Ceux qui comptaient sur la période des fêtes pour voir s’essouffler la mobilisation en sont pour leur frais. Le journal économique Les Échos titrait d’ailleurs, le 5 janvier, « La guérilla des centres de tri ». Plusieurs raisons expliquent la longévité de ce mouvement. D’une part, les revendications concernent l’ensemble du personnel travaillant de nuit, quel que soit le centre : le pouvoir d’achat et la lutte contre les horaires atypiques. Il est vrai que, si les salaires des patrons de La Poste ont progressé de 79 % lors des cinq dernières années, l’indemnité pour le travail de nuit n’a pas évolué depuis 1999, et elle reste bloquée à 1,22 euro l’heure. D’autre part, l’exemplarité de la construction de cette mobilisation n’est pas étrangère à sa réussite. En effet, si au niveau national, l’attitude de la fédération SUD-PTT a été déterminante dans l’extension de la grève, les revendications et les méthodes de
lutte - grève d’une heure chaque nuit pour les salariés de droit privé et grève tous les vendredis pour l’ensemble du personnel de nuit - ont été discutées directement par les salariés dans le cadre de réunions intercentres.
Il n’en reste pas moins que le développement de cette action à tous les centres bute sur la division syndicale, en particulier au niveau national, SUD étant la seule fédération à la soutenir. Toutefois, la participation, au niveau local, de nombreuses sections FO et CGT permet, en partie, de contourner cette difficulté. L’attitude de ces sections locales, si elles sont rejointes par d’autres, pourrait faire évoluer l’attitude de leurs directions nationales. Le ralliement des fédérations FO et CGT reste donc un enjeu majeur des jours prochains.
D’ores et déjà, la grève poursuit ses effets. La direction de La Poste peut toujours affirmer à la presse que la grève n’a pas d’impact sur la distribution du courrier, elle est tout de même contrainte, avec la complicité de la justice, d’ouvrir les centres les dimanches pour écouler le trafic. De plus, elle vient d’annoncer que la rémunération des heures de nuit serait traitée lors des négociations salariales, une exigence qu’elle refusait depuis sept ans ! Cette annonce est évidemment une avancée à mettre au crédit de la grève, sans pour autant être suffisante : il faut des propositions sonnantes et trébuchantes et l’ouverture immédiate des négociations.
Avec ce premier recul de la direction de La Poste, les perspectives d’extension de la mobilisation sont réelles. Déjà, les plateformes colis devaient rejoindre le mouvement à partir du vendredi 12 janvier et la fédération SUD-PTT appelle à un rassemblement des centres en grève, à Paris, le 19 janvier. La guérilla des centres de tri n’est donc pas près de s’éteindre.