« Une course de nains de jardins ». En février, Olivier Besancenot dénonçait la multiplication des candidats de la gauche antilibérale. Mais les sarcasmes du candidat de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) à l’élection présidentielle n’y ont rien fait : José Bové, Marie-George Buffet, Arlette Laguiller, Gérard Schivardi lui disputent l’électorat d’extrême-gauche. Malgré ces divisions, les intentions de vote ne sont pas négligeables : « En additionnant les différents candidats, on arrive à 8,5 %. C’est un peu moins qu’en 2002, où l’on atteignait les 10 %, mais cela reste très élevé », relève Brice Teinturier, directeur du département Politique et Opinion de TNS-Sofres.
A onze jour du premier tour, le candidat de la LCR semble avoir une longueur d’avance sur ses camarades. « On le voit émerger depuis quelques semaines, dans une zone entre 4% et 5% des intentions de vote. Alors que Buffet, Laguiller ou Bové sont plutôt autour de 2%, et que Schivardi stagne à 0,5% », explique le sondeur. La LCR commence à rêver de voir son candidat dépasser son score de 2002 (4,25 %).
« Dans la jeunesse, il y a quelque chose qui se passe, assure François Sabado, membre du bureau politique de la LCR. Il y a une identification, c’est sûr. Dans les meetings, il y a une grosse majorité de jeunes. » C’est un des atouts d’Olivier Besancenot : à 32 ans, il est le plus jeune des candidats en lice. « On note un soutien plus fort chez les moins de 35 ans », confirme TNS-Sofres. « En 2004, pour les régionales, il y avait aussi beaucoup de jeunes dans les meetings et finalement on a fait un score minable », tempère Eric, militant à Lyon, qui aurait préféré une candidature antilibérale unitaire.
Autre atout supposé du candidat de la Ligue : son statut de « travailleur » – il est salarié de La Poste. « Ce n’est pas de la démagogie, affirme Luc, membre de la LCR en Val-de-Marne. Les gens voient bien qu’Olivier se lève tous les matins à cinq heures pour bosser ». Dans ce registre, Olivier Besancenot marche sur les plates bandes de LO et de sa candidate Arlette Laguiller. Pour Brice Teinturier, « la clé de cette campagne c’est la demande de renouvellement. Et à ce titre, le discours de Besancenot fonctionne mieux que celui de Laguiller ».
« Besancenot est bon, c’est vrai, mais Bové fait des progrès, argumente Cédric Durand, du comité de campagne du candidat altermondialiste. Dans les banlieues, il y a un vrai écho, et le discours de José sur les discriminations commence à être entendu ». Pour revenir dans la course, ses soutiens le poussent à apparaître comme le plus unitaire et à appeler, entre les deux tours, à une initative commune avec les autres candidats antilibéraux. Une idée relancée aussi par Besancenot, au grand dam des partisans de José Bové qui reprochent à la LCR d’avoir fait échouer leur projet de candidature unitaire... La nouvelle posture du leader de la Ligue n’a pas échappé à Michel Onfray, l’un des premiers à soutenir la candidature Bové. Sur son blog, le philosophe affirme qu’il saura se souvenir, « dans l’isoloir », de ce changement d’attitude d’Olivier Besancenot [voir : Je n’oublierai pas ce geste d’Olivier Besancenot. Y compris dans l’isoloir.
Au Parti socialiste, on fait mine de ne pas s’intéresser à cette « course à l’échalotte » à la gauche de la gauche. Mais une partie de l’équipe de campagne de Ségolène Royal s’inquiète. « On préférerait que la campagne réussisse un peu mieux à de futurs alliés pour un gouvernement, comme Marie-George Buffet [PCF] ou Dominique Voynet [Verts], plutôt qu’à ceux qui ne soutiendront Royal que du bout des lèvres », s’énerve un député socialiste.
Pour l’heure, le candidat de la LCR clame son refus de participer à un gouvernement avec le PS, considéré comme « social-libéral ». Fin mars, il appelait ses camarades « anticapitalistes » à former « une opposition politique crédible en cas de victoire de la gauche molle ». Une manière de tacler Marie-George Buffet. « Elle est trop identifiée à la gauche plurielle [l’alliance PS-PCF-Verts formée par Lionel Jospin entre 1997 et 2002], souligne François Sabado. Quand elle dit il faut sauver la gauche , les gens se disent autant voter Royal directement ... ».
Alors que la candidate du Parti communiste et José Bové ont d’ores et déjà fait savoir qu’ils appelleraient à voter pour Ségolène Royal si elle va au deuxième tour, la LCR réserve sa réponse au soir du premier tour. Tout en affirmant qu’elle « n’a jamais fait la politique du pire ».