Selon CNN, Framatome (actionnaire à 30 % de la centrale et fournisseur des combustibles nucléaires) a requis le 8 juin l’assistance du département de l’Énergie étatsunien pour « une menace radiologique imminente ». EDF a demandé une réunion extraordinaire du conseil d’administration de la centrale pour qu’il « présente toutes les données et décisions nécessaires ». Tandis que son partenaire chinois CGN juge la radioactivité « pas anormale », Framatome appelle au secours l’administration Biden, pour laquelle il n’y a « pas de risque de sécurité sévère pour les employés de la centrale ou pour la population chinoise ».
Méfiance généralisée, communiqués flous et rassurants de la troïka de l’électronucléaire (USA, Chine, France) : un concentré d’opacité au mépris des populations.
Un enfumage dangereux
Sous pression, CGN a dû finalement avouer une hausse de la radioactivité due à « environ cinq gaines [1] de combustibles endommagées ». Quand elles ne sont pas étanches, le circuit primaire est contaminé ; les gaz radioactifs sont alors évacués à l’extérieur.
Selon les normes internationales, les seuils atteints imposaient l’arrêt immédiat, pour remplacer les gaines « ruptées » et surtout connaître les causes de l’incident (défaut, corrosion, détérioration par une pièce métallique, montée en puissance trop rapide ?). Mais pour laisser fonctionner le réacteur, les autorités chinoises ont relevé le seuil autorisé des radiations.
Cette décision n’est pas sans rapport avec les cérémonies du centenaire du PC chinois, le 1er juillet, à la gloire de la clique au pouvoir, sur fond de productivisme-extractivisme débridé. En 2020, avec moins de réacteurs, la production électronucléaire chinoise a dépassé celle de la France.
L’urgence énergétique, c’est sans l’EPR
Empathique envers les autorités chinoises, hier accusées de désinformation sur le covid, le gouvernement Macron souhaite « ne pas avoir de réflexion sur notre politique énergétique en réaction à un fait qui se passe » (Pompili, ministre de la Transition écologique). L’Autorité de sûreté du nucléaire (ASN) propose à l’autorité de sûreté chinoise de voir « dans quelle mesure le retour d’expérience de la situation d’exploitation actuelle à Taishan peut être pris en compte dans le cadre […] de la demande de mise en service de l’EPR de Flamanville ».
Celle-ci est prévue en 2023 : 11 ans de retard, un coût multiplié par quatre… avec une cuve défectueuse. Le lobby nucléaire s’inquiète d’abord, non pas des risques d’accident, dont Taishan est peut-être un évènement précurseur, mais des risques juridiques et du fiasco commercial qui se précise. La construction annoncée par Macron, fin 2020, de six EPR, vitrine de l’électronucléaire tricolore, a du plomb dans l’aile.
La seule décision réaliste serait l’arrêt de ce programme mortifère qui dilapide les fonds publics, et sa reconversion vers la sobriété énergétique et les renouvelables.
Commission nationale écologie du NPA