Dans le cadre des manifestations mondiales pour le climat appelées par Fridays fur Futur de Greta Thunberg, dont de 25 à 30 mille ont défilé à Berlin [1], environ cinq mille — mon décompte du début de la marche basé sur un défilé durant dix minutes au rythme de 500 à la minute — dont surtout des jeunes aux études ont marché dans les rues de Montréal [2]. Le chiffre de quinze mille avancé par les organisateurs m’apparaît nettement soufflé. Quelques autres milliers ont aussi marché dans une douzaine d’autres villes du Québec en particulier la Ville de Québec. Ces manifestations avaient lieu sur un fond de grève de 24 heures pour le climat de 15 000 travailleuses et travailleurs, essentiellement des professeur-e-s de cégeps et des étudiant-e-s employé-e-s, et près de 146 000 étudiant-e-s d’universités et de cégeps.
On peut penser que toute modeste soit-elle, cette grève-manifestation climatique signifie le début d’une remobilisation. La participation syndicale a dépassé le plancher de 2019 qui était de 10 syndicats et 5000 membres et qui avait été atteint de justesse. Cette énorme manifestation avec Greta Thunberg, qui avait rassemblé jusqu’au Premier ministre Justin Trudeau avec le mot d’ordre « Tous et toutes ensemble pour la planète », avait après coup été critiqué par son principal animateur, François Geoffroy, comme il l’était pour celle de ce 23 septembre : « ‘’On n’osait même pas dire qu’on était contre les politiciens au pouvoir. On les invitait à marcher avec nous. On était totalement incapables de nommer un adversaire. On était là parce qu’on aimait la planète. Cette manifestation illustre notre peur de combattre les responsables de la catastrophe climatique. C’était à la limite une caricature à ce niveau-là’’, pense-t-il aujourd’hui. » [3].
Lors du rassemblement de Montréal, les jeunes étudiant-e-s n’ont pas craint cette fois de chasser à coups de paroles bien senties et bien corsées la délégation caquiste présidée par son ministre de l’Environnement. Il était assez sidérant d’entendre sur le coup le porte-parole Solidaire les blâmer en dénonçant comme inacceptable « la violence, l’intimidation et les menaces à l’intégrité des personnes » comme si la démission caquiste face à la lutte climatique n’était pas justement cela particulièrement vis-à-vis les jeunes générations. Heureusement, le porte-parole s’est repris plus tard en disant que « la ligne n’a pas été franchie » et « qu’il « comprenait » la réaction des manifestants » [4].
L’opportunisme électoraliste des Solidaires et du PQ en désaccord avec la revendication principale
La critique la plus percutante envers les Solidaires (et le PQ) est venue de François Geoffroy interviewé par Radio-Canada : « Le PQ et QS ont présenté des plans approuvés par les experts mais pour les manifestants ce n’est pas assez : ‘’Même ces deux partis-là ne vont pas assez loin. Notre revendication est une sortie complète du pétrole et du gaz’’ d’ici 2030... » (Entrevue dans l’article cité ci-haut : Manifestations pour le climat au Canada et dans le monde). La grève-manifestation organisée par les Travailleuses et travailleurs pour la justice climatique, La Planète s’invite au parlement, la Coalition étudiante pour un virage environnemental et social – CEVES, Le Front étudiant d’action climatique, anciennement « Arrêtons GNL » et le Mouvement d’éducation populaire et d’action communautaire du Québec – MÉPACQ prône « une sortie complète des énergies fossiles d’ici 2030, ainsi que la taxation de la richesse pour un réinvestissement dans les services publics et les programmes sociaux. »
Faut-il se surprendre de la retenue revendicative de Québec solidaire et de sa valse-hésitation quand on a constaté les même pas de danse en rond au « débat des chefs 2022 » de Radio-Canada en vue des élections du 3 octobre quand a été abordé la thématique de la privatisation en éducation et en santé. Le porte-parole Solidaire a eu beau déploré les inégalités de chance entre l’école privée et celle publique quant à la fréquentation de l’université, il n’a pas mentionné la suppression du financement public des écoles privées malgré qu’il ait été interpelé pour ce faire par l’animateur du débat. En santé, il n’a pas repris la balle au bond du chef Conservateur qui dénonçait un système de santé privé pour les riches car ce dernier n’est pas financé par le gouvernement. Il fallait montrer que le financement public de la santé privée voulu en tout ou en partie par la CAQ, par les Libéraux et par les Conservateurs serait de facto bonifié par des tarifs supérieurs et des frais supplémentaires ce qui transformerait le financement public du privé en subventions aux riches tout comme ce l’est pour les écoles privées. À la réplique du Premier ministre au sujet des opérations par les cliniques privés pour désengorger le système public lors de la pandémie, il fallait rétorquer que ces cliniques privées pour riches auraient dû avoir été intégrées au système public dès le point de départ ce qui aurait évité tout engorgement.
Marc Bonhomme, 25 septembre 2022
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