Facebook était au courant des contenus anti-musulmans propagés par certains groupes ultranationalistes. C’est ce qu’expose le site d’information en ligne The Wire, à partir des documents remis par la lanceuse d’alerte Frances Haugen à la Securities and Exchange Commission américaine (SEC), équivalent de l’Autorité des marchés financiers française.
“Les documents internes de l’entreprise cités par Haugen et ses avocats sont liés par un thème commun, à savoir que les responsables de Facebook sont conscients des facteurs structurels qui provoquent la propagation du discours de haine sur leur plateforme”, écrit The Wire, avant de donner plusieurs exemples propres à l’Inde.
Messages déshumanisants
Un document interne non daté et intitulé “Réseaux nuisibles - Étude de cas sur l’Inde” montre que “l’entreprise est bien consciente des contenus antimusulmans” et des discours de propagande visant à diffuser la peur “promus par des groupes et des utilisateurs pro-RSS”. RSS étant le sigle de “Rashtriya Swayamsevak Sangh”, ce groupe ultranationaliste hindou qui est aussi la matrice idéologique du Bharatiya Janata Party (BJP), le parti du Premier ministre indien, Narendra Modi.
“Les récits antimusulmans ciblaient les populations prohindoues avec une intention [violente et incendiaire]. De nombreux messages étaient déshumanisants, comparant les musulmans à des ‘cochons’ et des ‘chiens’, et [comprenant] des informations erronées affirmant que le Coran appelle les hommes à violer les membres féminins de leur famille”, poursuit The Wire, citant le document interne en question.
Armée de trolls
Facebook est également accusé de manquer de compétences pour traquer ce type de contenus dans les langues locales, notamment en hindi et en bengali. “Le document cité par les avocats de Haugen n’est pas daté […] et ne permet pas de savoir clairement si ce problème persiste”, précise The Wire, qui rappelle que, ces dernières années, Facebook a affirmé surveiller les discours de haine en hindi, bengali, ourdou et tamoul.
“Un autre document interne de l’entreprise, intitulé ‘Lotus Mahal’, est cité pour affirmer que les responsables de Facebook sont bien conscients de la façon dont la cellule informatique du BJP” utilise de multiples comptes pour ses campagnes. La cellule informatique du BJP a de nombreuse fois été pointée du doigt en Inde pour avoir recours à une armée de trolls sur les réseaux sociaux.
Anuj Srivas
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