Un gigantesque volonté de liberté et de démocratie s’était exprimée en 2019 à Hong Kong.
Pour le pouvoir, l’heure est actuellement à la revanche et à l’alignement de la population sur les normes en vigueur sur le continent chinois. Les nouvelles règles électorales promulguées le 30 mars visent à parachever l’élimination de toute forme de contre-pouvoir.
Un pouvoir exécutif de type colonial
Du temps de la colonisation, le gouverneur britannique détenait l’intégralité du pouvoir exécutif.
Après 1997, celui-ci est transféré à un « Exécutif hongkongais » totalement aux ordres du régime de Pékin. Le mode de désignation au poste de Chef-fe de l’Exécutif promulgué le 30 mars rend encore plus limpide l’absence d’autonomie de la « Région autonome spéciale de Hong Kong ».
Un pouvoir législatif totalement aux ordres
Fondé en 1843, le Conseil législatif (LegCo) avait pour seule fonction d’assister le gouverneur colonial. Jusqu’en 1985, il était intégralement composé à cet effet de membres directement nommés par le pouvoir britannique.
En 1991, le droit d’élire au suffrage universel direct 30 % des membres de cette institution est octroyé à la population hongkonkaise. Sur le fond, rien ne change : les autres sièges sont en effet attribués selon un dispositif d’une grande complexité permettant de continuer à en faire très majoritairement bénéficier des partisanEs du pouvoir de Londres puis de Pékin.
Le pourcentage de législateurs/trices éluEs au suffrage universel est ensuite progressivement augmenté pour atteindre 50 % en 2004, puis 57 % en 2012 si on y ajoute les cinquante députéEs désormais éluEs au suffrage indirect.
Suite aux mobilisations de 2019, le spectre de perdre le contrôle de l’Assemblée législative (LegCo) hante le pouvoir. Lors des élections locales du 24 novembre 2019, l’opposition a en effet remporté 86 % des sièges avec 57 % des voix. Si cet exploit de l’opposition se renouvelait lors des élections législative initialement prévues le 6 septembre 2020, celle-ci se retrouverait majoritaire au Conseil législatif.
Pour empêcher cela, le pouvoir de Pékin a reporté au dernier moment ces élections. Il vient de mettre un terme durable à une telle possibilité en s’octroyant, le 30 mars 2021, le droit :
1) d’écarter toute candidature ne lui convenant pas, quelque soit le type de scrutin,
2) de faire passer de 57 % à 22 % le pourcentage de députéEs relevant du suffrage universel.
Après avoir constitué entre 1991 et 2020 une tribune pour l’opposition, le Conseil législatif, a repris la fonction qui avait été la sienne pendant 154 ans auprès de la monarchie britannique, cette fois-ci au service du régime de Pékin.
Un pouvoir judiciaire domestiqué
Une des particularités de Hong Kong était l’existence de la liberté d’expression et d’organisation, ainsi que le respect de règles juridiques n’existant pas en Chine continentale.
Depuis la promulgation le 30 juin 2020 de la loi sur la « sécurité nationale », tout cela est en grande partie remis en cause : il est désormais possible de tenir des procès à huis clos, de prononcer des peines pouvant aller jusqu’à la prison à vie, de transférer toutE suspectE sur le continent pour y être jugéE et emprisonnéE, de licencier des fonctionnaires pour délit d’opinion, de restreindre la liberté de la presse, etc.
Une répression féroce
– Au 31 janvier, le nombre d’opposantEs faisant l’objet de poursuites judiciaires est supérieur à 2 300 (pour une population 9 fois plus faible que celle de la France ! ). Des procès sont d’ores et déjà programmés jusqu’en 2023 ;
– Une grande partie des représentantEs de premier plan de toutes les nuances de l’opposition sont emprisonnéEs, en liberté sous caution ou en exil. Des responsables syndicaux sont, par exemple, derrière les barreaux comme la présidente de la centrale syndicale HKCTU, ainsi que la présidente du syndicat HAEA du personnel du secteur hospitalier public. Quant au secrétaire général de la centrale HKCTU, il est sous le coup de procès en cascade ;
– Le niveau d’organisation des opposantEs connait un recul sensible : pour éviter les poursuites un certain nombre d’organisations se sont auto-dissoutes et la coalition ayant organisé les grandes manifestations de 2019 est en train de se disloquer.
Face à cette situation, la solidarité est plus que jamais indispensable avec les victimes de la répression, à Hong Kong ou partiEs en exil.