“Si vous ne pouvez pas élever votre enfant, mais l’avez mis au monde ou êtes enceinte, ne le tuez pas, accouchez et donnez-le nous, donnez-le à l’Église, nous ferons tout pour l’élever et l’éduquer.” - Cyrille, Patriarche de Moscou et de toute la Russie
C’est ce à quoi le patriarche de Moscou Cyrille a exhorté les femmes russes lors du Xe Congrès ecclésial pour le service social, qui s’est tenu du 13 au 15 mai à Moscou. Il soulevait ainsi la “douloureuse question de l’avortement, contre lequel le patriarcat de Moscou se bat depuis plusieurs décennies”, relate le quotidien Nezavissimaïa Gazeta.
“Nous sommes un grand pays, nous avons besoin d’être plus nombreux. Et il n’y a pas de moyen plus efficace pour influer sur la démographie que de réduire drastiquement le nombre d’avortements”, a expliqué le chef de l’Église orthodoxe de Russie, avant d’ajouter : “Nous n’empêcherons jamais une mère de rendre visite à son enfant, de sentir l’unité qu’elle forme avec lui. Au contraire nous ferons tout pour que votre famille se consolide ; même incomplète, elle a de la valeur aux yeux de Dieu et de notre patrie”.
Le quotidien de centre gauche n’apprécie pas particulièrement l’appel du patriarche. Il relève que dans son allocution Cyrille n’a donné aucune indication concrète quant au sort des bébés, et se montre suspicieux : “Où seront expédiés les enfants et comment seront-ils élevés ? Le patriarche ne le dit pas.”
Selon le journal, parmi les nombreux établissements de bienfaisance gérés par l’Église, il n’y a que 30 orphelinats dans tout le pays, et sont classés comme tels des lieux comme “la famille nombreuse de l’archiprêtre Nikolaï Stremski”, actuellement en procès pour agression sexuelle et autres abus à l’encontre de onze enfants. Le fait que neuf d’entre eux aient pu trouver une place dans des établissements gérés par l’État semble être un soulagement pour le quotidien.
Elena Loutkovskaïa, psychologue au département synodal des œuvres caritatives, interrogée par le quotidien Gazeta.ru, évalue à 20, et non à 30, le nombre d’institutions du patriarcat recueillant des enfants. Il ne s’agit pas d’orphelinats, mais de “refuges, de centres de réhabilitation, de pensions, dans lesquelles se trouvent non pas des orphelins mais des enfants dont les parents ne peuvent plus s’occuper, ou des enfants infirmes”. Au nord de Moscou, le refuge Pavline, créé en 1999 sous la tutelle de l’église Mitrophane de Voronej, recueille des garçons à partir de 3 ans seulement et jusqu’à 18 ans.
L’Église pas favorable aux mères porteuses non plus
Le patriarche de toutes les Russies veut encourager au repeuplement la Fédération, mais pas à n’importe quel prix. Comme le rapporte l’agence Ria-Novosti, le 18 mai il a rappelé que l’Église orthodoxe n’était pas favorable à la gestation pour autrui, dont le recours est autorisé en Russie selon un éventail de conditions assez large. Il a surtout dénoncé l’utilisation de mères porteuses russes par des parents étrangers. Ainsi a-t-il demandé à la Douma de limiter le recours aux mères porteuses en Russie et de l’interdire purement et simplement pour les étrangers.
Selon Euronews, le recours aux mères porteuses en Russie est en hausse constante depuis 1995. Le Centre européen de la gestation pour autrui de Moscou évalue à 22 000 par an le nombre d’enfants nés par mère porteuse en Russie, et à 20 % par an l’augmentation de la demande pour cette procédure.
Selon le site russe Statistiques et indicateurs, en 2018 environ 600 000 avortements ont été pratiqués en Russie. Un chiffre en baisse continue depuis 2005, mais qui maintient le pays dans le haut du classement des États où l’interruption volontaire de grossesse est autorisée.
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