“Finalement, le ministre de l’Énergie n’aura pas résisté à la dernière dégradation que connaît la desserte du courant électrique”, écrit le site d’information guinéen Le Djely, faisant référence à Cheick Taliby Sylla. Le ministre a été limogé par décret le mardi 12 mai au soir après des émeutes pour dénoncer les coupures d’électricité intempestives. La violence des manifestations et les affrontements avec les forces de l’ordre ont provoqué au moins sept morts dans trois villes du pays.
Dans la commune urbaine de Kamsar, ville historique de l’industrie minière située dans l’ouest du pays, “les échauffourées contre le délestage électrique ont causé la mort d’une personne, ainsi que la mise à sac du domicile privé du maire”, rapporte Guinée News.
La semaine précédente, ce sont les habitants de Kouroussa, ville du nord-est guinéen généralement acquise au président Alpha Condé, qui ont occupé la rue pour protester contre les délestages électriques – consistant en une rotation par quartiers de la fourniture d’énergie – et exigé d’avoir du courant au moins durant la nuit.
L’exaspération des populations est d’autant plus grande que le plan de riposte économique contre la pandémie de Covid-19 prévoit la gratuité de l’électricité. “Le ministre avait fini par focaliser la colère de tous les protestataires contre les récurrentes crises énergétiques, analyse Le Djely. Mais jusqu’ici il avait réussi à survivre à toutes les crises et à toutes les bourdes dont il est par ailleurs coutumier.”
Une colère exacerbée par la lutte contre la pandémie
Les mesures de confinement ont fini de décider les populations à battre le pavé. Avec un cumul de 2 298 cas confirmés et 11 décès à la date du 11 mai, le gouvernement a renforcé l’isolement de la capitale, Conakry, épicentre de l’épidémie. Les barrages à l’entrée des villes avoisinantes sont décriés. Notamment à Friguiadi, dans la préfecture de Coyah, à une cinquantaine de kilomètres de la capitale, où un nouveau barrage routier a été installé.
“Tout est parti d’une révolte de jeunes conducteurs de taxis-motos et d’autres citoyens de Friguiadi contre les agents déployés au niveau du barrage, relate le portail d’actualités Guinée Matin. Ils accusent ces agents d’empêcher les gens de circuler en se livrant à des rackets et exigent la suppression de ce barrage. Le mouvement de colère s’est rapidement propagé pour gagner le chef-lieu de la sous-préfecture de Manéyah et le centre-ville de Coyah”.
La contestation populaire a causé la mort de cinq personnes dans les échauffourées avec les forces de sécurité. À Manéyah, le poste de police et la gendarmerie territoriale ont été saccagés. Même cause et même effets à Dubréka, l’autre sortie de Conakry, qui déplore un mort.
Secouée par des tensions sociopolitiques depuis octobre 2019, la Guinée, en tête des pays francophones les plus infectés en Afrique de l’Ouest, peine à lutter efficacement contre le Covid-19. Les détracteurs du pouvoir en place l’accusent de privilégier son agenda politique au détriment du combat contre la pandémie..
Sidy Yansané
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