Quels étaient les objectifs de cette « mission » et comment a-t-elle été reçue sur place ?
Cette mission, composée de 11 femmes de plusieurs cantons romands, fait suite à la première « mission femmes » en Cisjordanie en octobre 2004. Nous nous sommes fixé plusieurs objectifs : d’une part, retourner à Tulkarem pour rencontrer l’association de femmes palestiniennes dont nous avons soutenu un projet suite à notre visite en 2004 ; d’autre part, nous voulions, par des rencontres avec des femmes et associations de femmes palestiniennes, mieux comprendre la situation politique actuelle suite à la victoire du Hamas aux élections législatives ; nous voulions aussi approfondir le thème de la violence contre les femmes, et recueillir des témoignages d’ex-prisonnières. Sur place, nous avons été accueillies chaleureusement par les femmes palestiniennes ; le fait d’être un groupe exclusivement composé de femmes nous a permis d’entrer plus facilement en contact avec elles, notamment pour aborder certains sujets délicats comme les violences ou les mauvais traitements en prison.
Quels changements avez-vous constatés dans la situation en Cisjordanie depuis votre précédente mission en 2004 ?
Malheureusement, nous avons pu constater la progression du « grignotage » des territoires palestiniens par la construction du Mur ainsi que par l’extension des colonies. En outre, nous avons remarqué que les check-points de l’armée israélienne dans les territoires occupés avaient été agrandis, reconstruits « en dur » et « modernisés », ce qui démontre bien qu’actuellement Israël n’a aucune intention de se retirer des territoires qu’il occupe illégalement depuis 1967. Sur le plan économique, l’étranglement de la population palestinienne s’est aggravé en raison du boycott de l’Union européenne et des USA qui ont suspendu leur aide économique à l’Autorité palestinienne depuis la victoire du Hamas aux dernières élections ; ceci est ressenti à juste titre par les Palestinien-ne-s (y compris ceux et celles qui n’ont pas voté pour le Hamas !) comme une punition collective injustifiée. Cependant, malgré l’aggravation de la situation, les militant-e-s palestinien-ne-s que nous avons rencontrés ne baissent pas les bras, mais continuent à résister et à lutter avec un courage et une énergie remarquables.
Dans le contexte de lutte contre l’occupation israélienne, y a-t-il la place pour que les femmes palestiniennes puissent faire valoir leurs revendications propres ?
Les femmes palestiniennes sont les principales victimes de l’occupation ; elles la subissent à la fois directement (par exemple lorsqu’elles sont fouillées et humiliées aux check-points, emprisonnées et maltraitées en prison, qu’elles ne peuvent plus se rendre à l’Université ou dans leurs champs à cause des blocages et du Mur, etc.), et aussi indirectement (par exemple lorsque leurs maris, frères, fils sont emprisonnés ou tués, ou qu’elles subissent la violence intrafamiliale due à la promiscuité, au chômage des hommes, au désespoir, etc.) Dans ce contexte, les femmes palestiniennes sont en première ligne dans la résistance quotidienne contre l’occupation, et elles doivent en même temps se battre contre certains aspects de leur culture traditionnelle patriarcale, par exemple pour avoir le droit de sortir de chez elles afin de pouvoir travailler, étudier, voter, manifester, etc. Il n’y a donc à mon avis aucune contradiction entre la lutte contre l’occupation et la lutte des femmes pour améliorer leur condition.