Créée en 1993 en tant qu’organisation non gouvernementale, la Labour Education Foundation est une initiative de dirigeants syndicaux renommés, de militants des droits de l’homme et des droits de la femme, dont le but est d’organiser, de former et de défendre les droits des travailleurs et de fournir des informations aux syndicats et à diverses organisations de la société civile pour promouvoir les droits des travailleurs.
LEF a consacré des ressources considérables pour soutenir et permettre aux travailleur.es des secteurs formel et informel de s’organiser, de développer leurs connaissances, de revendiquer leurs droits et de transformer les relations de pouvoir inégales.
La mission de LEF en faveur d’une société démocratique, progressive, juste, pacifique et développée où la classe ouvrière - hommes, femmes et jeunes - a le pouvoir de revendiquer et de protéger ses droits sociaux, économiques et politiques, a bénéficié du soutien constant de l’ESSF au fil des ans.
Le travail de LEF pour des groupes de travailleur.es, de femmes et de jeunes conscient.es, informé.es et sensibilisé.es aux questions de genre, qui remettent en question la situation existante dans le cadre de mouvements visant à garantir l’émancipation économique, l’égalité des sexes, la promotion des droits constitutionnels, légaux et du travail, l’éradication de la violence et le travail pour une société démocratique et dénucléarisée, a été renforcé par ESSF.
Au cours de la période 2020/2021, l’un des principaux domaines d’action soutenu par ESSF a consisté à aider et à renforcer le travail du Pakistan Brick Kiln Workers Union Punjab [dans la briquèterie] . Le syndicat s’occupe des cas de servitude pour dettes, de l’augmentation des salaires et de la libération politique et sociale des travailleur.es des fours à briques, l’une des sections les plus exploitées de la société pakistanaise.
L’un des thèmes abordés au cours de la période allant de janvier à décembre 2021 était « Renforcer les droits des travailleur.es des fours à briques pour lutter contre le travail forcé ». Ce travail, soutenu par d’autres organisations internationales, a également reçu le soutien d’ESSF. Au cours de cette campagne, plusieurs activités ont été organisées comme des ateliers, des séminaires, des sessions de formation, des réunions de renforcement des capacités, l’inscription des travailleurs à la sécurité sociale et l’aide à l’obtention de cartes d’identité nationales.
Bien que les femmes travaillent à égalité avec les hommes dans les fours à briques, seul le nom des hommes est inscrit sur le registre (livre des salaires). Mais après avoir assisté à des sessions sur l’égalité des sexes et leurs droits légaux, les femmes cheffes de famille dans les briqueteries ont demandé que leur nom soit inscrit sur le livre des salaires afin de recevoir elles-mêmes leur salaire. En conséquence, les employeurs ont accepté leur demande.
Un autre résultat est que 118 nouveaux membres ont rejoint le syndicat et que le nombre de membres du Pakistan Bhatta Mazdoor Union est passé de 7950 à 8068 au cours de la période considérée.
Un autre domaine de travail de LEF a consisté à donner des moyens d’action aux défenseurs des droits de l’homme dans différents syndicats et organisations communautaires, par le biais de formations de renforcement des capacités. Grâce à ce type de formations, les travailleurs ont développé leurs liens avec d’autres syndicats et organisations de la société civile. Le secrétaire général du syndicat Bhatta a été nommé membre du comité sur le travail en situation de servitude constitué par la Haute Cour d’Islamabad avec d’autres hauts fonctionnaires, ce qui a permis à la Haute Cour d’Islamabad d’interdire toute forme de travail en servitude dans toute la capitale.
La Labour Education Foundation a fourni un soutien juridique aux militants politiques, sociaux et syndicaux. Certains des meilleurs avocats du Pakistan se sont volontairement engagés pour présenter les cas des travailleurs pour l’augmentation des salaires, les droits syndicaux et contre le travail en servitude.
- Sessions de renforcement des compétences
Au total, 10 séances d’orientation ont été organisées au cours de la période considérée dans sept districts du Punjab. Au total, 657 travailleurs, dont 243 femmes, ont participé à ces sessions. Les sujets abordés étaient la législation du travail et les droits des travailleurs, le travail en servitude, l’esclavage moderne, le syndicalisme, la santé et la sécurité au travail, la constitution d’équipes, les stratégies d’organisation et l’égalité des sexes. Ces sessions ont été animées par d’éminents militant.es des droits de l’Homme du Pakistan.
- Consultation provinciale sur le travail forcé :
La réunion préparatoire avec les responsables de l’Association des propriétaires de fours à briques du Pakistan et les représentants du PBMU s’est tenue le 17 décembre 2021 à Lahore, où les deux parties ont convenu de travailler ensemble sur leurs problèmes fondamentaux comme la fourniture d’équipements de base dans les fours.
Une consultation provinciale sur le travail forcé a eu lieu le 23 décembre 2021 à l’hôtel Falettis de Lahore. Des membres du syndicat des travailleur.es des fours à briques des districts de Toba Tek Singh, Lahore, Sheikhupura, Vehari, Khanewal, Multan, Bhakhar, Mandi Bahaudin, Gujrat et Sheikhupura ont participé à cette consultation. Des membres de syndicats, d’organisations de la société civile, de l’association des propriétaires de briqueteries et de services gouvernementaux ont également pris part à l’initiative. Les travailleurs des briqueteries, les propriétaires et les départements concernés ont soutenu la demande de l’Union de garantir la fourniture d’eau potable, de toilettes, d’installations sanitaires de base ainsi que de premiers soins et d’éducation pour les enfants des familles des briqueteries.
Le secrétaire général de la Pakistan Bhatta Mazdoor Union, M. Muhammad Shabbir, a remis les demandes écrites au vice-président de la Brick Kiln Owners Association Pakistan, M. Malik Bashir, afin qu’il prenne les mesures nécessaires. Les demandes de mise en œuvre des taux de salaire minimum selon la notification du gouvernement et l’enregistrement des travailleur.es dans les institutions de sécurité sociale et de prestations de vieillesse ont été reportées pour être réglées par des négociations futures. Concernant le processus de calcul du salaire minimum, le syndicat et l’association des employeurs ont convenu de rencontrer le gouvernement conjointement pour une meilleure représentation des deux parties.
- Rallye du 1er mai :
En raison de la pandémie de COVID 19 et du confinement annoncé d’avril à juin, il n’a pas été possible de célébrer la Journée internationale du travail en présentiel ; un webinaire a donc été organisé. Plus de 100 travailleur.es et représentant.es d’organisations de la société civile y ont participé. Lors de ce webinaire, la situation actuelle des travailleur.es, en particulier la situation post-pandémique, a été discutée et des suggestions ont été faites pour les plans d’action.
- Contribution au bulletin d’information mensuel :
Les activités du projet ont été publiées dans le bulletin d’information mensuel de la LEF, qui est une bonne source de diffusion des informations et des connaissances à un grand nombre de travailleur.es. La lettre d’information est envoyée à de nombreux syndicats, institutions gouvernementales et organisations de la société civile (la lettre d’information est distribuée à environ 3000 organisations et individus et est également téléchargée sur le site Internet de LEF).
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La propagation du Covid-19 au Pakistan et dans le monde entier a aggravé la situation financière des travailleur.es. Un certain nombre d’entreprises locales et d’entreprises exportatrices du secteur de l’habillement, qui fabriquent pour des marques européennes et américaines, ont illégalement licencié leurs travailleur.es pendant la pandémie. Par exemple, Nishat Apparel, propriété de Mian Mansha, sans doute l’homme le plus riche du Pakistan, a licencié neuf cents travailleur.es au début de la crise, sous prétexte que l’entreprise ne disposait pas de ressources suffisantes pour prendre soin de ses employé.es.
Le gouvernement a lancé en avril le programme d’aide financière d’urgence Ehsas (soins) afin de fournir une aide financière de 12 000 roupies pakistanaises (75 dollars) chacune à quelque 12 millions de familles touchées par la crise du coronavirus. Mais les critères de candidature et de sélection dans le cadre de ce programme étaient très compliqués et la majorité des travailleur.es qui ont perdu leur emploi n’ont pas bénéficié de cette aide.
Le Workers Welfare Board, à la suite d’une enquête sur la corruption au sein de l’institution, a cessé de payer les bourses d’études des enfants des travailleur.es, les allocations de mariage et les allocations de décès. Cela a entraîné de nombreuses pertes pour les travailleur.es et leurs familles. Différents syndicats ont organisé des protestations contre cette politique de la WWB consistant à arrêter le paiement des travailleur.es. Le problème n’est toujours pas résolu et les travailleur.es continuent à protester périodiquement. LEF a aidé les travailleur.es et les militant.es syndicaux à faire valoir leurs droits annoncés par le gouvernement. Il a également aidé les travailleur.es à faire campagne contre les pertes d’emploi et à organiser des manifestations et des rassemblements dans plusieurs districts.
LEF a également aidé le mouvement des jeunes du Pakistan à demander la levée de l’interdiction des syndicats d’étudiants. LEF a amené les travailleuses à participer à la marche Aurat à l’occasion de la Journée internationale de la femme. Des centaines de femmes participent désormais à la marche Aurat (des femmes). Une nouvelle couche de jeunes militantes est apparue, des organisations comme LEF sont en première ligne pour relier les femmes de la classe ouvrière à celles de la classe moyenne et organiser des manifestations communes lors de cette journée.
Dans l’ensemble, la LEF a atteint les objectifs qu’elle s’était fixée. Elle a réalisé toutes les activités prévues pour l’année. Les sessions d’orientation, qui ont été menées via Zoom, sont restées très efficaces. Cependant, elles n’ont pas pu remplacer les activités en présentiel, car la plupart des travailleuses n’avaient pas de téléphones Android et vivaient dans des zones reculées ; par conséquent, le signal Internet restait faible pendant les sessions. Les formations de renforcement des compétences ont aidé les travailleur.es à comprendre la législation du travail, ce qui s’est traduit par une lutte pour les droits. La formation sur le développement de liens avec le marché pour les HBW leur a permis de développer des liens avec le marché. Environ 65% des femmes ont développé leurs liens avec le marché, mais en raison de la pandémie de Covid-19 et de la fermeture des marchés, elles n’ont pas pu maintenir ces liens. La formation par le biais des médias sociaux a été l’une des meilleures formations (partagée par les dirigeants syndicaux) pour défendre leur lutte pour les droits. De nombreux participant.es à la formation aux médias sociaux sont devenus plus actifs sur Facebook et YouTube après la formation.
Les syndicats qui ont participé aux ateliers de formation ont lancé des initiatives de plaidoyer concernant les taux de salaire auprès des services gouvernementaux et ont également réussi à obtenir une augmentation des taux de salaire après des négociations avec les employeurs.
Le soutien d’ESSF à LEF s’est avéré essentiel pour élever la conscience sociopolitique de la classe ouvrière au Pakistan. Nous espérons poursuivre cette coopération pour l’année 2021/2022 et dans les années à venir.
Longue vie à l’unité et à la solidarité sans frontières des travailleurs !
Khalid Mahmood
Directeur
Labour Education Foundation