Le 31 août, le dirigeant vénézuélien a annoncé une amnistie pour cent prisonniers politiques et des membres de l’opposition poursuivis par la justice du pays, qui se trouvent soit en exil, soit réfugiés dans des ambassades, annonce El País.
L’opposant et président par intérim Juan Guaidó, poursuivi officiellement pour divers crimes contre l’État, ne fait pas partie des personnes amnistiées, pas davantage que Leopoldo López, l’un des principaux leaders de l’opposition, libéré par Guaidó le 30 avril 2019 lors d’une tentative de renversement du pouvoir.
L’hypothèse relevée par la presse pour expliquer le geste de Nicolás Maduro est qu’il s’agirait d’une concession faite en vue des élections législatives du 6 décembre, convoquées par le pouvoir et refusées par l’opposition de Juan Guaidó. Ces élections sont anticipées et ne présentent pas, selon le président par intérim, les garanties nécessaires de contrôle du scrutin par des observateurs internationaux.
Une “tactique astucieuse”
“C’est un piège”, ne cesse de répéter Guaidó, notamment le 18 août dernier dans une interview rapportée par Infobae : “Ce qui est prévu par la dictature est simplement d’usurper le pouvoir par la fraude, comme elle l’a fait en 2018.”
Selon El País, cette amnistie “ferait partie des négociations que le gouvernement de Maduro mènerait avec un pan de l’opposition représenté par Henrique Capriles”, candidat à la présidentielle deux fois vaincu (en 2012 et 2013, après le décès de Hugo Chávez).
“Une tactique astucieuse” de Nicolás Maduro, titre El Nacional,, destinée à légitimer une élection “controversée dans le pays et à l’étranger”.
Déchirements dans l’opposition
Car le constat le plus amer pour l’opposition centrée autour de Juan Guaidó est bien là : ces derniers jours, l’opposant essuie des revers dans l’appel au rassemblement qu’il a lancé, et qui a pour principal objectif de susciter un boycott des élections législatives anticipées, convoquées par le pouvoir pour le 6 décembre, et de proposer “une route alternative”, avec notamment de nouvelles mobilisations des Vénézuéliens dans la rue.
Le 4 août, 27 formations politiques de l’opposition, à l’Assemblée nationale, avaient rejoint le “pacte “de boycott des élections, proposé par Juan Guaidó, rapportait alors El Nacional. Mais l’accord connaît depuis lors des accrocs.
Samedi 30 août, l’une des députées les plus radicales contre le régime, María Corina Machado, annonçait qu’elle ne se ralliait pas à l’appel de Guaidó. Un peu plus tôt, Henrique Capriles avait évoqué dans un communiqué “la possibilité [qu’il] participe aux élections législatives”.
Trop d’ego
Pour El Pitazo, ces opposants réputés pour leur ego marqué font le calcul d’un pouvoir très affaibli, encore plus démantelé par la crise économique et sanitaire, perdant peu à peu les appuis qu’il a toujours entretenus moyennant finances ou avantages.
“Et dans ce contexte ils réclament au pouvoir des conditions [à leur participation aux élections] tout en sachant que, le 6 décembre, c’est le pouvoir qui va triompher dans les urnes.”
Leur stratégie, opine le site, est de “combattre sur le ring électoral [et d’être élus] pour élaborer un plan depuis l’intérieur du pouvoir et pas depuis les arcanes éloignés” de l’Assemblée nationale, certes dominée par l’opposition aujourd’hui, mais ostracisée par le régime.
“Au Venezuela, la division dans l’opposition contribue à perpétuer le régime”, épilogue Deutsche Welle dans ses colonnes en espagnol.
Selon une politologue allemande interrogée par le site, et qui connaît bien la politique vénézuélienne, cet échec de l’opposition à atteindre son but d’écarter Maduro du pouvoir est en partie dû “aux ambitions démesurées de ses membres non pas de défendre la démocratie, mais leurs intérêts personnels”.
Sabine Grandadam
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