Appel de SIAWI / Secularism Is A Women’s Issue (La laicité est l’ affaire des femmes) contre les résolutions onusiennes 61/164 et A/HRC/4/2.12 sur la ’diffamation des religions’
La laicité, c’est à dire la séparation du religieux et du politique, a, depuis son instauration, périodiquement subi les assauts de l’Eglise catholique et des forces politiques ultra conservatrices en Europe, et même en France.
Au cours des deux dernières décennies, ce sont les intégristes musulmans qui ont relancé la lutte contre la laicité et qui multiplient les stratégies au niveau national, européen, et international.
Il s’agit ni plus ni moins de faire évoluer le concept de laicité , dans lequel l’état ne s’occupe tout simplement pas des cultes sauf pour en garantir la liberté d’exercice , pour obliger l’état à assurer l’égale représentation politique des religions.
La défense de la laicité est ainsi redevenue d’une brulante actualité. L’espace laïque ne cesse de se rétrécir et dans bien des pays il n’est plus concevable de se passer d’ identité religieuse, et ce d’autant plus que l’on appartient à la population issue de l’émigration.
Les intégristes musulmans s’ appuient sur les notions de droit des minorités, droits religieux, droits culturels pour exiger un droit d’ingérence des cultures et des religions confondues, dans les affaires de l’état. Ils sont passés maitres dans la manipulation des concepts des droits humains.
Nombreuses ont été les tentatives récentes pour que des lois religieuses (par définition immuables, inchangeables et imposées au nom de dieu à des populations présupposées croyantes ) prennent le pas sur la loi commune ( par definition votée, c’est à dire changeable par la volonté du peuple).
Ainsi le Canada n’a dû qu’à la mobilisation nationale et internationale des femmes de résister à l’instauration de cours d’arbitrage religieux dans les affaires familiales (2006). De même, la France n’a dû qu’à une grande résistance populaire et en particulier des femmes de ne pas fléchir sur l’interdiction des signes religieux à l’école (2005). Mais pendant ce temps une juge allemande applique ce qu’elle croit être la ’charia’ dans un cas de divorce (avril 2007) et l’Angleterre laisse s’installer des cours de justice ’traditionnelles’ qui remplacent dans certains cas la justice légale du royaume (2007).
Notons au passage que ces tentatives nuisaient principalement aux femmes, fait de nature à inciter les gouvernements, toujours prêts à brader les droits des femmes pour la paix sociale, à mieux les tolérer. Jusqu’à accepter de considérer que les droits, chèrement acquis par les femmes et reflétés dans les lois des pays, pourraient ne pas s’appliquer à certaines catégories de citoyennes, au nom de leur appartenance ethnique ( le pays d’origine de leurs parents ou grand parents) ou de leur supposée appartenance religieuse. Celles ci seraient alors exclues du système démocratique et figées dans une ’nature’ étrangère, exclues de fait de la citoyenneté.
Notons également sans surprise que les autorités religieuses catholiques et juives ont soutenu les efforts des intégristes musulmans. Au cours de la décennie 90, les femmes avaient déjà subi leur sainte alliance contre les droits reproductifs à la Conférence Mondiale des Nations Unies sur la Population et le Développement au Caire et à la Conférence Mondiale sur les Femmes à Pékin.
L’affaire a pris un nouveau tournant lors que les mêmes forces politico-religieuses s’attaquent à la liberté d’expression et passent au niveau international. Les femmes n’étant plus seules menacées, on peut espérer que d’autres forces se joindront à elles, même fort tardivement, pour soutenir le principe de totale laicité des Etats.
Diverses pressions avaient déjà été faites pour que le concept de ’blasphème’ soit introduit dans le language de la Constitution Européenne ; c’est maintenant au niveau des Nations Unies et du Conseil des Droits Humains que les pays de l’Organisation de la Conférence Islamique, conformément aux stratégies définies lors de leur réunion à La Mecque en Décembre 2006, poursuivent leur action.
Soutenus par plusieurs pays catholiques, leurs efforts de lobbying ont porté leurs fruits. Ils viennent d’obtenir de l’ONU et du Conseil des Droits Humains qu’ils incorporent dans leurs résolutions [1] des injonctions pressantes aux Etats pour que ceux ci prennent des ’mesures énergiques’ pour ’interdire la diffusion d’idées et de documents .../... diffamant les religions’. Sera considérée comme diffamation ’ toute action contre les religions, les prophètes et les croyances’. Les Etats sont appelés à modifier en ce sens ’les Constitutions, les lois et les systèmes d’éducation’.
Ironie suprème, c’est au nom des droits humains que ces mesures sont prises.
Une fois de plus nous constatons l’amalgame idéologique fait entre la protection des individus contre le racisme, la discrimination, la marginalisation et l’intolérance, et la légitimation des forces les plus réactionnaires des mondes religieux. Certes les « musulmans » ou supposés tels doivent être protégés contre le premier fléau, mais tout autant contre le le deuxième qui les forcerait à respecter des règles non choisies par eux, et toute la communauté internationale à garder le silence, au nom du respect des croyances, devant cette atteinte à leur libre arbitre.
L’expérience des pays musulmans sous la botte de l’extrème droite religieuse a montré que les droits à la liberté de conscience, de pensée, de mouvement, d’expression, etc... ne sont précisement pas respectés au nom même des droits religieux. Et que c’est également au nom des droits religieux et culturels que les organisations internationales des droits humains y compris la Commission des Droits Humains de l’ONU s’abstiennent alors de les défendre.
L’expérience dans ces pays a également montré que les citoyens se voyaient dénier le droit de définir lui même sa religion et sa culture et que les formes les plus dommageables pour les droits humains leur étaient alors imposées.
Un autre amalgame est fait entre des forces politico-religieuses d’extrème droite qui se prétendent attaquées dés lors qu’on ne les suit plus dans toutes leurs interprétations et toutes leurs dérives, - et la religion elle même ; s’opposer aux intégristes est assimilé à attaquer la religion même dont ils se réclament, que ce soit le Christianisme, l’Islam ou autre - et nous en avons de nombreux exemples récents.
Il est donc criminel pour l’ONU et le Conseil des Droits Humains de soutenir une telle manipulation des concepts des droits humains.
Nous appelons toutes les forces de liberté à prendre conscience de la gravité de la situation et en particulier les femmes qui sont les premières cibles du recul de la laicité.
Le Haut Commissariat aux Droits Humains (voir ci dessous) appelle les ONG à suggérer des initiatives adéquates à la mise en œuvre de ces résolutions. Nul doute que les intégristes de tous bords s’engouffreront les premiers dans la brèche pour appuyer les lois liberticides. Nous appelons les ONG et les individus à ne pas leur laisser occuper le terrain et à prendre clairement position auprès du Haut Commissariat.
Au delà, nous appelons à une vigilance accrue et à des regroupements citoyens dans chacun de nos pays, pour faire barrage aux changements dans ’les constitutions, les lois et les systèmes d’éducation’ qui mettraient fin à la laicité, c’est à dire à l’identité citoyenne au profit de l’identité communautaire.
SIAWI
5 mai 2007
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Invitation du Haut Commissariat aux Droits Humains aux ONG pour contribuer à la mise en œuvre de la résolution ’ Combattre la diffamation des religions"
(traduit de l’anglais par Siawi :)
de la part de : Marie-Dominique Perret [mailto:mperret ohchr.org]
envoyé le mardi 1er Mai, 2007 6:19 AM
Objet : Invitation à contribution
Le Bureau du Haut Commissaire aux Droits Humains présente ses compliments aux organsatioins n on gouvernementales et a l’honneur de faire référence à la résolution 61/164 de l’Assemblée Générale en date du 19 décembre 2006, « Combattre la diffamation des religions », qui demande au Secrétaire Général de soumettre un rapport sur la mise en œuvre de la résolution de l’Asemblée Générale lors de sa soixante deuxième session.
Les organisations non gouvernementales sont invitées à adresser à la section anti discrimination leurs contributions à ce rapport, quant aux initiatives de dialogue global à prendre pour promouvoir une culture de tolérance et de paix basé sur le respect des droits humains et de la diversité religieuse, et ce avant le 13 Juillet 2007. Toutes les contributions doivent être adressées à Mme Marie Dominique Perret (fax + 41 22 92 890 50 or e-mail : mperret ohchr.org ).
Le Bureau du Haut Commissaire aux Droits Humains saisit cette occasion d’assurer les organisations non gouvernementales de sa très haute considération
1er Mai 2007