu se sont volatilisées”.
Mais pour les auteurs de la pétition, cet argument relève d’un “paternalisme aux relents coloniaux”. Ils interrogent : “Est-ce vraiment aux pays qui ont brûlé et détruit des objets culturels pendant les guerres coloniales de donner des leçons sur la sécurité et le respect dû aux œuvres d’art en Afrique ?”
Quoi qu’il en soit, observe De Standaard :“Dans le cas de Kinshasa, cet argument ne tiendra bientôt plus, car la Corée du Sud investit en ce moment dans la construction d’un musée d’art.”
“Quand ce musée sera prêt, nous aiderons volontiers, réagit Guido Gryseels, directeur du musée de Tervuren, cité par le journal flamand. Nous pouvons faire des prêts, organiser des expositions itinérantes et mettre à disposition des archives numériques.”
Pour le directeur, la demande de moratoire est “excessive”. Il remet également en question la légitimité de la pétition : “La question est de savoir qui est notre interlocuteur. La diaspora ? Je pense que c’est plutôt le pays concerné qui devrait déterminer ce qui doit être restitué et ce qui ne doit pas l’être.”
Courrier International
Abonnez-vous à la Lettre de nouveautés du site ESSF et recevez chaque lundi par courriel la liste des articles parus, en français ou en anglais, dans la semaine écoulée.