Cette vision ancrée sur la lutte de libération nationale et sociale du peuple ukrainien et remontant à l’ordre mondial impose d’abord la survie d’un peuple dans la dignité. Donc de se lier à lui, d’écouter ce qu’expriment les acteurs et actrices des secteurs stratégiques de la survie et résistance du pays : des transports ferroviaires et publics aux hôpitaux, des associations d’aide aux personnes déplacées à la lutte contre les discriminations que la guerre accentue (Rroms, LGBTQI+, etc.)… Le site du réseau mettra les liens concrets facilitant les jumelages, les convois et les rencontres combinant aide concrète et luttes pour des droits.
Il faut rompre avec le comportement qui prétend protéger ce peuple de la guerre à sa place et sans lui, en exigeant « la paix » tout en niant son existence – exactement comme le voulait Poutine. Les liens directs que nous avons établis visent aussi à résister aux terribles guerres de propagande, autres dimensions de la guerre en cours. Le site de notre réseau, les vidéos issues des entretiens réalisés, les groupes de travail thématiques et argumentaires permettront de concrétiser l’exigence d’un point de vue indépendant de tout gouvernement – ukrainien, russe ou occidental. Les avancées récentes sont bel et bien venues de la population ukrainienne – pas des choix des grandes puissances. Mais rien n’est assuré dans l’avenir.
La résolution préparée par Sotsialnyi Rukh l’exprime :
« Le 24 février 2022, l’impérialisme russe a lancé une agression contre l’Ukraine. […] Alors que nombre de politiciens à l’Ouest comme en Russie pronostiquaient que l’Ukraine tomberait en peu de jours, la grande mobilisation du peuple ukrainien dans toutes les sphères de la vie et le combat héroïque de la résistance ukrainienne montrent à quel point cette vision était erronée. Pourtant, de nombreux pays européens continuent de financer la machine de guerre russe en achetant du pétrole et du gaz russes.
Dans le même temps, le peuple ukrainien est lésé par les réformes adoptées dans l’intérêt des plus riches, avant et même pendant la guerre. Ces décisions politiques ont pour effet de déplacer le fardeau de la guerre sur la majorité de la population. Les exemples sont la réduction des garanties des droits du travail pour les employés et la réduction des impôts pour les propriétaires d’entreprise. Ces changements s’accompagnent d’un démantèlement croissant de la sphère sociale, qui crée des conditions insupportables pour les Ukrainiens touchés par la guerre.
[…] À quelles conditions et à quel coût la reconstruction aura lieu après la guerre, c’est une question urgente. Une reconstruction fondée sur la primauté de la politique néolibérale conduirait à une pauvreté encore plus grande et à une oligarchie encore plus forte. La restauration complète de l’Ukraine et de son rôle dans la fourniture de biens de base aux populations les plus défavorisées du monde est impossible sans changer le cours de la politique socio-économique aux niveaux national et mondial. La réponse à l’agression russe doit être la solidarité des peuples du monde ».
Outre la lutte pour l’abolition de la dette ukrainienne exigée par nos camarades, trois axes particuliers doivent se construire : d’une part, à partir des sanctions envers la Russie poutinienne, l’exigence d’un infléchissement radical de la lutte pour accélérer les politiques de transition sociale et environnementale ; d’autre part les enjeux multiples du réseau féministe – impliquant des féministes ukrainiennes, polonaises et russes. Cet axe intègre l’action concrète d’aide aux réfugiéEs et la lutte pour le droit à l’avortement et contre le trafic des femmes et des enfants. Enfin la poursuite et convergence de divers projets et liens syndicaux internationaux [3]. Tous ces axes sont complexes et soulèvent les défis majeurs auxquels nos camarades ukrainienNEs se confrontent. Aidons-les. Nous avons récemment lancé une cagnotte afin de les soutenir [4]. Le collectif français du réseau ainsi que ses groupes de travail sont prêts à vous accueillir pour construire un internationalisme par en bas.
Catherine Samary