Mardi 3 juillet, une compagnie de CRS a procédé à l’expulsion des travailleurs sans papiers du parking du Buffalo Grill de Viry-Chatillon (Essonne), qu’ils occupaient depuis le 29 mai pour exiger leur régularisation. Cette intervention fait suite à la décision du juge des référés du tribunal de grande instance (TGI) d’Évry, qui apporte ainsi son soutien au fonds d’investissement Colonby-Capital, propriétaire de la chaîne de restaurants.
Pourtant, la direction est entièrement responsable de la situation scandaleuse de ces travailleurs, elle est bien mal placée pour invoquer « le trouble » qu’occasionnerait leur lutte. Dans un premier temps, elle les avait obligés à quitter le restaurant qu’ils occupaient. Puis, elle a envoyé cinq fourgons et un camion équipé d’une minigrue, sous le prétexte de tailler les haies et d’entretenir les arbustes. Sur la dizaine de « jardiniers » présents, une moitié, de drôles de jardiniers, a cherché à enlever drapeaux et banderoles, misant sur l’intimidation. Devant la réaction des sans-papiers et la solidarité qui s’organisait, les « jardiniers » se sont retirés.
L’intimidation et le coup de force ayant échoué, la direction de Buffalo a assigné les grévistes au TGI pour occupation illégale du parking. Elle a aussi déposé plainte pour diffamation contre Raymond Chauveau, militant CGT et soutien de la lutte. Masquant ses responsabilités dans l’embauche préméditée de sans-papiers exploitables sans limites, la direction de Buffalo Grill prend l’offensive. Il est pourtant établi que la direction n’a nullement été « abusée », contrairement à ce qu’elle affirme. Cette pratique tend d’ailleurs à se répandre, comme l’ont démontré les luttes chez Modeluxe, Métal Couleur, Paris Store, Cooperl, OSP... Nul besoin de la police pour en finir avec le « trouble » inacceptable que constitueraient de telles pratiques. Il suffit de régulariser la situation de ces travailleurs.
Correspondant
* Paru dans Rouge n° 2213 du 5 juillet 2007.
Buffalo Grill : une cinquantaine de sans-papiers en grève
Depuis le 29 mai, des travailleurs sans papiers, licenciés par Buffalo Grill, sont en grève et occupent une partie du restaurant Buffalo Grill de Viry-Chatillon (Essonne).
Ils sont cuisiniers, grillardins ou hommes toutes mains (HTM) et travaillent depuis des mois, pour certains des années, dans neuf des douze restaurants Buffalo Grill de l’Essonne. Ils exigent leur régularisation et sont soutenus par l’union départementale CGT et le Collectif pour la régularisation des familles de Viry-Chatillon. Tous ont des feuilles de paye et payent des impôts.
À la suite, semble-t-il, de contrôles de police, la chaîne a décidé de se débarrasser d’eux en engageant des procédures de licenciement ou en les contraignant à démissionner sous la menace de les dénoncer. Ils ont alors décidé de réagir collectivement.
Comme toujours, la direction de Buffalo Grill prétend avoir été flouée et dit qu’elle n’était au courant de rien alors que, de toute évidence, sa politique est un système organisé qui lui permet d’embaucher des travailleurs sans papiers dont elle peut faire ce qu’elle veut. Elle peut ainsi imposer un grand nombre d’heures supplémentaires non payées et des journées interminables, l’obligation de se plier aux volontés des directions, la suppression des pauses, le doublement et, parfois même, le triplement du poste de travail... Et quand les ouvriers se rebellent, on menace de les dénoncer à la police. Aujourd’hui, la direction de la chaîne, qui compte 300 restaurants et em¬ploie 6 200 salariés, fait comme si elle n’était au courant de rien et se débarrasse de travailleurs qu’elle remet, de fait, entre les mains de la police.
Depuis le 29 mai, d’autres sans-papiers, salariés à Buffalo Grill dans d’autres départements, les ont rejoints. Ils sont aujourd’hui 64 à être engagés dans la lutte. Le 8 juin, ils défilaient en tête de la manifestation interprofessionnelle appelée, à Évry, par la CGT, la FSU, Solidaires, la CFDT, l’Unef et l’UNSA, derrière une banderole de l’union départementale exigeant la « Régularisation des sans-papiers employés à Buffalo ». À la fin du cortège, manifestaient ceux qui occupent l’Église Saint-Paul de Massy (Essonne).
Le même jour, la direction du groupe a décidé de fermer le restaurant de Viry-Chatillon, invoquant des tensions avec les clients. C’est un pur mensonge, le restaurant continue de fonctionner. Les grévistes campent maintenant sur le parking. Ils n’entendent pas baisser les bras et veulent être régularisés pour continuer de travailler dans des conditions décentes, sans avoir constamment la peur au ventre. Une pétition circule largement. La direction se dit prête à rembaucher ceux qui seraient régularisés et rejette la responsabilité sur le préfet. Le parquet d’Évry a ouvert une enquête préliminaire. Chacun brouille ainsi les cartes pour mettre en accusation leurs victimes, les sans-papiers.
Mais la victoire, en novembre 2006, des 22 ouvriers sans papiers de Modeluxe, blanchisserie industrielle de Chilly-Mazarin, qui avaient obtenu leur régularisation en occupant l’usine avec le soutien de leurs camarades de travail, est dans les têtes [[lire Rouge n° 2179, du 3 novembre 2006. Sur ESSF : Immigration : les mobilisations payent ). Il faut obliger la préfecture et la direction de la chaîne à prendre leur responsabilité en mettant fin à ce système abject qui abuse de la détresse d’hommes obligés de fuir la misère de leur pays.
* Paru dans Rouge n° 2210 du 14 juin 2007.