Près d’un mois après la disparition de Steve Maia Caniço, à Nantes, lors d’une intervention policière controversée sur un quai le soir de la Fête de la musique, la maire de Nantes, Johanna Rolland (PS), a demandé des explications au ministre de l’intérieur, Christophe Castaner. « De nombreuses questions restent sans réponse concernant une opération policière qui s’est tenue dans notre ville. Il doit désormais y être apporté, sans délai, des explications précises et publiques », écrit l’édile dans une lettre datée du jeudi 18 juillet.
Dans la nuit du 21 au 22 juin, la Fête de la musique à Nantes s’était terminée dans la confusion : des échauffourées avaient éclaté vers 4 h 30 entre participants et policiers venus exiger l’arrêt de la musique sur le quai Wilson, un endroit sans parapet de l’île de Nantes, sur la Loire. Quatorze personnes avaient été repêchées par les secours durant la nuit après avoir chuté dans le fleuve. Steve Maia Caniço, animateur périscolaire de 24 ans, n’a plus donné signe de vie depuis cette nuit-là, peut-être tombé dans la Loire lui aussi.
Malgré plusieurs enquêtes diligentées, « à ce jour, aucune information n’a été donnée sur leur déroulement. Un mois après les faits, il faut désormais que les investigations aboutissent extrêmement rapidement », insiste la maire, soulignant que la disparition du jeune homme suscite « une vive émotion dans notre ville et au-delà ».
Quai Wilson, là où se sont déroulés les événements dans la nuit du 21 au 22 juin, les tags donnent le ton : « noyade autorisée par la préfecture », « bavures policières il faut que ça cesse », « nous voulons la vérité pour Steve ». Par petits groupes, des proches viennent régulièrement scruter le fleuve. Un rassemblement y est organisé samedi à 15 h 30 pour demander « Où est Steve ? », a annoncé l’association Média’son sur sa page Facebook.
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« Recours incessant à la violence »
« Où est Steve ? », se demandent aussi les députés de La France insoumise (LFI), qui publient tous, tout au long de la journée du vendredi 19 juillet, une vidéo sur les réseaux sociaux pour dénoncer la disparition du Nantais. On y voit par exemple Mathilde Panot, vice-présidente du groupe, tenir une pancarte « Où est Steve ? » en regardant la caméra, sur les marches de l’Assemblée nationale.
Ils annoncent vouloir déposer « la semaine prochaine, une proposition de résolution demandant l’ouverture d’une commission d’enquête parlementaire sur les opérations de dispersion », incluant « tous les députés d’autres groupes qui souhaitent s’y associer ».
Dans une tribune publiée dans Libération le même jour, 17 députés LFI dénoncent une « répression policière disproportionnée », devenue une « matrice de [la] politique » d’Emmanuel Macron. « Lors de cette nuit tragique, écrivent-ils, Steve est devenu malgré lui le visage d’une démocratie compromise, diminuée par un recours incessant à la violence. Cette brutalité est devenue le bruit de fond du macronisme et le pire serait que nous finissions par nous y habituer. »
« Eternelle figure du mépris politique que celle qui consiste à refuser de considérer son adversaire pour ses (pro) positions afin de mieux l’enfermer dans la catégorie fourre-tout de “l’agitateur”. “Gilets jaunes”, militants écologistes, professeurs, militants des quartiers populaires, teufeurs… Tous se retrouvent amalgamés par un pouvoir devenu allergique à l’opposition et qui ne leur répond plus que par la brutalité. »
Jusqu’alors, la police a contesté l’existence d’une charge des forces de l’ordre à Nantes, qui, selon elle, ont été visées par des projectiles. Interrogé sur Franceinfo vendredi, Christophe Castaner a rappelé que « le ministère de l’intérieur a demandé une enquête administrative dès le lendemain des faits et une enquête judiciaire est également en cours ». Répondant à Johanna Rolland, le ministre a déclaré : « Si la maire souhaite des explications sur l’avancée de l’enquête, elle doit s’adresser au parquet. »
Le Monde avec AFP Publié aujourd’hui à 14h55
• Le Monde Publié le 19 juillet 2019 à 14h55 :
https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/07/19/disparition-de-steve-a-nantes-la-maire-demande-des-explications-a-christophe-castaner_5491179_3224.html
Intervention policière lors de la Fête de la musique à Nantes : deux nouvelles enquêtes ouvertes
Un mois après la disparition de Steve, un jeune homme tombé dans la Loire le 21 juin, lors d’une soirée électro, à Nantes, les procédures judiciaires se multiplient.
Deux enquêtes judiciaires ont été ouvertes concernant la disparition de Steve Maia Caniço, un jeune homme tombé dans la Loire lors d’une intervention policière visant à disperser une soirée techno organisée à Nantes lors de la Fête de la musique, a annoncé le parquet, mardi 16 juillet. Lors de cette opération de maintien de l’ordre, quatorze personnes étaient tombées dans la Loire.
« J’ai reçu dix plaintes de policiers qui ont été blessés lors des événements de la Fête de la musique et qui ont déposé plainte pour des violences sur personne dépositaire de l’autorité publique, a déclaré Pierre Sennès, le procureur de la République à Nantes, à l’Agence France-Presse. Ces plaintes ont été adressées pour enquête à la police judiciaire. »
Dans la nuit du 21 au 22 juin, vers 4 h 30, des échauffourées avaient éclaté entre participants et policiers, venus exiger l’arrêt de la musique sur l’île de Nantes, près d’un quai sans parapet en bord de Loire. Une vingtaine de policiers avaient été pris pour cible de jets de projectiles, selon le chef adjoint de la direction départementale de la sécurité publique, qui avait autorité sur le service d’ordre cette nuit-là.
Aux yeux de Thierry Palermo, il s’agissait d’une « riposte qui s’inscrit dans le cadre de la loi », alors que cinq fonctionnaires avaient été blessés, dont l’un « roué de coups à terre ». De nombreux participants ont au contraire dénoncé une intervention disproportionnée, affirmant avoir été aveuglés par un nuage de gaz lacrymogène et, pris de panique, chuté dans le fleuve du haut du quai. Quatorze personnes avaient été repêchées dans la Loire par les secours durant la nuit.
Les procédures se multiplient
Une plainte collective émanant de 85 participants a été déposée le 3 juillet au parquet pour « mise en danger de la vie d’autrui et violences volontaires par personnes dépositaires de l’autorité publique ». « J’ai saisi l’IGPN [l’inspection générale de la police nationale] pour procéder à l’enquête suite à la plainte collective », a déclaré M. Sennès, précisant qu’il s’agissait d’une saisine « dans un cadre judiciaire ».
Depuis cette nuit-là, Steve Maia Caniço, animateur périscolaire de 24 ans qui participait à la fête, n’a plus donné signe de vie. Sa disparition fait l’objet d’une information judiciaire confiée à un juge d’instruction et les recherches dans la Loire se poursuivent.
Dans cette affaire où les procédures se multiplient, deux autres enquêtes sont en cours : l’une, administrative cette fois, de l’IGPN, l’autre du Défenseur des droits, pour éclaircir les circonstances de cette intervention controversée.
Le Monde avec AFP
• Le Monde. Publié le 16 juillet 2019 à 18h24 - Mis à jour le 16 juillet 2019 à 18h42 :
https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/07/16/intervention-policiere-lors-de-la-fete-de-la-musique-a-nantes-deux-nouvelles-enquetes-ouvertes_5490074_3224.html
Le Défenseur des droits ouvre une enquête après la disparition de Steve à Nantes
Steve Maia Caniço, 24 ans, n’a plus donné signe de vie depuis la nuit du 21 au 22 juin. Jacques Toubon s’est « saisi d’office » afin d’enquêter.
Plus de trois semaines après la disparition de Steve Maia Caniço à Nantes à la suite d’une intervention policière, le Défenseur des droits, Jacques Toubon, s’est « saisi d’office » afin d’enquêter, ont fait savoir, mercredi 10 juillet, ses services, confirmant une information de Loopsider.
Steve Maia Caniço, 24 ans, n’a plus donné signe de vie depuis la nuit du 21 au 22 juin, où une soirée techno à laquelle il participait sur un quai de l’île de Nantes, en bord de Loire, s’était terminée dans la confusion. Vers 4 h 30, des échauffourées avaient éclaté entre participants et policiers venus exiger l’arrêt de la musique.
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Certains participants affirment s’être retrouvés aveuglés dans un nuage de gaz lacrymogène, alors que de nombreux fêtards étaient éméchés. Un mouvement de panique a suivi et plusieurs fêtards ont chuté dans le fleuve. Quatorze personnes avaient été repêchées dans la Loire par les secours durant la nuit.
Une information judiciaire ouverte, l’IGPN saisie
« Si le Défenseur des droits a décidé de s’autosaisir avant même qu’il reçoive un signalement ou une demande d’enquête de la part des plaignants, c’est parce que cette opération a choqué », a déclaré à l’AFP Marianne Rostan, avocate qui a déposé la semaine dernière une plainte collective émanant de 85 personnes « pour mise en danger de la vie d’autrui et violences volontaires par personnes dépositaires de l’autorité publique ».
« Ce n’est pas seulement les personnes qui étaient sur place qui dénoncent les conditions de cette intervention. Il y a des associations, des députés, des autorités publiques, même des syndicats de police, qui s’élèvent pour dénoncer les conditions dans lesquelles cette intervention s’est déroulée. »
Dans cette même affaire, le parquet de Nantes a ouvert une information judiciaire sur la disparition de M. Maia Caniço et l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) a également été saisie pour enquêter sur les conditions de l’intervention policière.
• Publié le 10 juillet 2019 à 19h28 :
https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/07/10/le-defenseur-des-droits-ouvre-une-enquete-apres-la-disparition-de-steve-a-nantes_5487855_3224.html