Une opération policière de grand envergure engageant différentes forces de l’ordre (police, « auxiliaires de sécurité », « forces auxiliaires » et gendarmerie…) dans des rafles et déplacements d’exilés d’Afrique noire a été réalisée au Maroc à partir du 23 décembre 2006. Ces rafles et déplacements forcés ont concernés des Africains noirs, majoritairement chrétiens, aux situations juridiques très variables au regard du droit du séjour : des sans-papiers, des personnes en situation régulière (passeport + visa non périmés), des demandeurs d’asile enregistrés auprès du HCR et des réfugiés reconnus par le HCR. Les papiers de ces personnes ont fréquemment été confisqués ou détruits par les forces de l’ordre. Ces opérations se sont accompagnées de maltraitances policières, notamment matraquages, blessures et humiliations. Ont été raflés des femmes enceintes et des femmes avec enfants en bas âge. Le nombre de victimes pouvait être estimé entre 439 à 479 personnes en provenance de Rabat (248), de Nador (environ 60) et de Laâyoune (de 131 à 171).
Transportés en autocars à travers tout le Maroc, les victimes ont été abandonnées, généralement dans les douze heures suivant leur arrestation, par groupes de quelques dizaines en différents points, séparés de plusieurs kilomètres, le long de la frontière maroco-algérienne non loin de la ville d’Oujda. Sous la menace de coups de fusils tirés en l’air, les exilés ont été contraint par les forces marocaines d’avancer vers l’Algérie puis ont été refoulés par les forces algériennes tirant également des coups de fusils en l’air. Après dix heures de calvaire entre les deux armées la plupart des exilés ont pu rejoindre leur pays de résidence habituelle, le Maroc, en trouvant des hébergements provisoires dans les banlieues d’Oujda ou sur le camp informel situé à l’orée de la forêt et du campus universitaire de cette ville, capital du Maroc oriental. Les associations Médecins sans Frontières (MSF Espagne), Association Béni Znassen pour la Culture, le Développement et la Solidarité (ABCDS, Maroc), Forum Réfugiés (France) et le Comité d’Entraide International (Maroc) ont apporté l’essentiel de l’aide humanitaire (couvertures, vêtements, nourriture, médicaments et ont été soutenu sur le terrain par l’Association Marocaine des Droits de l’Homme (AMDH) et ATTAC-Maroc. De 200 à 300 personnes sont contraintes de dormir par terre à des températures nocturnes proches de zéro degré. Plusieurs personnes ont du être hospitalisées. Le Croissant Rouge Marocain de la Wilaya d’Oujda qui indiquait le 18 décembre 2006 lors d’un colloque à l’Université Mohammed I détenir un stock d’un millier de couvertures destinées à cette population ne les avait toujours pas livrées le 08.01.2007. La Préfecture de Police de la ville d’Oujda s’opposaient encore, à cette date, au retour de la plupart des victimes dans leurs domiciles d’origine à Rabat, Nador et Laâyoune.
1. LA JOURNEE DU 23 DECEMBRE 2006 A RABAT : DEUX TEMOIGNAGES
L’une des personnes, réfugiée statutaire reconnue par le HCR, victime de l’opération, interrogée à Oujda le 3 janvier, décrit ainsi sa journée du 23 décembre :
A 7 heures du matin, dix policiers ont enfoncé la porte de l’appartement où je dormais avec cinq autres personnes. Ils ont fait irruption en criant « vos papiers » et en prenant aussitôt tous nos téléphones portables. Je leur ai donné mon attestation du HCR. Ils crient que c’est une rafle générale et poussent tout le monde vers la sortie de l’appartement en distribuant des coups de matraques. L’un de mes compagnons, en situation régulière, indique qu’il dispose d’un passeport et d’un visa en règle : les policiers lui répondent que cela ne change rien, que tout le monde doit être emmené. Lorsque je demande que me soit rendu mon téléphone portable et mon attestation du HCR, je reçois en retour des coups de matraques par un policier qui déchire alors mon attestation.
Nous sommes emmenés dans un commissariat devant lequel sont garés six autocars déjà en partie pleins d’Africains. Plusieurs d’entre eux, encore dehors, demandent au Commissaire que leur soient rendus leurs biens personnels et notamment leurs téléphones portables. Le Commissaire leur répond « foutez le camps ».
Les autocars démarrent à 9 h du matin. Vingt minutes après le départ, une bagarre a lieu dans l’autocar où je me trouve ; les policiers sont attaqués par des Africains dont une trentaine parvient à s’échapper par les fenêtres. Le fait ne s’est pas reproduit dans les autres véhicules qui contenaient entre 40 et 50 personnes. Le voyage de Rabat jusqu’à Oujda en passant par Fès, s’est déroulé d’une seule traite avec de simples escales dans les stations d’essence. Dans mon autocar nous avons eu à boire et à manger et pouvions aller aux toilettes, sous surveillance, dans les stations.
Nous arrivons vers 18 h dans la proximité d’Oujda que nous contournons par le nord pour aller directement vers la frontière. Lorsque le véhicule où je me trouve s’arrête il n’est suivi que par un seul autre autocar. Au total une soixantaine de personnes en descendent. Les policiers nous disent de partir en nous montrant la direction de la frontière avec l’Algérie qui se trouve à 10 minutes à pied environ. Lorsque nous y parvenons l’armée algérienne tire des coups de fusil en l’air pour nous effrayer et nous force ainsi à rebrousser chemin. Peu après des « forces auxiliaires » marocaines font de même, tirent en l’air pour nous forcer à repartir. Pendant près de dix heures nous errons ainsi entre les deux armées, terrorisés par les deux.
Au cours de la nuit nous sommes entrés par mégarde sur le territoire algérien. Le groupe, épuisé, a marqué un temps de repos et s’est trouvé assailli par la police algérienne qui dit de repartir et arrête trois filles qui sont fouillées au corps et violées. Le groupe s’est dispersé dans la panique, je me retrouve avec une douzaine d’autres personnes courant pour trouver une autre route afin de rentrer au Maroc. Nous retrouvons enfin un chemin menant à Oujda où nous nous rendons aussitôt sur le camp près de l’université.
Il est alors 4 h du matin. Il fait très froid. Nous n’avons ni vêtements adéquats, ni couvertures. Une des personnes présente sur place me prête son téléphone portable et me met en relation avec des amis qui acceptent de m’héberger pour la nuit.
Une autre personne, raflée dans un autre quartier de Rabat et ayant voyagé dans un autre autocar, interrogée à Oujda le 5 janvier 2007 fait un récit similaire et complémentaire :
A 4h30 du matin les policiers ont frappé à la porte de l’appartement où nous étions trois couples à dormir dans nos trois chambres respectives. Ils ont frappé de plus en plus fort jusqu’à ce que j’ouvre et ont fait irruption brutalement en disant à tout le monde de se lever et de s’habiller pour « une simple vérification ». L’un des couples leurs présentent leurs papiers de réfugiés du HCR : les policiers refusent de les prendre. Tout le monde est embarqué dans le minibus garé devant l’immeuble. Ma femme qui est malade fait une crise de larmes. Elle est emmenée de force dans le minibus. Je demande à retourner pour prendre quelque chose pour la couvrir parce qu’elle n’est pas assez habillée ; cela m’est refusé. Nous sommes emmenés au commissariat. Arrivé là je repère, le Commissaire et le supplie de faire attention à ma femme qui est malade : le Commissaire me répond « c’est pas notre faute, c’est l’Espagne ». J’allonge ma femme par terre, à même le sol sans pouvoir la couvrir, pour qu’elle se repose. Je reviens vers le Commissaire pour lui dire qu’elle risque de mourir. Finalement on m’emmène de force dans un des six autocars garés devant le commissariat mais en laissant ma femme par terre. J’ai appris plus tard qu’elle s’est évanouie et qu’elle a été emmenée à l’hôpital où les docteurs l’ont gardé toute la journée et l’on laissé partir le soir pour qu’elle se repose à la maison.
Les six cars ont démarré de manière échelonnée vers 8 / 9 h et se sont regroupés un plus tard à la sortie de Rabat. J’étais dans un autocar contenant une cinquantaine de personnes. Le trajet s’est mal passé pour nous. On ne nous a donné en tout et pour tout qu’une petite bouteille d’eau de 33 cl pour tout le voyage et un morceau de pain d’environ 10 cm alors que le voyage a duré environ 10 heures. En plus les policiers de notre car ne voulaient pas nous laisser sortir aller aux toilettes. Lors du premier arrêt en station essence, deux heures après le départ, j’ai demandé à sortir pour aller aux toilettes. L’un des policiers refuse. L’autre policier lui dit que c’est possible. On voit des gens descendre des autres cars. Le premier policier me dit OK mais veut me mettre les menottes. Je lui dit que je ne veux pas parce que je ne suis ni un criminel ni un voleur et que je n’ai rien fait de mal. J’insiste néanmoins pour descendre. Alors il me met les menottes de force et me fait uriner à côté du car devant tout le monde. Deux heures plus tard, il y a un nouvel arrêt à la station service. Cette fois ci, plusieurs dizaine de personnes réclament d’aller aux toilettes alors les policiers refusent et nous disent de pisser sur place : nous sommes alors obligés d’uriner dans des bouteilles d’eau.
Quand nous sommes arrivés à la proximité d’Oujda, vers 18 h 30 , les policiers en uniforme bleus sont descendus de l’autocar ; seuls sont restés les policiers en civil. Le car est repartit en étant escorté par des fourgonnettes vertes de l’armée. On a roulé encore une demi-heure environ vers un endroit inhabituel que nous ne connaissions pas et qui semble se situer à une trentaine de kilomètres d’Oujda. Il n’y avait plus alors qu’un seul autre autocar en plus de celui où je me trouvais. Ils se sont arrêtés dans la cour intérieure d’une ferme, un enclos de bergerie probablement selon l’odeur. On nous a fait descendre et mettre en rang. Ceux qui ont voulu discuter ou protester se sont pris des coups de matraques et des coups de crosses de fusils. Ils nous ont fait agenouiller en file indienne en mettant le bras à l’horizontal pour prendre la distance à l’égard de celui ou celle qui est devant. Ils nous divisent alors par groupe d’une douzaine environ et nous font lever, groupe après groupe, chacun encadré par un militaire devant et un militaire derrière. On marche ainsi sur environ 500 mètres à 1 kilomètre et durant ce trajet ils nous insultent et nous disent « si vous revenez au Maroc on vous tirera dessus ». Au bout du chemin ils nous disent « vous voyez les lumière là-bas : c’est l’Algérie, ils ont beaucoup d’argent là-bas ; allez-y et ne revenez pas ». Puis ils nous disent de courir et nous crient encore de courir plus vite et durant la course nous entendons qu’ils chargent leurs fusils alors nous courons encore plus vite et en courant nous nous dispersons dans toutes les directions.
Je me suis retrouvé seul J’ignorais s’ils disaient la vérité et si c’est vraiment l’Algérie là-bas. Et de toute façon je n’avais aucune raison d’y aller, ma vie étant à Rabat. Les policiers avaient disparus mais ce n’était pas possible dans la nuit et avec les accidents du terrain et les fourrés de savoir s’ils étaient partis où s’ils étaient cachés. J’avais très peur à l’approche de chaque fourré et lorsqu’il y avait des bruits faute de savoir si c’était des amis ou des policiers. Je suis finalement parvenu à rejoindre un groupe de six personnes, dont quatre hommes et deux femmes. Aucun ne voulait aller en Algérie. Nous avons rejoins un autre groupe formant ensemble une quinzaine de personnes. Nous avons marché encore durant un kilomètre environ puis nous avons entendu les policiers marocains sans les voir. Ils nous disaient « venez ici, venez ici » et faisaient entendre le bruit du chargement de leur fusil. On a couru dans la direction opposée et on s’est de nouveau regroupé plus loin. Là on a discuté de la direction à prendre mais nous sommes disputés certains disant que la bonne direction était par là, d’autre par ici. Finalement nous nous séparons en deux groupes marchant dans des directions opposées.. Celui où j’étais était composé de sept hommes et une femme. Nous continuons à marché longtemps dans la nuit. Durant le trajet nous approchons d’une ferme. Le paysan, apparemment gentil et qui croyait peut être que nous étions des contrebandiers égarés cherchant la frontière algérienne, nous fait signe avec sa lampe pour nous indiquer que l’Algérie se trouve dans l’autre direction. On passe au loin sans approcher de la ferme et continuons notre route. Il fait terriblement froid. Aucun de nous n’a les vêtements qu’il faudrait pour cette température. Nous comprenons finalement que nous sommes complètement perdu mais nous apercevons au loin des lumières, différentes d’un côté et de l’autre. L’un de nous téléphone à Rabat à un ami qui a déjà été refoulé l’année dernière. Il lui décrit ce que nous voyons : d’un côté des lumières rapprochées mais petites et de l’autre côté une vaste étendue de lumière. Il nous dit d’aller vers cette dernière. Nous arrivons ainsi à un enclos d’aéroport et nous comprenons que c’est celui d’Oujda.
On entre dans l’enceinte clôturée mais, craignant d’être repérés, décidons d’en ressortir aussitôt. A partir de l’aéroport nous connaissons la route pour revenir à Oujda. Sur la route nous croisons dans la nuit une bande de « nigérians » (ils parlent anglais) et comme on sait qu’ils sont dangereux et qu’il faut aussitôt ramasser des pierres pour les dissuader d’avancer vers nous, ce que nous faisons. Ils s’éloignent alors sans nous agresser. Nous continuons et arrivons ainsi vers une petite rivière. Nous descendons dans le ravin en nous disons que nous pourrons attendre ici que le jour se lèvre pour voir comment rejoindre le campus notamment en prenant des taxis par petits groupes dans la périphérie d’Oujda. Mais, avec la rivière et l’humidité, il fait encore plus froid et nous comprenons vite que nous ne pouvons pas rester sans bouger. Nous continuons alors en longeant la rivière sans oser la traverser.
Nous arrivons ainsi jusqu’à une base militaire que nous contournons puis nous approchons des premières maisons. Il fait tellement froid que nous ne pouvons plus tenir et que nous ne prenons plus de précautions : plusieurs disent qu’il vaut mieux se faire arrêter pour, au moins, se retrouver au chaud. Sur la route nous croisons un groupe d’autres migrants cachés derrière un mur. Nous décidons de nous séparer par groupe de trois, pour pouvoir prendre des taxis jusqu’au camps de l’université. Finalement un taxi prend un trio et l’emmène au camp de l’université pour le prix de 60 Dirhams… alors que la course ne vaut guère plus de 12 Dirhams. Le premier groupe dit au taxi de revenir à l’endroit de départ où il y a d’autres frères qui attendent pour venir. Il va faire ainsi la navette en prenant ensuite 100 Dirhams par trajet. Nous nous retrouvons ainsi tous sur le camp près de l’université.
Les informations contenues dans ce récit coïncident avec celles rapportées par les autres exilés et par les militants associatifs d’Oujda informés dès le matin du 23 décembre de l’opération en cours. Ces témoins locaux font état d’une forte concentration de voitures de police et des tristement célèbres « forces auxiliaires ». Les six autocars se sont séparés peu après Oujda par groupe de deux pour déposer leurs passagers le long de la frontière en trois points se situant respectivement à environ 12 km, 24 km et 40 km d’Oujda. Les militants associatifs qui tentent de rejoindre les victimes pour leurs porter secours sont arrêtés par des barrages de police qui contraignent tous les véhicules à faire demi-tour. Sur le chemin du retour vers Oujda, ils croisent encore des « forces auxiliaires ».
2. NOMBRE ET PROFILS DES VICTIMES
Le nombre exact de victimes de cette opération de rafles est difficile à contrôler. Pour les personnes raflées à Rabat le 23 décembre : le chiffre officiel, repris par la presse, est de 248 personnes. Il semble à peu près concordant avec celui que l’on peu estimer à partir des déclarations des victimes présentent dans les six autocars : chacun pouvant contenir une cinquantaine de personnes ; tous n’étaient pas pleins, des places restant vides et l’un d’eux ayant perdu 30 de ses passages échappés par la fenêtre, 20 minutes après le départ. Pour les personnes raflées à Laâyoune le 31 décembre : les associations locales ont recensé les arrestations de 131 personnes. Mais elles annoncent ultérieurement une nouvelle vague d’arrestations de 40 personnes qui n’avaient pas encore été repérées par les militants à Oujda le 5 janvier. Pour les personnes raflées près de Nador : les témoins oculaires de leur arrivée au commissariat d’Oujda avant expulsion vers la frontière font état d’une soixantaine de personnes. Au total de 439 à 479 personnes au moins auraient été raflées.
Parmi ces personnes on été dénombrées à Oujda 8 parents avec enfants de 11 mois à 2 ans : 4 femmes en provenance de Rabat avec chacune un enfant dont un handicapé ; 3 femmes de Laâyoune avec chacune 3 enfants et 1 homme avec une fille de 4 ans. On été raflées également trois femmes enceintes, une à Laâyoune et les deux autres à Rabat dont l’une, à six mois de grossesse, hospitalisée en urgence à Oujda a perdu son enfant après tentative des médecins de le sauver. D’autre part, 6 cas de viols ont été recensés, dont 5 ont été constatés par un médecin local. Trois femmes violées ont déclaré l’avoir été par des policiers marocains, une immédiatement à Rabat et les deux autres à la frontière. Une femme violée a déclaré avoir été violée par les militaires algériens. Une autre a déclaré avoir été violée par une des bandes de migrants (anglophones) écumant la frontière. Le sixième cas de viol a été rapporté par des migrants présents sur le camp d’Oujda mais sans que la victime n’ait été retrouvée. Ce recensement des cas les plus graves peut ne pas être exhaustif une large partie des victimes s’étant dispersées dans les banlieues de la ville.
Les personnes raflées à Laâyoune, ville située géographiquement très au sud du pays, ont pour la plupart été raflées dans les tenues légères (short, tee-shirt, espadrilles…) correspondant au climat de cette partie du Maroc. Ils se sont retrouvés la nuit du 31 décembre 2006 dans le climat continental de la région du Maroc oriental où les températures chutent très bas durant la nuit. Sur les 131 personnes victimes de rafles recensées par les associations locales de Laâyoune, seules 90 ont été retrouvées sur le camp près de l’université d’Oujda. Les autres n’avaient pu donner de leurs nouvelles au 5 janvier et sont peut être encore en Algérie, pensent certains de leurs proches déjà arrivés sur le camps d’Oujda. Quelques migrants ont peut être repris le chemin à pied vers Rabat, en longeant les voies ferrées. Des habitants d’une ville proche d’Oujda ont déclaré avoir vu passer des « africains. »
Les personnes venant de Nador ne semblent pas avoir fait l’objet de la même opération policière que celles de Rabat et de Laâyoune : vivant non pas en ville mais dans les forêts à proximité de l’enclave espagnole de Melilla, elles ont tenté de passer par-dessus les triples barrières barbelées de neuf mètres qui entourent l’enclave. Leur tentative a été réalisée le 24 décembre 2006, apparemment sans lien avec les opérations de rafles, mais en comptant sur le relâchement de la garde espagnole durant le réveillon de Noël. Plusieurs se sont blessées en tombant de la barrière et ont été hospitalisées. D’autres portent des traces de blessures faites par les barbelées. Enfin les exilés affirment qu’un jeune camerounais aurait été abattu par une balle réelle tirée par un policier marocain dans le dos du jeune homme alors qu’il atteignait le haut de la barrière au moment où les policiers espagnols arrivaient en courant et en faisant signes à leurs collègues marocains de cesser les tirs de sommation. Sa chute mortelle aurait figé l’ensemble des autres exilés et facilité ainsi l’arrestation de tous. Le chef du groupe des policiers marocains serait alors arrivé en courant et aurait giflé le policier fautif. Cette scène est répétée par plusieurs exilés ne se connaissant pas et interrogés en des endroits très éloignés les uns des autres mais dans un milieu social où les rumeurs vont vite notamment par téléphone. La scène n’a été rapportée ni par la presse (qui n’a pas couvert ces évènements) ni par les autorités marocaines. Après leur arrestation collective, les exilés ont subi des maltraitances policières et humiliations : coups de matraques, confiscation de chaussures ou découpage de la partie avant des chaussures. Plusieurs témoins proches du camp d’Oujda confirment l’arrivée de personnes avec des chaussures coupées de cette manière.
Les pays dont sont originaires les personnes présentes sur le camps d’Oujda entre le 24 décembre 2006 et le 5 janvier 2007 (certaines présentes avant les rafles) sont : Bénin, Cameroun, Centrafrique, Congo Brazzaville, Congo RDC, Côté d’Ivoire, Gabon, Gambie, Guinée, Guinée équatoriale, Mali, Mauritanie, Nigeria, Sénégal, Soudan, Tchad…
3. CHRONIQUE DES MOBILISATIONS EN FAVEUR DES VICTIMES
Samedi 23 décembre – Le Conseil des Migrants Subsahariens annonce à 10h35 sur liste [Manifeste Euro-africain] que des rafles sont en cours. Avertis par téléphone dès 11 h du matin des rafles opérées quelques heures plus tôt, les militants associatifs à Oujda, défenseurs des droits de l’homme et militants de solidarité, se réunissent dans l’après-midi et décident de tenter de repérer les victimes une fois abandonnées près de la frontière. Les contacts téléphoniques avec certains exilés dans les autocars permettent de suivre leurs routes et de situer approximativement où ils seront abandonnés. Cependant à l’approche des zones concernées, des barrages militaires, par des hommes en treillis et en armes, les obligent à repartir vers Oujda. Enfin de journée plusieurs associations, notamment ATTAC-Maroc à 17 h à Rabat et l’ASDHOM à Paris à 22 h diffusent les premiers communiqués de presse pour alerter les réseaux associatifs, les journalistes et faire pression sur le gouvernement marocain.
Dimanche 24 décembre – Au matin, les militants d’ABCDS à Oujda se rendent sur le camp près de l’université pour connaître les besoins des exilés et leur apporter les premiers secours en leur distribuant 130 couvertures fournies par Médecins sans Frontières. Les médecins de MSF donnent sur place les premiers soins.. L’association Réfugiés Sans Frontière signale sur le forum [Manifeste-euroafricain] que des personnes contactés par téléphone sont entre les mains de la police algérienne et que les autres ont été déposées dans des « endroits inhabituels » de refoulement. Des associations et le HCR, tant à Rabat et qu’à Oujda, entreprennent de recenser les demandeurs d’asile enregistrés auprès du HCR et les réfugiés statutaires reconnus par lui. Une soixantaine de personnes au moins relevant de ces deux catégories, sont identifiées ainsi, dans un contexte où une grande proportion des personnes raflées sont disséminées dans des hébergements provisoires à travers les banlieues de la ville et où d’autres, perdues dans les forêts environnantes, ne sont pas encore parvenues à rejoindre la ville. Durant toute la semaine des personnes vont arriver seules ou en petits groupes sur le camp près de l’université. Sur le plan national, les associations, notamment Pateras de Vida (Maroc, Larache) à 12 h, continuent de diffuser des communiqués pour tenter d’alerter et de faire pression, sans grands résultats A Rabat, le Parti Socialiste Unifié (PSU) publie le premier (et le seul) communiqué de presse émanant d’un parti politique marocain pour dénoncer les rafles. A Paris, Hélène Flautre, Député du parti des Verts au Parlement Européen, Présidente de la sous-commission des droits de l’Homme du Parlement européen, publie un communiqué intitulé « Les violations massives des droits de l’Homme qui viennent de se dérouler au Maroc sont scandaleuses, elles doivent immédiatement cesser. ». Dans la nuit du dimanche au lundi, 35 personnes encore perdues dans la forêt à quelques kilomètres d’Oujda parviennent à contacter l’un de ses militants qui les dirige alors par téléphone pour leur permettre de retrouver leur route jusqu’au camps de l’université.
Lundi 25 décembre – A 5h30 Radio France Internationale relaie une dépêche de la MAP, en provenance des autorités marocaines, qui font état « d’assauts » de migrants sur les barrières entourant les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla. A 12 h, ces tentatives de passage des barrières sont confirmées par des journalistes espagnoles et le soir même l’information est relayée par la chaîne nationale marocaine de télévision « 2 M ». Pendant la journée à Oujda, trois étudiants protestants proches du CEI distribuent une soupe (environ 150 rations) ; les militants d’ABCDS et Forum Réfugiés (arrivée de Rabat la veille au soir) des paquets repas (environ 130 rations). Sur le forum [Manifeste-euroafricain] le Président du Conseil des Migrants Subsahariens (Rabat) que « Aux dernières nouvelles on apprend qu’effectivement le délégué du HCR Rabat se trouve à Oujda. Qu’il aurait recensé la liste des demandeurs d’asile et des réfugiés pour demander un probable laissez passer des autorités Marocaines pour le retour des demandeurs d’asile et des réfugiés à Rabat. Les amis ne savent pas quand est ce qu’ils pourront probablement avoir cette autorisation de revenir à Rabat. Pour l’heure,le HCR Rabat s’active pour un éventuel retour des amis à Rabat. » Un nouvel arrivage de personnes raflées près de Nador est détecté par d’autres militants qui remarquent des autocars près du commissariat à Oujda vers 19h30. Deux autocars, à moitié pleins, soit une cinquantaine de victimes sont ultérieurement emmenées par ces autocars vers la frontière et abandonnées dans les conditions habituelles puis reviennent sur le camps près de l’université. Leur état physique est extrêmement dégradé, nombreux sont ceux qui n’ont plus de chaussures. Beaucoup ont été matraqués sur les pieds par les policiers et sont blessés. L’un d’eux porte des blessures à la tête suite à des coups de matraques. D’autres ont vu leurs chaussures sectionnées au milieu pour ôter la partie avant et les forcer ainsi à marcher avec l’avant du pied nu. Les militants apprennent simultanément que cinq personnes sont hospitalisées par ailleurs. Un groupe de sept personnes dont un asthmatique est arrêté sur le retour, entre la frontière et le camp de l’université, et reconduit immédiatement à la frontière. Ces personnes reviendront peu après ; deux d’entre elles ont du faire trois fois le trajet de retour. Par ailleurs d’autres en tentant de repartir immédiatement sur la route vers Rabat sont également arrêtées et subissent de nouveau le même sort.
Mardi 26 décembre et mercredi 27 décembre – A Oujda les étudiants proches du CEI apportent des sandwichs (environ 150) grâce à des fonds envoyés par le Temple Protestant de Rabat ; les militants d’ABCDS et Forum Réfugiés des paquets-repas (environ 200) qui sont distribués sur le camps près de l’université. Chaque sac-repas contient 1 boîte de sardine, 1 rond de saucisson de cheval, 4 « vaches qui rit », 3 clémentines, 1 pain frais, 1 savonnette. La distribution, jusqu’au 28 décembre se fait individuellement de la main à la main en un ou plusieurs points du camps. Elle bénéficie à toutes les personnes qui se présentent sans distinction de statut ou de nationalité. Le financement de cette aide est multiple, associant des contributions associatives, confessionnelles et personnelles. Une partie des fonds qui bénéficient à tous les exilés, sans distinction de statuts, proviennent du HCR et transitent par Forum Réfugiés et ABCDS. Les couvertures et vêtements sont apportés par Médecins sans Frontières ainsi que l’assistance médicale. Le nombre de militants assurant la distribution dépasse rarement la dizaine de personnes qui paient de leurs deniers personnels, de leur temps et de leurs forces physiques cet engagement de solidarité. Sur cette dizaine de personnes mobilisées cinq environ assurent de manière continue la livraison de nourritures, couvertures et vêtements depuis le début des rafles. Les associations les plus engagées sont Médecins sans Frontières (Espagne), ABCDS (Maroc / Oujda), l’Association Marocaine des Droits de l’Homme (AMDH, section d’Oujda), Forum Réfugiés (France), le Centre d’Entraide Internationale (Maroc), ATTAC-Maroc, Hommes & Environnements (Maroc / Berkane). Parallèlement, les militants tentent de faire un recensement par nationalité, de repérer les « chairmans » (représentants supposés élus au sein de chaque nationalité) et leurs numéros de téléphone. L’association Forum Réfugiés continue également de rechercher les demandeurs d’asile et les réfugiés statutaires. Ces activités de recensement sont mal perçues par les exilés. L’Organisation Marocaine des Droits de l’Homme (OMDH, Maroc), moins présente sur le terrain, se tient informée des évènements : une réunion a lieu, au cabinet de l’un des avocats de l’OMDH, avec les militants d’autres associations à qui l’OMDH demande notamment un rapport circonstancié sur les évènements. A Paris, le 26 décembre l’association Migreurop publie un communiqué intitulé « Au nom des engagements pris envers l’UE, des migrants et des réfugiés sont raflés au Maroc ». A Rabat le 27 décembre, l’Association Marocaine des Droits de l’Homme publie une lettre ouverte au Ministre de l’Intérieur.
Jeudi 28 décembre – Dans la matinée, des militants d’une association espagnole de solidarité, venus spécialement à Oujda, entreprend sans concertation, de distribuer de l’argent (environ 30 € par personne)… mais seulement aux demandeurs d’asile et réfugiés reconnus. Ils font une trentaine de dons mais leur démarche déclenche une bagarre sur le camp les forçant à fuir sans avoir distribué le reste. Dans l’après-midi, lorsque les militants d’ABCDS viennent livrer les sacs-repas, ils font face à une tension très forte parmi les exilés, notamment ceux de la communauté nigériane, réputés pour leur violence à l’égard des autres exilés et leurs attitudes dominatrices voire mafieuses. Cette tension semble avoir été accentuée par quelques flashes de photos prises dans la nuit par les militants pour garder trace de leurs livraisons d’une part et également par l’annonce que les demandeurs d’asile et les réfugiés qui le souhaitent peuvent se faire identifier. Ces deux gestes ont pu être perçus comme des tentatives de fichage. Dans ce climat tendu, les « nigérians » réclament de l’argent, menacent les militants qui sont ainsi contraints de se retirer du camp et de changer leurs modalités de distribution. Un peu plus loin, des contacts vont être renoués avec les « chairmans » (représentant supposés élus) des nationalités et les aides leur seront allouées en fonction du nombre (estimé/négocié) de personnes de la même nationalité. Environ 300 sacs-repas seront ainsi distribués par ABCDS et Forum Réfugiés. Le soir même l’idée s’impose de continuer les distributions selon cette modalité « communautaire » plutôt que de manière individuelle et les militants réfléchissent aux moyens de faire renvoyer vers Rabat les cas les plus urgents. Dans la journée une militante d’ATTAC-Maroc à Rabat, l’association étant également présente à Oujda durant la crise, annonce sur le forum [Manifeste-euroafricain] que les autorités d’Oujda ont proposé « Les autorités ont pris contact avec des organisations de droits humains pour leur annoncer leur intention de procéder au tri des « bons » et « mauvais » migrants, en clair, identifier les demandeurs d’asile et les réfugiés et les séparer des autres migrants dits « économiques » ». A Paris un collectif d’associations (AMF, ASDHOM, ATF, ATMF,Coordination Femmes « EGALITES », FTCR, GISTI, IDD, MIR, RLF, Voie démocratique (france), Union syndicale solidaire, les Alternatifs, IACD, AMDH (maroc), EMCEMO, KMAN (Hollande)…) a organisé un rassemblement de protestation devant l’ambassade du Maroc.
Vendredi 29 décembre – Environ 400 sacs-repas sont distribués. Forum Réfugié et ABCDS, se rendent à 11h30, au siège de la Willaya d’Oujda (représentation locale du gouvernement national) et demandent à parler au Directeur du Cabinet du Wali pour y solliciter des autorisations de retour par autocars et train des personnes détentrices de certificats d’enregistrement d’une demande d’asile auprès du HCR ou reconnues par lui comme « Réfugiés ».
Le secrétaire personnel du Directeur de Cabinet les oriente vers le Chef du Service des Affaires Générales, avec qui ils peuvent s’entretenir une vingtaine de minutes. Les deux associatifs lui font part de la présence à Oujda de « demandeurs d’asile » et « réfugiés » refoulés vers la frontière dans la nuit du 23 au 24 décembre. Le responsable de la Willaya s’offusque que l’on puisse ainsi laisser entendre que la police marocaine aurait pu ainsi « déplacer » des personnes titulaires de documents valides émanant du HCR. Il observe que beaucoup d’exilés ont en leur possession de faux documents imitant ceux du HCR. Les deux associatifs lui confirment que des personnes détentrices de vrais documents du HCR sont à Oujda. Le responsable indique que ces personnes doivent être venues par leurs propres moyens ou ont été emmenées par erreur. Interrogé sur les solutions envisageables pour leur permettre de rentrer à Rabat, le responsable de la Willaya indique que cela relève de la compétence de la Préfecture de Police. Les deux associatifs se rendent peu après à la Préfecture de Police et demande le Chef du Service de la Documentation, habituellement en charge des dossiers relatifs aux étrangers. Son secrétaire indique qu’il est en réunion et suggère d’attendre. Quelques minutes le même secrétaire indique qu’il n’est pas certain que son supérieur revienne au bureau dans les prochaines heures et avant le début du week-end. Les deux associatifs s’en vont. Une première tentative de faire rentrer quelques personnes (réfugiés et demandeurs d’asile) a lieu le soir même. La police est arrivée sur place, à la gare routière, et a arrêté les 4 migrants qui devaient repartir à 18h et le représentant de Forum Réfugié, ils les ont emmené au commissariat central d’Oujda. Deux militants de l’AMDH ont négocié avec la police pour avoir une autorisation. La police accepte, mais à condition de passer chaque fois par le commissariat pour identifier les migrants et vérifier leurs papiers. Dans le même jour, trois nigérians ont été également arrêtés à la gare routière avec des papiers HCR falsifiés. Ils ont tenté de monter dans l’autocar moyennant une somme d’argent donnée à un employé de la gare. A 22h30, 4 migrants parviennent à rentrer par un autre autocar.
Samedi 30 décembre – 400 sacs-repas sont distribués par ABCDS et Forum Réfugiés et de nouvelles démarches sont entreprises par elles (en vain) auprès des autorités pour renvoyer à Rabat les cas « les plus urgents ». Le représentant sur place d’ATTAC-Maroc indique sur le forum [Manifeste-euroafricain] que « la situation est vraiment catastrophique au campus à Oujda. Il y a effectivement quelques malades, des enfants, des femmes enceintes... Mais, malheureusement peu d’aides, sauf quelques promesses de certaines organisations ! Nos amis de l’ABCDS font de leur mieux, et ont besoin de soutien (nourriture, couvertures, vêtements, etc.). » et diffuse un premier compte-rendu de la situation entre le 23 et le 29 décembre 2006. Parallèlement une nouvelle démarche, menée par le Président de l’Association Marocaine des Droits de l’Homme et Forum Réfugié auprès de la Préfecture de Police permet d’obtenir une autorisation pour faire rentrer quelques personnes par autocar. Cependant en l’absence de trace écrite de cet accord le chauffeur d’autocar refuse catégoriquement de transporter des « africains noirs » justifiant ainsi d’un acte raciste. Les militants de l’AMDH et d’ATTAC-Maroc parviennent avec d’âpres discussions avec la police, et avec difficulté, à faire rentrer 5 autres exilés par train à 21 h. Par ailleurs la police refuse qu’il y ait d’autres opérations similaires durant les 2 jours qui vont suivre, jours de fête.
Dimanche 31 décembre – L’information (en provenance d’une association de Laâyoune) commence à circuler qu’une nouvelle rafle de 131 personnes a eu lieu à Laayoune et que les victimes sont en cours d’acheminement vers la frontière d’Oujda. En début d’après-midi, 43 personnes seront repérées par des témoins dans un commissariat d’Oujda avant d’être envoyées à 15 h vers la frontières dont elles reviendront le soir moi-même pour se rendre au camp près de l’université. Le soir 200 sacs-repas environ sont distribués. Des militants d’ABCDS et de Forum Réfugiés passent le réveillon avec les exilés.
Lundi 1er janvier – Les modalités de distribution de la nourriture sur le camps près de l’université sont encore modifiées afin de faciliter cette tâche : des sacs de 5 kilo de riz sont achetées avec des bouteilles d’huile, du sel et des marmites à raison d’une pour dix personnes. Les distributions se font alors par communauté sous la forme de sacs de riz + huile + sel. Le don d’un mouton par un sympathisant de l’ABCDS permet d’améliorer l’ordinaire de ce nouvel an. Un nouveau départ de 5 personnes par le train est négocié avec la Préfecture de Police par l’Association Marocaine des Droits de l’Homme et Forum Réfugiés. Par ailleurs, les associations de la ville de Laâyoune au sud du Maroc indiquent que 40 personnes de plus viennent d’être arrêtées.
Mardi 2 janvier – Nouvelle distribution de nourritures par ABCDS et Forum Réfugiés. Forum Réfugié et ABCDS se rendent de nouveau à la Préfecture, vers 19 h, pour obtenir une nouvelle autorisation de départ pour quelques demandeurs d’asile et réfugiés par autocars ou train. Ils sont orientés vers une personne présentée comme le responsable des dossiers relatifs aux subsahariens. Cette personne indique qu’aucune instruction n’a été envoyée de Rabat et que les Africains en situation irrégulière n’ont donc pas le droit de circuler.
Mercredi 3 janvier – La distribution de riz + huile + sel continue. Un article du journal marocain Libération (proche du parti de centre gauche USFP) sur « Le calvaire des subsahariens » fustige ces rafles et les pratiques policières qui ont conduit à abandonner dans le désert des femmes et des enfants ainsi que des femmes enceintes. Les exilés du camp d’Oujda prennent connaissance l’article avec une certaine satisfaction et le font circuler « pour se remonter le moral ».
Jeudi 4 janvier –Une réunion inter associative est organisée au siège de l’Association Marocaine des Droits de l’Homme, section d’Oujda à 11 h. Elle contribue à préparer celle qui est organisée au siège national l’AMDH à Rabat à 17 h. • A Oujda, l’AMDH indique qu’elle a publié un communiqué de presse en arabe le 25 décembre, qu’elle a écrit au Ministre de l’Intérieur et au Wali. L’OMDH indique qu’elle a été reçue par le Préfet de Police qui dit être incompétent pour délivrer des laissez-passer et considère que l’opération étant d’envergure nationale, l’affaire doit être traité à ce niveau. Il insiste en revanche sur l’existence de faux papiers imitant ceux du HCR et fait revenir l’association à la Préfecture pour qu’elle constate la réalité du phénomène des faux papiers du HCR sur trois cas de personnes acceptant (librement ?) de reconnaître les faits reprochés. Forum Réfugiés fait un état de la situation des demandeurs d’asile et réfugiés, des autorisations obtenues et du blocage depuis deux jours. Un débat à lieu sur la focalisation sur les « demandeurs d’asile » et « réfugiés » au risque de laisser les autres sans arguments de défense. • A Rabat, sont réunies à l’AMDH près d’une quinzaine d’associations. Un bilan de la situation est réalisé sur le plan humanitaire. Le responsable de Médecins sans Frontières (MSF)indique qu’elle est « présente à Oujda et travaille sur l’aide humanitaire et médicale aux blessés et autres cas qui se présentent (agressions, viols..).
Sur le plan médical ; les cas les plus vulnérables sont orientés vers Rabat, les autres sont traités sur place. Sur le plan humanitaire, du matériel contenant des couvertures, vestes, etc, a été distribué (plusieurs centaines de kits distribués) ». Le représentant de Médecins du Monde (MDM) s’interroge « Il existe d’autres petits sites éloignés du campus, sont-ils couverts ? ». Aucune réponse n’est donnée à cette question… (qui est négative). Il demande aussi s’il serait possible de relayer les militants sur place, à Oujda, par période de 3 à 4 jours. Comme à Oujda, un débat a lieu sur l’axe de mobilisation : « demandeurs d’asile / réfugiés » ou les « migrants » dans leur ensemble ? In fine, il est décidé d’envoyer des personnes à Oujda pour relayer les militants, un communiqué de presse, des délégations et une lettre ouverte à la Commission Européenne, au Ministère de l’Intérieur, au Conseil consultatif des droits de l’homme (CCDH) et au représentant du Haut-Commissaire aux Réfugiés de l’ONU (HCR). • A Oujda, une nouvelle distribution de nourriture sur le camp est assurée par ABCDS et Forum Réfugiés. Les militants, présents sur le terrain depuis près de deux semaines, paraissent de plus en plus épuisés. Le nombre d’exilés présents sur le camps est estimé dans la soirée à environ 200 personnes suite à des départs à pied déjà nombreux, ses derniers jours, dans les trois directions d’origines (Rabat, Laayoune, Nador) et, probablement aussi, à des solutions provisoires d’hébergement dans les banlieues d’Oujda. Ce nombre est à peu près égal à celui qui pouvait être estimé au milieu du mois décembre.
5. LES RAISONS DES RAFLES ET DES BRUTALITES POLICIERES ?
La première dépêche AFP est diffusée le 23 décembre à 17 h 05 « Deux cent quarante immigrés d’Afrique subsaharienne « en situation irrégulière » ont été interpellés samedi à l’aube à Rabat pour être expulsés via la frontière algérienne (est du Maroc), a-t-on appris de source policière. Ces immigrés, de différentes nationalités, seront remises aux autorités algériennes après un avis du parquet qui a été notifié aux personnes interpellées, a indiqué la police à l’AFP. » La MAP, agence de presse officielle du Maroc, indique dans une dépêche reprise le 25 décembre 2006 par le journal arabophone « Assabah » (Le Matin), sous une photo montrant les exilés aux prises avec les « forces auxiliaires » (photo ci-dessus) qu’il s’agit d’une opération de grande envergure préparée, dans cinq quartiers populaires de Rabat, avec l’appui des « auxiliaires de sécurité » (agents de police en civil résidant sur place) pour le repérage des appartements visés par l’opération. Le journal Assabah explique l’origine de cette opération par l’aggravation des politiques antimigratoires européennes rendant plus difficile le passage vers l’Europe et amenant les exilés de passage à résider durablement dans les villes marocaines. Il ajoute que cette opération « s’inscrit dans le cadre des efforts faits par les autorités pour combattre l’immigration clandestine et les réseaux de traite des êtres humains. Cette action est réalisée aussi dans le cadre de la coopération avec l’Union Européenne et les autorités espagnoles. ». Dans une brève datée également du 25 décembre le journal francophone « L’opinion » ajoute que « le Maroc applique un principe consistant à expulser les immigrés clandestins vers le pays, généralement l’Algérie, qu’ils ont traversé pour entrer dans le royaume. ».
Les raisons qui ont conduit le Ministère de l’Intérieur à organiser ses rafles sont obscures. Plusieurs interprétations peuvent être envisagées sans réelles possibilités de confirmation et sans que les unes et les autres ne s’excluent :
L’explication officielle référée aux pressions européennes est plausible. Lors d’une déclaration faite par le Wali de Rabat à la télévision marocaine le jour des rafles, l’opération est présentée comme entrant dans le cadre des ’’engagements pris par le Maroc’’ lors de la conférence euro-africaine qu’il a hébergée en juillet dernier. Telles que présentées à la télévision les rafles paraissaient bien programmées et organisées, avec notamment présence de caméras et de bus appartenant à la même compagnie. Le transport en autocar des exilés de Rabat jusqu’à Oujda a été estimée par le Wali à 1350 € Dirhams par personne, c’est-à-dire environ 125 €. Il est vrai que l’Union Européenne fait pression de manière continue et finance la politique antimigratoire du Maroc contre les exilés d’Afrique noire. Cependant elle le fait de manière continue depuis plusieurs années. Pourquoi ces rafles en ce moment ? L’idée que la date tardive dans l’année civile de cette opération puisse résulter de contraintes de dépenses de fonds européens avant la date comptable du 31 décembre ne suffit pas cependant à expliquer la brutalité des moyens employés après une année de calme relatif et un apaisement sensible des pratiques policières depuis l’été.
Une deuxième interprétation tend à relier la date du déclenchement des opérations de rafles, le 23 décembre, à la fête chrétienne de Noël sachant que les Africains originaires des pays d’Afrique subsaharienne, qu’ils soient étudiants ou exilés en transit au Maroc, sont majoritairement chrétiens (catholiques ou protestants) et représentent la plus grande partie, les trois quart environ, des communautés chrétiennes au Maroc. Quel serait le sens d’une telle corrélation ? S’agit-il d’un message des fractions les plus conservatrices de l’Etat dans un pays marqué par la poussée électorale de l’islamisme ? S’agit-il d’un opportunisme policier cherchant à déjouer la vigilance des exilés sans-papiers durant les jours de fêtes (l’autre rafle, à Layoune, a eu lieu le 30 décembre) ? S’agit-il miser sur la plus faible réactivité des militants associatifs et des rédactions de presse dans la période des fêtes de fin d’année ?
Depuis le mois de septembre 2006 le Croissant Rouge Marocain, proche du pouvoir, avait obtenu l’autorisation politique de déployer des moyens humanitaires à destination des migrants en transit au Maroc. Cela se traduisit par l’organisation (à partir d’octobre 2006), d’un colloque de trois jours en partenariat avec la Fédération Internationale des Croix Rouges et Croissants Rouges à Oujda les 18, 19 et 20 décembre 2006 sur le thème « Le Maroc oriental face au phénomène migratoire ». L’opération policière des rafles de Noël, quant à elle, nécessitant probablement plusieurs semaines de repérage des appartements à Rabat et à Layoun et d’organisation des mouvements d’autocars et des forces de l’ordre, a du être préparée à partir du mois novembre. Or le 11 décembre 2006, la première distribution de couvertures sur le camp d’Oujda prévue par le Croissant Rouge Marocain a été au dernier instant reportée à une date ultérieure et n’a jamais eu lieu depuis lors. Tout cela laisse penser que plusieurs parties de l’appareil d’Etat marocain s’affrontent autour de cet enjeu et l’on peut se demander si l’opération policière n’est pas une réactions des fractions les plus répressives de l’Etat marocain à l’égard des avancées enregistrées par les segments de l’Etat soucieux de faire avancer le Maroc dans sa transition vers un Etat de droit.
Une autre interprétation semble être implicitement suggérée par le journal marocain Libération (proche du parti de centre gauche USFP) titrant à la Une « L’Espagne recrute 180 000 étrangers pour 2007 – Une aubaine pour la main d’œuvre marocaine » et en titre de sommaire renvoyant vers la page 3 du journal : « Campus universitaire d’Oujda - Le calvaire des subsahariens ». L’organisation de la page 3 reproduit ce vis-à-vis en plaçant en haut de la page l’article sur le calvaire des migrants subsahariens et en bas l’article sur les opportunités migratoires des marocains vers l’Espagne. On peut se demander si la rédaction du journal n’entend pas suggérer ainsi que l’opération de rafles puisse être une contrepartie répressive à l’obtention par le Maroc d’une ouverture des frontières espagnoles pour ses ressortissants.
Dans une perspective de plus long terme, une autre interprétation est avancée par Minoun Rahmani, secrétaire général adjoint d’ATTAC-Maroc, dans son « Rapport sur la situation à Oujda du 23 au 29 décembre 2006 » (ci-dessous : annexe n°9) : « Voici le discours des autorités de « l’ère nouvelle » ; qui ont choisi cette période de la fête de fin d’année et de la fête du sacrifice pour les musulmans, pour effectuer leur sal boulot de gendarme de l’Europe, et au moment où les mouvements sociaux au Maroc sont préoccupé par un autre problème ; celui de la cherté de la vie suite à de multiples augmentations des prix des matières essentiel et à la dégradation continue des services publics de base ». En effet la conjoncture sociale au Maroc est marquée par l’ébullition des mouvements de lutte contre la cherté de la vie suite à l’augmentation des prix des produits essentiels. Mettre sur l’agenda politique un autre « problème », celui des migrants, peut permettre au gouvernement marocain de détourner l’attention de l’opinion publique marocaine comme l’on fait les gouvernements européens, au moment des chocs pétroliers, dans les années 1970, en « fermant les frontières » et en déclenchant les premières politiques antimigratoires.
Annexes : Dépêches, communiqués et articles de presse
Annexe 1 : Dépêche AFP Immigration : expulsion de 240 Africains interpellés à Rabat RABAT, 23 décembre 2006 (AFP -17h05)
Deux cent quarante immigrés d’Afrique subsaharienne « en situation irrégulière » ont été interpellés samedi à l’aube à Rabat pour être expulsés via la frontière algérienne (est du Maroc), a-t-on appris de source policière. Ces immigrés, de différentes nationalités, seront remises aux autorités algériennes après un avis du parquet qui a été notifié aux personnes interpellées, a indiqué la police à l’AFP. Neuf passeurs, dont l’identité n’a pas été précisée, ont également été arrêtés, a indiqué la préfecture de Rabat. « Ces personnes ont été refoulées dans le respect de leur dignité. Ils doivent quitter le Maroc à partir de la frontière marocaine d’Oujda (est) », un des points frontaliers avec le territoire algérien, a ajouté un responsable de la préfecture. Le Maroc applique un principe consistant à expulser les immigrés clandestins vers le pays - généralement l’Algérie - qu’ils ont traversé pour entrer dans le royaume. Contacté par l’AFP, un ressortissant congolais (RDC), Roger Neno, indique que lui et cinq autres Africains avaient été réveillés à l’aube par la police. Après vérification, la police les a fait monter dans un bus avec d’autres immigrés, a-t-il expliqué. Cinq bus se dirigeaient vers Fès (200 km à l’est de Rabat), a-t-il ajouté, affirmant ne pas savoir encore quelle était la destination finale du convoi. L’association marocaine Amis et familles des victimes de l’immigration clandestine (AFVIC), contactée par l’AFP, a indiqué que les interpellations avaient eu lieu dans le quartier de Nahda, mais aussi à Taqaddoum, un quartier populaire où habitent des centaines d’immigrés pour la plupart en situation irrégulière. aff-mc/jt AFP 17h05 - 23 DEC 06
Annexe 2 : Communiqué de l’association ABCDS (Oujda) 23/12/06
L’ABCDS a été informé des arrestations et refoulements effectués ce matin de javascript:barre_raccourci(’’,’’,document.formulaire.texte)23 décembre .L’ ABCDS déplore et dénonce énergiquement ces abus contre les réfugiés et demandeurs d’asile au Maroc , contre leur dignité et leurs droits fondamentaux.
L’association ABCDS a mis en marche un plan d’urgence avec tous les partenaires au niveau de la ville d’Oujda malgré le manque de ses moyens pour mieux organiser l’assistance à nos frères migrants ,réfugiés et demandeurs d’asile refoulés ; L’action de l’ABCDS s’enracine dans son engagement de solidarité absolue avec tous ceux qui ont besoin de notre accompagnement humain et de notre appui .
Hicham BARAKA Président
ABCDS – Oujda
Tel. : 067716524
Annexe 3 : Communiqué de l’association ATTAC Maroc - Secrétariat National - Rabat, le 23 décembre 2006- 17h
L’association Attac Maroc a été informée de nombreuses arrestations de migrants subsahariens qui ont été opérées au petit matin, ce jour 23 déce »mbre 2006 dans différents quartiers de Rabat.
Au total ce sont six cars qui ont quitté ce matin Rabat, transportant près de 400 personnes, d’après nos informations, en direction d’Oujda. Parmi eux, des femmes, des enfants, des réfugiées et des demandeurs d’asile.
Il y a fort à craindre que ce ne soit le prélude à une expulsion massive vers l’Algérie (rappelons à ce sujet que la frontière terrestre algéro-marocaine est officiellement fermée !) ou pire encore à un lâchage en plein désert comme cela avait eu lieu en septembre 2005.
Attac Maroc rappelle avec force que la gestion purement répressive et sécuritaire des flux migratoires, loin d’apporter une quelconque solution au dossier migratoire, ne fait qu’exacerber les tensions, au prix de nombreuses souffrances et dangers pour des personnes qui, précisément, ont fui leurs pays à cause des souffrances et dangers qu’ils y enduraient.
Attac Maroc dénonce la politique de l’Union européenne qui fait des accords de réadmission et de la sous-traitance de la répression anti-migration l’une des conditionnalités aux accords économiques et à l’aide au développement.
Attac Maroc considère que l’acceptation par le Maroc de jouer le rôle de gendarme pour l’Europe –acceptation que nous dénonçons- ne le dispense pas du respect scrupuleux de l’ensemble des conventions et textes internationaux régissant le droit des personnes en général et les droits des migrants, réfugiés et demandeurs d’asile en particulier.
Attac Maroc dénonce ces arrestations massives contraires au droit international et exige la libération de tous les migrants arrêtés et leur transport jusqu’à Rabat, où ils résident actuellement.
Rabat, le 23 décembre 2006- 17h
Attac Maroc
Secrétariat National
Annexe 4 : Communiqué de l’association ASDHOM (Paris), 23.12.07, 22h17
Pas de trêve des confiseurs pour les migrants subsahariens au Maroc
Aujourd’hui au petit matin, les autorités policières de Rabat ont déclenché une véritable rafle des migrants subsahariens.
Selon ces mêmes autorités, plus de 250 personnes ont été arrêtées. Embarquées dans des bus à destination de l’Est du pays (Région de Oujda) pour les déposer comme à l’accoutumée sur les routes qui mènent à la frontière Algérienne.
Nous avons tous en tête les affreuses images, où des centaines de subsahariens ont été lâchement refoulés et abandonnés en plein désert et en plein été… Ces images émouvantes rapportées par des caméras de certains médias nous font craindre le pire pour ces nouveaux expulsés. Avec le grand froid qui sévit dans cette région, la santé et la vie des familles concernées sont en danger…
L’ASDHOM condamne de nouveau ces méthodes inhumaines et alerte les autorités marocaines sur les dangers qui guettent les expulsés, dont des femmes et enfants. Leur vie et leur dignité doivent primer avant toute considération politique.
Les autorités Européennes qui font jouer au Maroc le gardien des frontières de Sud de l’Europe ne peuvent s’exempter de leur responsabilité et doivent agir pour que l’irréparable ne se produise en cette fin d’année.
Bureau Exécutif de L’ASDHOM Paris le 23 décembre 2006
Annexe 5 : Communique de l’association Pateras de Vida23/12/2006. Larache.Maroc
L’association Pateras de Vida au Nord du maroc a appris avec inquietude les dernieres nouvelles de raffle qui a touché les immigres subsahariens au maroc dans les quartiers populaires hay takadoum ; hay nahda y hay yaakoub mansour de rabat et qui a tenu comme resultat l’arrestation de plus de 300 immigrés subsahariens par les autorites policieres de rabat et tous ont eté conduit dans quatres autoicars de rabat vers oujda. L’association Pateras de Vida au nord du maroc denonce la violation de l’article 26 de la loi marocain de l’emigration et le sejour des etrangers marocains qui protege les demandeurs d’asile au maroc ; comme on confirme les positions suivantes : -nous denonçons le refoulement collectif des immigrés subsahariens par les autorites marocaines vers les frontieres de l’algerie. -Nous interpellons le gouvernement marocain de veilller au respect des droits des immigrés au maroc surtout ceux qui ont le statut des refugiés. - nous condamnons le traiement inhumain des forces de police marocaine qui ont procedé a des raffles brutales contre les immigrés subsahariens aux peripheries de rabat ces deux jours derniers. - Nous revendiquons aux forces democratiques marocaines et aux organisations de droits humains du maroc de se mobiliser immediatemment pour arreter ces violations graves des droits humains par les autorites du maroc. - Nous demandons au gouvernement du maroc le rejet de politique de fermeture de frontieres adopteé par notre pays le maroc en contrepartie des miettes d’euro. Secretariat de Pateras de vida 23/12/2006. Larache.Maroc.
Annexe 6 : Communiqué du Parti Socialiste Unifié (PSU, Maroc) – Bureau politique – 24.12.06
Communiqué à propos de l’opération de police menée contre des migrants subsahariens à Rabat dans la nuit du 22 au 23 décembre 2006
Rabat le 24 Décembre 2006
Le Maroc, dont 3 millions de ses citoyens vivent à l’étranger, est devenu depuis quelques années un pays de transit, et accessoirement de séjour par défaut, d’un nombre relativement important de migrants en situation administrative irrégulière en provenance essentiellement de pays d’Afrique subsaharienne.
Nous savons tous les raisons de ces migrations comme nous avons suivi – et condamné en leur temps – les violences qui ont été faites à ces migrants particulièrement au cours de l’automne 2005 aux confins des villes marocaines occupées de Sebta et de Melilia.
Nous avons aussi noté le travail diplomatique mené par le Maroc pour mettre chacun – aussi bien les pays de l’Union européenne que les pays de départ ou de transit – devant ses responsabilités et pour surmonter les effets négatifs de certaines des actions de ses forces de sécurité sur l’opinion publique marocaine et africaine.
Nous avons pu considérer que la rencontre gouvernementale Euro-africaine, tenue à Rabat début juillet 2006, marquait une rupture effective par rapport aux tendances antérieures, d’autant qu’avec le déplacement des routes migratoires vers les côtes mauritaniennes et sénégalaises, le Maroc s’est retrouvé dans une position moins critique, puisqu’il est apparu clairement qu’il n’était qu’un simple pays de transit. Ce qui relativise sa responsabilité par rapport aux pays de départ et surtout par rapport à ceux de l’Union européenne qui représentent l’objectif final des migrants.
Aussi, le Bureau politique du PSU, qui a débattu de cette question au cours de sa réunion du 24 décembre 2006, fait part de sa surprise quant au retour à certains comportements que nous avons estimés bannis depuis le mois de novembre 2005 par les autorités marocaines et exprime sa condamnation totale des atteintes flagrantes aux droits de l’homme que ces comportements impliquent.
Parmi ceux-ci il y a lieu de relever plus particulièrement l’absence quasi-systématique du recours à la justice avant toute décision de refoulement ou d’expulsion de migrants (contrairement à ce que prévoit même la loi 02-03) ainsi que les rafles périodiques dans les quartiers de résidence des migrants dits en situation irrégulière dans différentes villes de pays, et qui sont opérées dans l’irrespect total des règles élémentaires de droits de l’homme aussi bien quant aux procédures suivies, que quant aux personnes arrêtées dont on ne prend en considération ni leur situation de réfugié statutaire ni les garanties internationales et nationales induites par leur sexe, leur âge ou leur situation matrimoniale.
Dans ce cadre, le Bureau publique du PSU condamne tout particulièrement la rafle monstre dont ont été victimes plus de 230 migrants, qui ont été sortis de leurs logements dans la nuit du 22/23 décembre 2006 , dans des conditions de froid extrêmes, pour être conduits sans autre forme de procès, vers la frontière algéro-marocaine, où ils ont été dispersés pour, selon le Wali de Rabat intervenant à la télévision marocaine le 23 décembre 2006 au soir, ‘’se conformer aux engagements pris par le Maroc à l’occasion de la Conférence euro-africaine de Rabat‘’.
Ces actes, qui paraissent pour certains tout à fait gratuits vu leur timing et l’absence de motifs directs et apparents dictant qu’ils soient accomplis, sont de nature à porter atteinte à l’image du Maroc en Afrique en même temps qu’ils induisent une profonde contradiction avec le discours officiel qui soutient que le Maroc contrôle ses frontières et traite les migrants en situation irrégulière sur son territoire dans le respect total des droits humains et la réalité sur le terrain.
En outre, le BP du PSU a enregistré sur le même sujet le décès – entre les mois de juin et d’octobre 2006 - pour cause de maladie, d’absence de soins ou d’accident de 12 migrants subsahariens installés au Maroc.
Cette situation dramatique, résultat de la quasi-fermeture des passages entre le Maroc et l’Espagne, ne doit plus durer.
Pour cela le Bureau politique du PSU demande instamment au gouvernement d’arrêter les actions opposées aux droits de l’homme dirigées contre les migrants, quelle que soit leur situation au Maroc. Il demande également – face aux drames humains vécus par un très grand nombre de ces migrants - que les autorités publiques marocaines interviennent pour que les migrants sans moyens aient plein accès aux structures hospitalières publiques, au même titre que les Marocains en situation d’indigence. A ce sujet, le Bureau politique est conscient de l’insuffisance des moyens mis à la disposition de notre système de santé - insuffisance qu’il ne cesse de dénoncer à l’image des autres déficits dans d’autres services de base du pays – aussi presse-t-il les responsables marocains concernés d’agir pour que les instances de l’Union européenne ainsi que le HCR et l’Organisation des migrations internationales prennent effectivement leur part dans la réponse aux besoins de base de cette population migrante, qui se trouve provisoirement dans notre pays dans l’attente d’un départ de plus en plus hypothétique vers l’Europe, alors que le Maroc ne dispose pas de moyens suffisants pour faire face aux besoins primaires d’une proportion importante de sa propre population.
Le Bureau politique du PSU continue de penser que la façon de traiter les migrants étrangers vivant au Maroc a des incidences directes et indirectes sur les migrants marocains installés à l’étranger, comme il estime que l’Etat de droit se construit aussi par la façon dont les populations en situation de précarité sont traitées. Dans ce sens, la responsabilité du gouvernement marocain est pleinement engagée pour que les citoyens de pays subsahariens transitant par le Maroc ou y vivant soient protégés dans leur vie et leurs droits.
Fait à Rabat le 24 décembre 2006
Annexe 7 : Communiqué de Hélène Flautre, Présidente de la sous-commission des droits de l’Homme du Parlement européen
« Les violations massives des droits de l’Homme qui viennent de se dérouler au Maroc sont scandaleuses, elles doivent immédiatement cesser. »
Le samedi 23 décembre au Maroc des centaines de migrants ont été violemment arrêtés dans plusieurs quartiers de Rabat par les services de police marocains et conduits par bus prés de Oujda à la frontière algérienne. A leur arrivée ils ont été violentés, humiliés, insultés et menacés de représailles en cas de retour au Maroc. Parmi eux se trouvent des femmes, des enfants et des dizaines de réfugiés et détenteurs de documents du HCR, délivrés par le bureau de Rabat.
Hélène Flautre, députée européenne et présidente de la sous-commission des droits de l’Homme, condamne cette rafle avec la plus grande fermeté. « Les violations massives des droits de l’Homme qui viennent de se dérouler au Maroc sont scandaleuses, elles doivent immédiatement cesser. Les traitements inhumains et dégradants infligés aux migrants, notamment dans le camp militaire prés de Oujda, sont inadmissibles, ils constituent une violation grave des engagements internationaux du Maroc. Une enquête indépendante doit être diligentée et les auteurs poursuivis avec la plus grande fermeté. Les réfugiés et les demandeurs d’asile, détenteurs de documents du HCR ne peuvent en aucun cas être expulsés. Enfin les expulsions collectives sont condamnables en toutes circonstances. »
Hélène Flautre appelle les autorités marocaines à prendre au plus vite toutes les dispositions nécessaires pour que soient secourues et protégées les centaines de personnes déportées, en particulier celles qui n’ont pas pu encore rejoindre la cité universitaire de Oujda. Elle demande également à l’Union européenne d’intervenir auprès des autorités marocaines en ce sens et l’appelle à revoir sa politique de sous-traitance des migrants aux pays tiers. « L’Union européenne doit changer de cap dans ses relations avec les pays tiers concernant la politique d’asile et d’immigration. La pression exercée par l’exécutif européen pour obtenir des pays de transit ou même de départ, la rétention et la réadmission des migrants, conduit tout droit à leur répression et à la violation de leurs droits. L’exécutif européen agit ainsi en contradiction avec les traités qui placent la promotion de la démocratie et des Droits de l’Homme au cœur des relations extérieures de l’Union. »
Pour tout contact : Hélène Flautre 0033681946140
Annexe 8 : Communiqué de l’association Migreurop (Paris), 26.12.06
Au nom des engagements pris envers l’UE, des migrants et des réfugiés sont raflés au Maroc
A l’aube du 23 décembre 2006, entre deux cent et quatre cent migrants ont été raflés dans plusieurs quartiers de Rabat (Maroc), mis dans des cars et conduits de force à la frontière algérienne. Le 25 décembre, des rafles ont également eu lieu à Nador (à l’est du pays). Des femmes et de jeunes enfants ont été interpellés, ainsi que de nombreux demandeurs d’asile et personnes reconnues réfugiées par le Haut Commissariat des Nations unies pour les Réfugiés. Un peu plus d’un an après les évènements de Ceuta et Melilla de l’automne 2005, théâtre de déportations massives de migrants subsahariens qui avaient provoqué l’indignation de la communauté internationale, rafles et expulsions à grande échelle au nom de la protection des frontières de l’Europe sont à nouveau à l’ordre du jour dans un pays où, au quotidien, les droits des migrants et des personnes en besoin de protection internationale sont bafoués.
En décidant de mettre en place un « partenariat étroit » sur les questions migratoires, les Etats réunis à l’occasion des conférences euro-africaines sur la migration et le développement de Rabat (juillet 2006) et de Tripoli (novembre 2006) ont affirmé l’importance de la « protection des droits de tous les migrants », avec une attention spéciale pour les personnes vulnérables, ainsi que « le respect d’une protection effective pour les réfugiés et les personnes déplacées ». Ces principes fondamentaux semblent pourtant avoir une portée toute relative face à la volonté d’empêcher les migrants d’accéder au territoire européen, puisque c’est au nom des engagements pris par le Maroc dans le cadre de la conférence de Rabat que les autorités marocaines ont publiquement justifié les expulsions du 23 décembre !
En réalité, dans le cadre de la coopération qu’elle a impulsée depuis 2004 pour assurer la « dimension extérieure » de sa politique d’asile et d’immigration, l’Union européenne se sert des ses voisins du sud, qu’ils soient pays d’origine ou de transit des migrants, pour leur déléguer la protection de ses propres frontières, quelles qu’en soient les conséquences pour ceux qui ne peuvent plus les franchir. C’est ainsi que la Libye, régulièrement pointée pour les violations des droits humains qui y sont perpétrées, est en passe de devenir un des principaux sous-traitants de l’UE pour le filtrage des migrants venus du sud de l’Afrique. C’est ainsi encore que le Maroc est considéré comme un partenaire privilégié de l’UE dans la lutte contre l’immigration illégale, alors même que les principes contenus dans la Convention de Genève sur les réfugiés, qu’il a ratifiée, n’y sont pas respectés, et que l’UNHCR n’est pas en mesure d’y assurer la protection des personnes à qui il reconnaît le droit à protection internationale.
Pris dans la nasse de l’ « externalisation » par l’UE de sa politique migratoire, les morts de Ceuta et Melilla en 2005, comme aujourd’hui les raflés de Rabat, laissés à leur sort dans des conditions inhumaines, sont les victimes de cette logique irresponsable.
Le 26 décembre 2006
Annexe 9 : « Rapport sur la situation à Oujda du 23 au 29 décembre 2006 » par Mimoun Rahmani, secrétaire général adjoint d’Attac Maroc, 29.12.06
Le samedi 23 décembre, à 16h, la police a intercepté des maisons où habitent des migrants subsahariens aux quartiers NAHDA et TAQADOUM à Rabat. Environ 240 personnes ont été arrêtés et reconduits à Oujda transportés dans 6 bus, largués dans le désert à la frontière entre le Maroc et l’Algérie. 40 autres migrants africains ont été arrêtés à Nador le 25 décembre, ils auront le même sort.
Parmi ces 280 personnes, 150 ont pu rejoindre la ville d’Oujda. Aucune nouvelle des autres !
Selon les informations recueillies sur les lieux, au campus d’Oujda :
– Les migrants n’ont pas pu prendre leurs biens et leurs vêtement, ils ont été reconduit vêtus de sous vêtements, alors qu’il fait très froid !
– Des réfugiés et des demandeurs d’asile ont été également reconduits aux frontières, après avoir retiré et déchiré leurs papiers, délivrés par le HCR. 52 cas ont été identifiés, reste à vérifier 17 autres cas ;
– Parmi les migrants transportés, il y a des femmes avec leurs enfants. Au total 4 enfants de moins de 2 ans, dont un handicapé (il possède un seul pied) ;
– Deux femmes sont enceinte, au 7e et au 5e mois. La deuxième est arrivée ce matin au campus, très choquée et épuisée, elle a été séquestrée sur la route.. Nous avons emmené les deux dans un lieu sûr où elles seront soignées, et en sécurité ;
– Constatation de 4 cas de viol, sans informations sur les circonstances de ces viols, sauf que s’était fait par des marocains (3 cas) et par des algériens (1 cas)
– On compte également, parmi les migrants reconduits, des malades (différents cas de maladies) qui ont été empêchés de prendre des médicaments ;
– Aucune nourriture n’a été fournie aux migrants transportés, tout le long du trajet de voyage de Rabat à Oujda aux frontières (environ 600 Km) ;
– Les migrants ont été, par contre, victimes de coup de fouets ; ils ont été matraqués par la police marocaine et par les gardes des frontières algériennes. On peut constater des traces sur leurs dos.
– Parmi ceux qui ont pu regagné Oujda, on a trouvé un cas particulier : Mamadou Bali Sal, détenteur d’un passeport sénégalais. Il fait du commerce et vit au Maroc, à Marrakech depuis 2004. Son numéro d’entrée (d’enregistrement) est : 565339BY, en date du 17 décembre 2004.
Ainsi, nous avons bel et bien des migrants avec des papiers réguliers, réfugiés et demandeurs d’asile, contrairement à ce que prétendent les autorités marocaines ; qui, faut-il le rappeler, déclarent officiellement que ceux qui possèdent des papiers ont décidé de leurs grès d’aller à Oujda.. !? [Peut être pour se balader ou pour faire du tourisme !] Voici le discours des autorités de « l’ère nouvelle » ; qui ont choisi cette période de la fête de fin d’année et de la fête du sacrifice pour les musulmans, pour effectuer leur sal boulot de gendarme de l’Europe, et au moment où les mouvements sociaux au Maroc sont préoccupé par un autre problème ; celui de la cherté de la vie suite à de multiples augmentations des prix des matières essentiel et à la dégradation continue des services publics de base.
Heureusement que des organisations et des militants continuent de lutter dans des conditions extrêmement difficiles, et à apporter de l’aide malgré leurs moyens humain et matériels modestes. Parmi les organisations actives au niveau des aides humanitaires, d’assistance et de solidarité, on peut citer :
? L’Association Béni Znassen pour la Culture, le Développement et la Solidarité – ABCDS ;
? Médecins Sans Frontières (MSF) ;
? Comité d’Entraide International (CEI) ;
? Association des Amis et Familles des Victimes de l’Immigration Clandestine- AFVIC (Centre Afvic Maroc Oriental).
Par ailleurs, des organisations se sont engagées pour envoyer des aides, on attend toujours qu’elles tiennent leurs promesses.
D’autres organisations actives, côté droits humains et soutien médiatique :
? L’Association Marocaine des Droits Humains (AMDH), section d’Oujda ;
? ATTAC Maroc ;
Personnes engagées activement sur le terrain :
? Hicham Baraka ;
? Jelloul Araj ;
? Mathieu André.
Personne de contact :
Hicham Baraka
Mail1 : hicham.baraka gmail.com
Mail2 : hicham_amazigh yahoo.fr
Tél : +212 - 067716524
Oujda le 29 décembre 2006
Mimoun Rahmani, Attac Maroc.
Annexe 10 : Communiqué de l’ATMF (association des travailleurs maghrébins de France) – Paris 27.12.06
Pour le respect des droits des migrants au Maroc
Une gigantesque rafle au faciès a eu lieu le 23 décembre à Rabat ( Maroc) contre les migrants africains.
Plus de 300 réfugiés, demandeurs d’asile et migrants ;hommes, femmes et enfants – ont été emmenés en cars à la frontière algéro-marocaine du côté d Oujda pour y être expulsés.
Un an après les événements tragiques de Ceuta et Melilla, le gouvernement marocain renouvelle sa politique de déportation en la justifiant par « la conformité des engagements pris par le Maroc » (dixit, le préfet de Rabat) envers l’Union européenne
Les associations signataires condamnent ces expulsions collectives, en contradiction totale avec les différentes conventions internationales que le Maroc a signées, ainsi qu’avec la loi marocaine sur le séjour.
Nous condamnons les pressions exercées par l’Union européenne sur le Maroc pour dissuader les demandeurs d asile et les migrants de demander protection et asile.
Les associations signataires exigent le retour de tous les expulsés, le respect de leur dignité et leur régularisation immédiate.
Un rassemblement de protestation le jeudi 28 décembre à 18h devant L’Ambassade du Maroc à Paris, 5, rue Le tasse – 75016 Paris
Premièrs signataires : AMF, ASDHOM, ATF, ATMF,Coordination Femmes « EGALITES », FTCR, GISTI, IDD, MIR, RLF, Voie démocratique(france),Union syndicale solidaire,les Alternatifs , ACORT, IACD,Association des amis de taourirt soutien AMDH(maroc),EMCEMO,KMAN(pays bas)
Annexe 11 : Dépêche d’Angola Presse 27/12/06
Interpellation au Maroc de plusieurs centaines de migrants
Plusieurs centaines de migrants ont été arrêtés au Maroc dans les villes de Nador et de Rabat, et ont été ensuite mis dans des cars et conduits de force à la frontière algérienne, selon Migreurop.
mercredi 27 décembre 2006.
Les autorités marocaines justifient ces interpellations par les engagements pris par le Maroc à l’occasion des conférences euro- africaines sur la migration et le développement de Rabat (juillet 2006) et de Tripoli (novembre 2006) pour empêcher les migrants daccéder au territoire européen.
Un peu plus d
un an après les évènements de Ceuta et Melilla (deux villes espagnoles au nord du Maroc) de lautomne 2005, ces femmes et de jeunes enfants, ainsi que de nombreux demandeurs d
asile et personnes reconnues comme réfugiées par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés ont été interpellés "au nom de la protection des frontières de lEurope", indique le réseau dans un texte dont copie à été transmise à la PANA.
Le Maroc, souligne Migreurop, est considéré aujourd
hui comme un partenaire privilégié de l’Union européenne dans la lutte contre limmigration illégale, alors même que les principes contenus dans la Convention de Genève sur les réfugiés, qu
il a ratifiée, n’y sont pas respectés et les droits des migrants et des personnes en besoin de protection internationale y sont bafoués par les services de sécurité.
Synthèse de Kahina
D’après Angop
Annexe 12 : Article paru dans Liberation (Maroc) du 27 décembre 2006
Des réfugiés et demandeurs d’asile parmi les migrants transportés à la frontière algérienne
Près d’une quarantaine de réfugiés et demandeurs d’asile comptaient parmi les ressortissants subsahariens interceptés samedi au petit matin dans plusieurs quartiers de Rabat. Il suffit de bien fouiller dans les registres du Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR) pour prendre note que le dénommé Ado Libobe dispose d’un statut de réfugié, et que Roger Lelo et Kwani Mompongo figurent parmi les demandeurs d’asile. Mais, l’esprit des campagnes ne reconnaît pas l’application des termes de la loi. En fait, la loi marocaine 02-03 relative à l’immigration interdit les autorités marocaines d’expulser quiconque a déposé une demande d’asile, jusqu’à l’examen de son cas et le rejet de sa demande, n’en parlons pas du statut de réfugié, protégé par la convention de 1951 de Genève.
La procédure suivie par le Maroc et le Haut Commissariat des Réfugiés (HCR) en la matière stipule que les demandeurs d’asile qui se présentent au HCR à Rabat déposent une demande d’asile et en contrepartie reçoivent des récépissés de dépôt. Le HCR les convoque pour étude de dossier. La date pourrait aller jusqu’à 2008. Pour cette agence onusienne, les demandeurs d’asile jouissent des mêmes droits que les réfugiés, jusqu’à ce qu’on statue définitivement sur leurs cas.
« Le Maroc, selon la loi marocaine de novembre 2003 sur l’immigration, s’abstient de déporter, refouler ou expulser les demandeurs d’asile et les réfugiés tant que les procédures légales en vigueur n’ont pas encore été épuisées », indique une source civile au fait de ce dossier.
Ce n’est pas tout, les autorités de la Wilaya et dans un objectif d’information ont fait publier un communiqué via l’agence Maghreb Arabe Presse (MAP) à travers lequel ils disent qu’il « ont procédé samedi à l’interception de 238 clandestins originaires de pays subsahariens ». D’emblée une remarque est à apporter au contenu de ce communiqué et a trait au contenu de ce communiqué qui est resté muet quant à la destination de ces personnes interceptées. Est-ce un centre d’accueil ? La prison ? Le retour par avion ou bateau chez eux ? Ou une autre destination ? Deuxième remarque est que le communiqué n’avance point que parmi les migrants interceptés à Rabat, il y avait 7 à 8 enfants, et qu’aucune nouvelle n’est parvenue sur leur sort.
Sans suspens aucun, les personnes interceptées ont été ramenées vers Oujda, aux abords de la frontière algérienne, ils ont été répartis en quatre groupes. Puis lâchés en plein désert. Pour les obliger à avancer vers l’autre côté de la frontière, les forces de l’ordre marocaines tiraient dans l’air, semant ainsi une grande panique parmi les immigrés. Quelques uns ont été blessés du fait de l’obscurité et des terrains accidentés. Une fois revenus à Oujda, les immigrés d’origine subsaharienne ont reçus les premiers soins de la part de Médecins Sans Frontières, alors qu’un réseau associatif et citoyens s’est évertué pour leur procurer habits, couvertures et alimentation. Le climat à Oujda où il pleuvait dimanche n’aidait point les immigrés qui ont rejoint le campus universitaire d’Oujda, lieu désormais traditionnel pour ces jeunes.
Par ailleurs, la police d’Oujda a procédé à l’arrestation de sept (7) d’entre eux, alors que de l’autre côté de la frontière, les autorités algériennes avaient arrêté deux jeunes congolais : Nsiku Yulu et Muntu Dimuru.
Encore ce chemin de la honte qui est emprunté par nos responsables. Dans quel objectif font-ils cela ? N’on-ils pas appris la leçon de l’année dernière lorsqu’une dizaine de Subsahariens ont trouvé la mort dans le désert entre le Maroc et l’Algérie ou lorsqu’une image d’un jeune immigré relatant les actes des autorités marocaines a fait le tour du monde ? Peine quasi perdue. Une centaine d’entre les « lâchés » à la frontière ont rebroussé chemin à Oujda… à pied.
Beaucoup d’observateurs craignent que la politique de l’Union européenne ne fasse des accords de réadmission et de la sous-traitance de la répression anti-migration l’une des conditions aux accords économiques et à l’aide au développement.
Le respect des accords conclus en la matière par le Maroc le dispensent-ils du respect méticuleux de l’ensemble des conventions et textes internationaux régissant le droit des personnes en général et les droits des migrants, réfugiés et demandeurs d’asile en particulier ?
Nouri Zyad
Annexe 13 : Article de Djamel Bouatta publié par « Liberté Algérie » 28/12
http://www.liberte-algerie.com/edit.php?id=69836
Immigration clandestine et droit d’asile
Une organisation espagnole fustige la politique marocaine d’expulsion
Par : Djamel. Bouatta./APS
Le Maroc expulse sans distinction les étrangers africains détenus à Rabat : quelque 250 personnes d’origine africaine. Même les 79 demandeurs d’asile et réfugiés, principalement des Ivoiriens et des Congolais, reconnus par l’ONU n’ont pas été épargnés.
La Commission espagnole d’aide aux réfugiés (Cear) a dénoncé hier l’expulsion. L’opération a été menée de manière violente, selon un communiqué du Cear qui cite des médias et des avocats qui ont confirmé que les personnes ont été volées par la police qui est mise à l’index. “La police marocaine est connue pour sa violence envers les Subsahariens, la déportation des femmes enceintes, des enfants et les agressions sexuelles contre plusieurs femmes”.
La Cear dénonce “ces faits graves qui se répètent périodiquement depuis des années, malgré leur dénonciation par des organisations sociales et des médias”. Aussi la commission considère-t-elle “inacceptable l’absence de protection dont souffrent les réfugiés et les demandeurs d’asile au Maroc”.
Elle a également appelé les gouvernements européens à garantir la protection des demandeurs d’asile et des réfugiés et au respect des droits des migrants. L’organisation demande également aux gouvernements européens de “prendre des mesures immédiates face aux violations constantes des droits des demandeurs d’asile et des réfugiés au Maroc”, afin d’éviter à cette catégorie l’expulsion ou la maltraitance par les forces de sécurité marocaines. Elle exige “la protection réelle et effective de ces personnes”.
Diario de Navarra, 2006-12-28
Annexe 14 : Article paru dans le journal « Libération » (Maroc) 28.12.06
Campus universitaire d’Oujda Le calvaire des Subsahariens
Les accords signés avec les Espagnols ou les autres pays européens ne doivent pas nous aveugler quant à nos responsabilités face à la situation que vivent les migrants subsahariens sur notre territoire.
Les autorités marocaines ont tenté, ces derniers jours, de se rattraper au sujet des migrants subsahariens refoulés la semaine dernière vers les frontières maroco-algériennes, après les avoir arrêtés dans des quartiers de Rabat. Près de 150 migrants parmi les 238 « refoulés » ont regagné Oujda à des moments différents et plus particulièrement le campus universitaire, où ils élisent domicile. Mais, avec des températures de moins de 6 degrés Celsius par ces nuits hivernales, il y a bien une raison de craindre que le pire ait lieu.
Après avoir voulu vainement nier l’existence de personnes qui sont en situation régulière au Maroc, soit des réfugiés ou des demandeurs d’asile, et qui ne tombent pas donc sous le coup de la loi relative à l’immigration (02-03), les autorités ont pris contact avec des organisations de droits humains.
L’objectif en est d’annoncer aux acteurs dont Médecins sans frontières, l’Association Béni Znassen pour la culture , le développement et la solidarité (ABCDS) ; Comité d’entraide International (CEI) ; Association des amis et familles des victimes de l’immigration clandestine ; AFVIC (Centre Afvic Maroc Oriental), une démarche qui consiste à procéder à un tri séparant les « bons » des « mauvais ».
Cinquante-deux réfugiés légaux ont été identifiés, selon les premiers décomptes. Mais là n’est pas le pire, commente l’un des acteurs civils sur place, « nos autorités ont lâché même deux femmes enceintes, quatre enfants dont deux de moins de deux ans et un handicapé vivant avec un seul pied ».
Selon les mêmes sources, les autorités ont profité de l’occasion de l’Aïd et de la fin d’année, en l’absence des missions étrangères accréditées au Maroc pour procéder à une telle opération.
« Comment peut-on se permettre de saisir des documents légaux à des gens puis les déchirer, oubliant que leurs noms sont toujours inscrits dans les registres du HCR à Rabat », souligne un actif de la section de l’Association marocaine des droits humains (AMDH) engagée dans l’opération d’aide apportée par les associations marocaines au niveau de l’Oriental.
Par ailleurs, le sort de plusieurs autres migrants reste inconnu et sont toujours à la merci du désert et ses aléas et du froid.
Comment peut-on laisser 238 personnes, dont des enfants, des femmes enceintes sans nourriture durant le trajet Rabat-Oujda ? Ce n’est sûrement pas ainsi qu’on prouvera notre engagement et manifester notre solidarité africaine.
nourizyad yahoo.fr
Annexe 15 : Lettre ouverte d’associations marocaines, africaines et européennes le 04.01.07
Au Maroc, les droits et la dignité d’hommes et de femmes bafoués au nom de la protection des frontières de l’Europe
Un peu plus d’un an après les tragiques événements de l’automne 2005, les ressortissants subsahariens au Maroc, victimes des politiques sécuritaires menées par l’Union européenne et ses « partenaires », continuent d’être persécutés au seul nom de la protection des frontières extérieures de l’Europe.
Le 23 décembre, les forces de l’ordre marocaines ont mené des rafles d’envergure dans les quartiers populaires de Rabat où vivent bon nombre de migrants. Des dizaines de policiers et agents des forces auxiliaires ont pénétré dans les habitations et arrêté sans distinction les Subsahariens qui s’y trouvaient (y compris des femmes enceintes et des enfants) afin de les transporter à la frontière algérienne dans une zone désertique aux environs d’Oujda. Ces rafles ont concerné au moins 240 personnes.
Le 25 décembre, 40 autres migrants d’Afrique subsaharienne ont été arrêtés à Nador et conduits dans les mêmes conditions à la frontière.
Le 29 décembre, 140 autres personnes, interpellées à Lâayoune étaient en route pour Oujda. Le 31, 43 personnes de ce groupe ont été conduites à la frontière algérienne.
Quinze jours après le début de ces arrestations, environ 200 personnes ont pu revenir à Oujda tandis que les associations et militants sur le terrain dans la région restent sans nouvelles d’une centaine de migrants qui ont été abandonnés à la frontière lors de la vague d’arrestations du 23 décembre ou qui étaient à bord des bus ayant quitté Lâayoune le 29 décembre. D’après les différents témoignages des migrants abandonnés à la frontière, la plupart ont été dépossédés de leurs biens (téléphones portables, argent) et beaucoup ont vu leurs documents d’identité (passeports, attestations HCR) réquisitionnés ou déchirés. Certains d’entres eux ont subi des violences et des femmes ont été victimes de séquestrations et de viols. Beaucoup sont très affaiblis physiquement, une femme d’origine congolaise, enceinte de cinq mois, a perdu son enfant.
Ces opérations ont été présentées par les autorités marocaines, comme entrant dans le cadre des conclusions de la conférence gouvernementale sur les migrations de Rabat du 10 et 11 juillet 2006. Elles se sont pourtant déroulées hors de tout cadre juridique, y compris celui prévu par la loi 02-03, et sans aucun respect ni des textes internationaux signés par le Maroc ni des principes et droits reconnus aux migrants lors de cette même conférence. Elles ne peuvent dès lors avoir pour seul objectif que de montrer la « bonne volonté » du Maroc dans le combat mené par l’Union européenne contre l’immigration dite « clandestine » quand bien même cette lutte se déroulerait sans respect de tous les textes internationaux et nationaux relatifs aux migrations.
En effet, d’après divers témoignages et les observations des militants sur le terrain :
– Les opérations d’arrestations se sont opérées « au faciès » sans examen de la situation des personnes. Les arrestations et les refoulements à la frontière algérienne ont été effectués de manière collective ce qui est contraire à la Convention sur les droits des travailleurs migrants et leur famille (art 22).
– Au moins un tiers (plus de 50) des personnes revenues à Oujda sont des réfugiés reconnus par le HCR Rabat ou des demandeurs d’asile dont la demande est en cours d’examen, d’autres étaient en possession de documents de voyage et de visa en règle, des femmes dont au moins trois enceintes et des enfants (actuellement sept enfants dont un handicapé physiquement) ont également subis le même sort. Ces arrestations violent ainsi la Convention de Genève relative au statut des réfugiés qui interdit notamment le refoulement des demandeurs d’asile et des réfugiés (art 33) et la Convention sur la protection des travailleurs migrants et leur famille toutes deux signées par le Maroc, tout comme la loi marocaine qui interdit l’expulsion des femmes enceintes, des enfants, des réfugiés et des demandeurs d’asile (art 26 et 29 de la loi 02/03).
– D’après les premières observations, les arrestations et les expulsions vers la frontière se sont déroulées en marge de toutes procédures légales (dont la présentation devant un juge) notamment celles prévues par la loi 02-03 (article 23).
– Ces refoulements que l’on peut qualifier de « clandestins », et en tout cas d’illégaux, se sont en outre déroulés vers la frontière algérienne qui est fermée depuis 1994.
Quinze jours après ces événements, la situation à Oujda, où les températures actuellement sont proches de zéro, est dramatique pour les migrants malgré l’assistance que tentent de leur apporter les militants et associations. Les ressortissants subsahariens concernés avaient pour la plupart un logement à Rabat qu’ils souhaitent pouvoir rejoindre au plus vite mais en sont empêchés, à de rares exceptions près, par les autorités et les compagnies de transport.
Nous dénonçons :
– Les graves atteintes aux droits humains perpétrées au nom de la protection des frontières extérieures de l’Europe.
– L’attitude et les pressions de l’Union européenne envers les pays frontaliers de l’Union dans le but de « sous-traiter » le contrôle de ses propres frontières et les conséquences de celles-ci à la fois sur les migrants et sur les pays de transit et d’origine.
– Le silence du HCR au Maroc, qui n’est visiblement pas en mesure d’assurer la protection effective des demandeurs d’asile et des réfugiés, et qui donc ne fait qu’entretenir l’illusion d’une protection qui, dans ces circonstances, risque uniquement de servir « d’alibi » aux politiques européennes entravant l’accès au territoire européen des demandeurs d’asile.
– Le non respect par le Maroc des droits les plus élémentaires des migrants et des réfugiés et de ses engagements internationaux en particulier ceux relatifs à la Convention de Genève relative au statut des réfugiés et la Convention sur les droits des travailleurs migrants et leurs familles.
Nous
– rendons responsables le gouvernement marocain mais aussi les gouvernements de l’Union européenne de toutes les conséquences sur la vie et la santé des migrants de ces expulsions opérées dans des conditions inhumaines sans aucune considération pour les droits de ces personnes,
– exigeons le retour immédiat de tous les expulsés à leur domicile habituel,
– demandons au HCR de mettre tous les moyens en œuvre pour la réalisation pleine et entière de son mandat de protection et de tirer les conséquences des événements actuels,
– appelons les ambassades des ressortissants subsahariennes concernés à prendre conscience de la situation et à prendre les mesures nécessaires à la protection des droits de leurs ressortissants
– demandons au gouvernement marocain le respect des textes internationaux ratifiés par le Maroc et l’arrêt immédiat de toutes actions conditionnées par les pressions européennes en matière migratoire,
– appelons l’Union européenne à stopper toutes mesures et pressions destinées à transférer le contrôle de ses propres frontières aux pays tiers de l’Union comme le Maroc.
Nous appelons à la solidarité avec les migrants expulsés et avec les associations locales qui tentent malgré leurs faibles moyens de leur venir en aide
Cette lettre ouverte est adressée :
– à la délégation européenne à Rabat, à la Commission européenne et à la Présidence de l’Union européenne
– au Premier ministre, au ministre de l’Intérieur et au ministre des Affaires étrangères marocains
– au Conseil consultatif des droits de l’homme
– à la délégation du HCR à Rabat et au siège du HCR à Genève
Signataires
ABCDS (Association Beni Znassen pour la culture, le développement et la solidarité), AFVIC (Amis et familles des victimes de l’immigration clandestine), AIDE-développement, ALCS (Association de lutte contre le Sida), AMDH (Association marocaine des droits humains), AMERM (Association marocaine d’études et de recherches sur les migrations), APDHA (Association pour les droits de l’homme en Andalousie), ARCOM (Association des réfugiés et demandeurs d’asile congolais au Maroc), Association des migrants africains en Suède, ATTAC-Maroc, ATMF (Association des travailleurs maghrébins en France), Caritas, Cimade, Collectif des réfugiés, Conseil des Migrants Subsahariens au Maroc, GADEM (Groupe anti-raciste d’accompagnement et de défense des étrangers et migrants), Gisti, Homme et environnement, Migreurop, OMDH (Organisation marocaine des droits de l’homme), Rassemblement des réfugiés ivoiriens au Maroc, Réfugiés sans frontières-Maroc.
Annexe 16 : Communiqué de presse interassociatif, 04.01.07
Halte aux rafles et déportations de migrants
Les droits humains sont les mêmes pour tous
Depuis le 23 décembre 2006, plus de 400 personnes, originaires de pays situés au Sud du Sahara, ont été raflées, à Rabat, puis Nador et Lâayoune, qu’elles disposent ou pas d’un titre de séjour, qu’elles soient ou non demandeurs d’asile ou réfugiés, hommes, enfants, femmes et femmes enceintes, handicapés…... ont été arrachées de leurs lits au petit matin, puis transportées après un bref passage au commissariat à la frontière Maroco-Algérienne près d’Oujda, sur simple délit de faciès.
Abandonnées de nuit sur une frontière officiellement fermée, polices et armées marocaines et algériennes se sont livrées sur elles à un sinistre jeu de ping-pong de part et d’autre de la frontière, n’hésitant pas à tirer afin de les dissuader de revenir vers l’un ou l’autre des deux pays.
Aujourd’hui bon nombre de ces déportés sont parvenus au prix de mille difficultés et souffrances, pour certaines femmes après plusieurs viols, à regagner la ville frontalière d’Oujda, où ils vivent –secourus tant bien que mal par quelques militants associatifs- adossés à l’enceinte du campus universitaire, dormant là par des températures nocturnes voisines de zéro. Cependant que nous restons sans nouvelles de plus d’une centaine d’entre eux.
Cette vague de déportations fait suite aux deux conférences ministérielles euro-africaines sur les migrations tenues à Rabat, puis à Tripoli au cours de ces derniers mois, qui avaient souligné l’importance de la « protection des droits de tous les migrants ». Mais au-delà des déclarations d’intention, c’est bien l’approche répressive et sécuritaire du dossier qui prime encore, et le Maroc confirme sa disponibilité à jouer les gendarmes pour une Europe tout aussi verrouillée pour ses propres ressortissants que pour ceux des autres pays africains.
Réunis au siège de l’AMDH le jeudi 4 janvier 2007, nous, représentants d’associations et simples citoyens de différentes nationalités sommes unanimes à condamner ces arrestations racistes opérées par les autorités marocaines sur simple délit de faciès et sans respect aucun ni pour la loi marocaine ni pour les Conventions et textes internationaux régissant les droits humains en général et les droits des migrants, des réfugiés et des demandeurs d’asile en particulier.
Nous nous déclarons choqués par le traitement inhumain que subissent ces personnes et par les conditions inacceptables dans lesquelles elles sont retenues contre leur gré à Oujda et interdites de rejoindre leur domicile habituel au Maroc.
Nous dénonçons les pressions permanentes de l’Union européenne envers ses voisins afin qu’ils sous-traitent le contrôle de ses frontières et son silence complice devant les graves atteintes aux droits d l’homme perpétrées au nom de cette sous-traitance.
Nous tenons pour responsables le gouvernement marocain, mais aussi les gouvernements de l’Union européenne de toutes les répercussions que ces atteintes peuvent avoir sur la santé et l’intégrité physique et morale des personnes expulsées et dénonçons l’incapacité du HCR à assurer la protection des personnes relevant de sa compétence. Une lettre ouverte sera adressée en ce sens à la Commission européenne et au gouvernement marocain ainsi qu’à toutes les organisations et institutions concernées par ce dossier.
Nous appelons à la solidarité de tous avec les victimes de ces rafles massives et exigeons le retour immédiat de tous les expulsés à leur domicile habituel et l’arrêt de toute nouvelle déportation.
ABCDS- ALCS- AMDH- ATTAC- AFVIC- ARCOM- AMERM- CRM- Conseil Migrants- Caritas- GADEM- Homme et Environnement- MDM- OMDH- RRIM- RSFMaroc.
Annexe 17 : Bibliographie générale
ETUDES, RAPPORTS ET TEMOIGNAGES (2002-2006)
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– Amnesty International-section française, « Le Maroc, l’Union Européenne et l’Espagne dans le domaine de l’asile et du contrôle des flux migratoires », octobre 2005 http://www.libertysecurity.org/img/pdf/maroc_ue_espagne_asile_et_migr._10_05.pdf
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