Ne pouvant plus travailler librement à cause de la loi sur la sécurité nationale, l’ONG de défense des droits humains a annoncé ce lundi qu’elle allait fermer son bureau local dès dimanche, et son bureau régional à la fin de l’année.
« La loi sur la sécurité nationale à Hongkong a rendu impossible pour les organisations de défense des droits humains de travailler librement et sans craindre de graves représailles du gouvernement, c’est valable pour Amnesty aussi. C’est avec le cœur lourd que nous fermons nos bureaux », a annoncé ce lundi matin sur Twitter la secrétaire générale de l’ONG, Agnès Callamard.
« Des jours difficiles s’annoncent pour les droits humains à Hongkong, mais Amnesty International restera aux côtés des Hongkongais. Nous nous battrons pour que leurs droits soient respectés et nous ferons preuve de vigilance en surveillant ceux qui les bafouent. »
Après quarante ans de présence sur l’archipel de 7,2 millions d’habitants, sous domination britannique puis sous le régime « un pays, deux systèmes » décrété lors de la rétrocession à la Chine, en 1997, Amnesty International va fermer ses deux bureaux.
– Dans le bureau local, les cartons seront bouclés dimanche.
– Le bureau régional, qui fait des recherches et des campagnes sur une vingtaine de pays, dont la Chine continentale, le Japon, l’Australie ou la Corée du Nord, se donne jusqu’à la fin du mois de décembre pour déménager ses activités dans d’autres pays de la région.
Isolement inquiétant
L’imposition de la loi sur la sécurité nationale par Pékin, le 1er juillet 2020, a marqué la fin de la semi-autonomie de Hongkong, et ouvert une sombre période d’arrestations arbitraires sous couvert des vagues accusations de « nuisances publiques », « incitation à la subversion », « refus de coopérer avec une enquête de police » et autres « atteintes à la sécurité nationale », assorties de lourdes peines de prison.
Plus d’une soixantaine d’ONG, syndicats, partis politiques, associations, journaux ont fermé leurs bureaux ou se sont dissous ces derniers mois, sous les coups de boutoir de la répression de toute voix dissidente.
Pour l’ONG aux 10 millions d’adhérents, poids lourd mondial de la défense des droits humains principalement financée par des dons privés, rester à Hongkong signifiait mettre en danger sa trentaine d’employés, mais aussi ses sources et ses témoins, la loi l’obligeant désormais à fournir aux autorités les informations personnelles de ses membres, adhérents ou donneurs.
Par ailleurs, le seul fait d’être une organisation internationale est suffisant pour que ses dirigeants locaux se trouvent du jour au lendemain sous la menace d’une accusation de « collusion avec des forces étrangères », passible de prison à vie.
Ce départ marque l’isolement de plus en plus inquiétant de l’archipel. En quelques mois, la place financière mondiale, îlot de prospérité et de liberté, est devenue un Etat policier, où avocats, chercheurs, journalistes ou militants démocratiques sont raflés à l’aube par des escouades armées.
Chaque jour, les membres les plus dynamiques de la société civile, accusés de crimes aussi graves que vagues, quittent le territoire et mettent le cap sur l’Europe ou Taiwan, nouveau refuge chinois démocratique.
A la répression policière s’ajoute une politique de « zéro Covid » surréaliste, avec des quarantaines de vingt-et-un jours imposées à tout arrivant même vacciné et négatif aux tests, qui entravent les déplacements et fragilisent également les milieux d’affaires.
Ce lundi, l’Asia Securities Industry and Financial Markets Association (Asifma), la principale association du secteur financier local, a averti le ministre des Finances de Hongkong que « le statut de Hongkong en tant que centre financier international est de plus en plus menacé ».
Selon l’Asifma, près de la moitié de ses sociétés membres envisageaient de déplacer à l’étranger une partie de leurs activités et de leurs employés, pris en étau entre les menaces policières et les mesures sanitaires.