Les méthodes sont rodées. Des équipes de communicants préparent le terrain dans des médias bien souvent complaisants, tandis que le gouvernement se prétend ouvert au dialogue en annonçant « une vaste concertation ».
La fusion de la plupart des allocations sociales annoncée lors de la présentation du plan pauvreté est confirmée. L’allocation unique s’intitulera « Revenu universel d’activité » (RUA). Elle aurait pour objectif de simplifier les démarches, de lutter contre le non-recours aux droits qui concerne selon des études 40 % des bénéficiaires potentiels des allocations. Mais il s’agit d’une attaque supplémentaire contre des droits sociaux. Et un recul ne se négocie pas, il se combat.
« Garantir un seuil minimal de dignité »
C’était, textuellement, la prétention affichée sans honte par Macron dans son discours de présentation du plan pauvreté le 13 septembre 2018. Il précisait que le RUA était « un contrat d’engagement et de responsabilité réciproque » qui permettrait de bénéficier du « droit à l’accompagnement et l’obligation d’inscription dans un parcours d’insertion ». C’est la nouvelle définition de l’universalité qui, avant l’ère de Jupiter, signifiait le droit pour tous et toutes de bénéficier d’une prestation sans conditions particulière.
RSA, primes d’activité, allocations pour les handicapéEs, aides au logement… Les allocations sociales sont très diverses, notamment dans leurs montants. Alors qu’elles ne devraient plus « coûter un pognon de dingue », comment aboutir à une allocation unique, et attribuer une allocation universelle sans aligner leurs montants vers le bas ? Cité par le Monde, un rapport de France-stratégie (un organisme gouvernemental dépendant de Matignon), annonce un scénario qualifié « d’optimisé » et avec un barème « sous la contrainte » : la fusion de seulement huit allocations aboutirait à une baisse du revenu de 3,55 millions de ménages et à un augmentation pour 3,3 millions d’entre eux.
Or, le nombre total de pauvres calculé à partir d’un revenu inférieur à 60 % du revenu médian [1], soit 1 015 euros par mois, est de 8,9 millions en France. Si les allocations étaient attribuées réellement à tous ceux et toutes celles qui n’en bénéficient pas, le budget qui devrait leur être consacré ne devrait pas baisser mais augmenter de plus de 40 %…
L’Observatoire des inégalités a calculé, en dépouillant les données fiscales, qu’en dix ans (entre 2005 et 2015), le nombre de pauvres a augmenté d’un million, ce qui constitue, précise-t-il « un réquisitoire contre la politique violente de dérégulation et de flexibilité conduite par Emmanuel Macron ». Sans augmentation des dépenses, l’attribution des allocations à tous ceux et toutes celles qui devraient en bénéficier les réduirait à portion congrue, ou elles seraient attribuées uniquement aux personnes extrêmement pauvres. Et, risque supplémentaire, le contrôle social serait drastiquement augmenté.
Pour pour en finir avec la pauvreté, il faut se battre pour un salaire à vie qui ne doit pas être inférieur au SMIC revendiqué (1 800 euros net) et pour la réduction du temps de travail et son partage entre tous et toutes. Un combat difficile certes, mais possible dans un pays considéré comme la 6e puissance économique mondiale.
S. Bernard