Le Devoir rapporte que “YouTube a expulsé l’une des figures importantes du mouvement conspirationniste francophone, Alexis Cossette-Trudel, lui reprochant d’avoir commis de ‘multiples violations au règlement de sa plate-forme vidéo’”. Google explique avoir fermé sa chaîne Radio Québec après qu’elle a annoncé “à tort l’arrivée d’un médicament pour guérir du Covid-19”.
Une semaine auparavant, Facebook fermait le compte Radio Québec et le compte personnel du conspirationniste, signale le réseau CBC, “en raison de son affiliation au mouvement conspirationniste QAnon, qui croit, entre autres, que les événements mondiaux sont contrôlés par une cabale de pédophiles sataniques”.
Qui est Alexis Cossette-Trudel ?
Fils d’anciens membres du groupe terroriste du Front de libération du Québec, Alexis Cossette-Trudel raconte lors d’un entretien accordé au Devoir qu’il s’est donné pour tâche “d’exposer les mensonges de l’État afin de lui faire perdre sa légitimité” et qu’à cette fin, il s’est tourné vers les réseaux sociaux lors de la campagne de Donald Trump en vue de la présidentielle de 2016 :
Au lieu d’écrire un texte qui va être lu par 1 000 personnes, pourquoi je ne ferais pas une vidéo qui a un potentiel de viralité beaucoup plus grand ?
Au fil du temps, M. Cossette-Trudel est devenu, dit la CBC, “le théoricien de la conspiration le plus connu au Québec”, dont les abonnés ont plus que triplé depuis le début de la pandémie, pour se chiffrer à plusieurs dizaines de milliers. Il répète sans preuve que “les dangers du Covid-19 sont exagérés dans le cadre d’un complot visant à saper le président américain Donald Trump” ou encore que “les restrictions de santé publique, telles que le port de masques à l’intérieur, sont injustifiées”. L’homme de 47 ans, ajoute La Presse, “a été régulièrement invité comme orateur lors des manifestations antimasque des dernières semaines”.
Des échos jusqu’en France
Parce qu’il a francisé le contenu de QAnon, ce théoricien du complot a contribué à l’explosion de ce mouvement conspirationniste, explique à Radio-Canada un spécialiste des cultures numériques à l’université de Paris-Diderot, Tristan Mendès France :
“Sa chaîne YouTube et ses vidéos […] ont connu une viralité qui a dépassé les frontières canadiennes et s’est vraiment injectée dans la complosphère et la fachosphère française.”
Cette interdiction de diffusion sur YouTube et Facebook aura peu d’impact à court terme, a déclaré au Devoir un expert québécois sur la radicalisation, Martin Geoffroy : “Ça va empêcher un nouveau public de le remarquer, mais il n’aura pas de difficulté à faire déplacer le public qu’il a déjà ramassé sur Vimeo ou VKontakte.”
Campagne vaine contre les conspirationnistes ?
Un porte-parole de YouTube a indiqué à la CBC que 60 canaux et 1 800 vidéos ont jusqu’ici été retirés du site en vertu de sa nouvelle politique qui cible “un individu ou un groupe avec des théories du complot qui ont été utilisées pour justifier la violence dans le monde réel”.
Cela suffira-t-il à faire taire les complotistes ? Denise Bombardier s’inquiète du phénomène dans le Journal de Montréal :
“Nous ne pouvons plus croire que les tenants des théories les plus outrancières qui circulent à travers les médias existants doivent être considérés comme quantité négligeable. Leur influence est grandissante auprès de personnes manipulables.”
Martin Gauthier
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