“Pour la deuxième journée consécutive, des manifestants demandent le départ du président Abdel Fattah Al-Sissi”, rapporte le site qatari Al-Araby Al-Jadid. “De nombreux défilés se sont élancés, dans plusieurs quartiers du Caire et ailleurs dans le pays. À Gizeh, ils ont réussi de s’emparer d’un véhicule blindé, et dans un village de la Moyenne-Égypte, ils ont jeté une voiture de police dans un canal. Plus de cent soixante-dix personnes auraient été arrêtées.”
Par ailleurs, note le site, “la place Tahrir au Caire [épicentre de la révolution de 2011] a été investie par des blindés ce lundi 21 septembre, après que des gens avaient manifesté par milliers, du Caire à Alexandrie, de Minya à Sohag et Assouan.”
“On nous indique que de nombreux cafés du centre-ville du Caire ont été fermés par la police”, rapportait pour sa part le site égyptien indépendant MadaMasr la semaine dernière. “Les autorités craindraient qu’un match de foot puisse donner lieu à des débordements, et que cela pourrait se conjuguer avec des appels à manifester à l’approche du 20 septembre.”
C’est en effet la date anniversaire de manifestations qui avaient éclaté l’an dernier à l’appel de l’homme d’affaires en rupture de ban Mohamed Ali. Celui-ci, haut en couleur, fort en gueule et très controversé, a récemment refait parler de lui, en incitant les Égyptiens à descendre de nouveau dans la rue.
Mais pour l’éditorialiste égyptien en exil Waël Qandil, l’évolution récente n’a rien à voir avec “cet homme d’affaires pantin” qui est “lui-même un rejeton de la corruption du régime”. Selon son analyse publiée par Al-Araby Al-Jadid, la véritable raison de la colère des Égyptiens réside plutôt dans “la déclaration d’Abdel Fattah Al-Sissi, disant qu’il était prêt à envoyer l’armée dans les villages et quartiers populaires pour détruire les maisons construites illégalement”.
“C’est cette menace existentielle qui a soulevé les Égyptiens”, tranche l’éditorialiste. “L’homme d’affaires en a profité pour refaire parler de lui. Il appelle ça une révolution. Et le régime réagit comme s’il s’agissait de combattre un danger révolutionnaire. Or la réalité est que tout le monde est dans l’attente d’une nouvelle révolution, mais que personne ne sait encore quels contours celle-ci prendra.”
Au départ, les tensions ont en effet éclaté de manière très ponctuelle et sporadique, autour de l’épineux problème des constructions illégales. Selon des estimations officielles, “il y aurait 2,8 millions de logements illégaux”, note MadaMasr, et le pays n’a pas cessé de perdre de précieux terrains agricoles. Depuis que le gouvernement a décidé de sévir, “des bâtiments sont détruits par dizaines”, affirmait le site dès le début de septembre. Et “cela donne lieu à des échauffourées avec la police et à des centaines d’arrestations”.
Cela se passe dans un contexte de dégradation de la situation économique, avec des tensions sociales qui étaient déjà palpables durant l’été. Ainsi, pour la période de juin, juillet, août, le site égyptien Rassd note une augmentation du nombre de rassemblements, de grèves et de manifestations de salariés des secteurs privé et publique.
Courrier International
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