Le Drian symbolise la continuité de la politique de la France en matière d’intervention militaire en Afrique. Il a initié sous Hollande l’opération Serval au Mali puis son extension sur la partie occidentale du Sahel avec l’opération Barkhane. Il gère désormais sa déroute sous l’ère Macron. Une politique militaire désastreuse à plus d’un titre. Elle a entériné la partition du nord du Mali en empêchant le retour de l’État à Kidal. Elle s’est alliée aux différentes milices armées progouvernementales et a fermé les yeux sur les atteintes aux droits humains dont se sont rendus coupables différentes armées nationales au Sahel. Elle s’est défaussée de ses propres bavures. Enfin elle n’a eu de cesse d’empêcher les négociations entre les autorités et les groupes rebelles ouvrant la possibilité d’une solution au conflit. Les seules négociations acceptées l’ont été pour… libérer les otages français.
Quant au rapport Duclert sur l’implication française dans le génocide des Tutsis au Rwanda, il a l’avantage de contenter les deux parties : le président rwandais Paul Kagame, en pointant les responsabilités de la France, et Macron, en évitant de parler de complicité de l’État français qui aurait pu déboucher sur des suites judiciaires pour les responsables de cette politique. Ainsi Kagame, en disgrâce dans le monde anglo-saxon pour ses nombreuses violations des droits humains, se rapproche de Macron qui peut se targuer d’avoir soldé cette crise.
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Business et dictature
Au niveau économique, Macron de manière unilatérale a annoncé des réformes du Franc CFA sans prévenir ses pairs africains à l’exception du président ivoirien Ouattara qui lui a servi de caution africaine. Ces changements permettent surtout de saper la mise en place d’une monnaie commune à l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest.
Macron a déclaré que les pays riches doivent arrêter d’investir dans les industries polluantes, et fait exactement le contraire en Ouganda et en Tanzanie avec le projet pétrolier qui provoque des fortes mobilisations mais aussi au Mozambique. Avec la découverte d’une réserve de gaz offshore dans ce pays, la diplomatie économique française joue à fond sa partition pour que la multinationale Total puisse se tailler la part du lion.
Sous la mandature Macron, toutes les fraudes électorales et les changements de constitution des dictatures africaines ont été avalisées. Par exemple, lors des élections en République Démocratique du Congo, Le Drian a accepté la magouille de Kabila pour faire de Tshisekedi le président au détriment du véritable vainqueur Martin Fayulu. Le Quai d’Orsay considérait cela comme « une espèce de compromis à l’africaine » insultant ainsi les dizaines de milliers de manifestantEs qui se sont battus et ont risqué leur vie pour des élections libres. Macron s’est déplacé en personne au Tchad pour soutenir la prise de pouvoir du fils du dictateur Déby. Ce dernier, fidèle à son père, a réprimé dans le sang une manifestation à Ebéché dans l’est du pays, provoquant la mort de plus d’une dizaine de personnes.
Le ras-le-bol de la politique française
Déjà en 2020, une note confidentielle du Centre d’analyse et prospective stratégique (CAPS) rattaché au ministère des Affaires étrangères alertait sur la césure entre la jeunesse africaine et ses gouvernements. Dans ses recommandations cette note invitait les autorités françaises à diversifier ses relations. Eviter un tête-à-tête avec les élites africaines corrompues et dictatoriales pour s’ouvrir vers la société civile, les responsables religieux ou même la diaspora. C’est précisément ce qu’a tenté de faire Macron avec le sommet Afrique-France de Montpellier. De toute évidence, cette entreprise de marketing n’a convaincu personne puisque, quelques semaines plus tard, un convoi de Barkhane était pris pour cible au Burkina Faso et au Niger occasionnant la mort de trois manifestants vraisemblablement tués par les soldats français.
Avec une telle politique, il est probable que les dictateurs, les corrompus, les affairistes et autres pollueurs en Afrique, ont bien compris que le slogan de campagne s’adressait à eux : « Emmanuel Macron avec vous ».
Paul Martial