“Je peux comprendre les homosexuels, les lesbiennes et ainsi de suite. Mais savez-vous qui je ne comprends pas du tout ? Ce sont ces transgenres…”, a déclaré le président tchèque, Milos Zeman, dimanche 27 juin, lors d’une interview sur CNN Prima News, la chaîne d’information en continu de CNN en République tchèque.
Invité à s’exprimer sur la loi adoptée récemment en Hongrie qui interdit la représentation de l’homosexualité auprès des mineurs, Zeman ne s’est pas fait prier pour livrer le fond de sa pensée :
“Si vous subissez une intervention pour changer de sexe, vous commettez essentiellement un crime d’automutilation. Chaque intervention est un risque et ces personnes transgenres sont pour moi profondément dégoûtantes.”
Les Tchèques ont beau être habitués aux provocations de leur chef d’État, qui, lors de l’entretien, a tout mélangé en se disant aussi “très agacé par les suffragettes, #MeToo et la Prague Pride”, nombreux sont ceux qui estiment néanmoins que, cette fois, une ligne rouge a été franchie.
“Tombé encore plus bas que terre”
“Milos Zeman n’avait jamais fait de déclarations aussi répugnantes”, s’offusque ainsi, ce lundi, le quotidien Hospodárské Noviny :
“Avec lui, on ne peut jamais savoir s’il a touché le fond. Mais après ce week-end, on peut affirmer qu’il est tombé encore plus bas que terre, qu’il a atteint un record de profondeur. Et ce tant d’un point de vue humain que politique.”
Le quotidien indépendant Deník N publie, lui, une réaction d’une femme transgenre, Pavie Valsa, créatrice sur YouTube d’un talk-show intitulé V Tranzu (En transe) :
“Imaginez que vous ayez 18 ans et que vos parents viennent de vous mettre à la porte. Toute votre vie vous avez combattu les démons dans votre tête, jusqu’à ce que vous finissiez par découvrir la nature de votre problème et par comprendre pourquoi vous n’avez plus de chez-vous. Vous avez été la risée de l’école. Vous n’avez pas choisi votre destin, mais vous avez enfin trouvé la voie difficile et épineuse pour être heureux dans la vie. Et puis, un beau jour, le chef de l’État apparaît à la télévision et clame que les personnes comme vous sont ‘profondément dégoûtantes’…”
Le journal en ligne Forum 24 va plus loin encore en affirmant que “Zeman est un pauvre type”. Plus globalement, dans une République tchèque souvent considérée comme un des pays les plus athées et progressistes en Europe centrale et de l’Est, beaucoup regrettent aussi que le Premier ministre, Andrej Babis, n’ait pas joint sa signature, en fin de semaine dernière, à celles des dirigeants des dix-sept pays membres de l’UE qui ont appelé Viktor Orbán à respecter les valeurs européennes. “Aux yeux du monde, nous sommes devenus un pays sans valeurs”, conclut Deník N.
Guillaume Narguet
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