Le 25 mars a eu lieu à Sainte-Soline une manifestation qui avait pour objectif de dénoncer l’appropriation de l’eau par une minorité d’exploitants agricoles au détriment des autres, paysans, habitant·es, milieux naturels. Ces militantes et militants, qui étaient 30 000 selon l’organisation, sont nos adhérent·es et nos sympathisant·es engagé·es dans la vie associative et syndicale pour plus de justice sociale et environnementale, que l’on retrouve également dans le mouvement contre la réforme des retraites. Des élu·es et des habitant·es préoccupé·es par l’assèchement du Marais poitevin, comme des conséquences visibles du réchauffement climatique, étaient également à leurs côtés.
Plusieurs témoins, dont des observateurs et observatrices de la Ligue des Droits de l’Homme, mais aussi des journalistes, des député·es, ont rapporté une violence sans précédent contre les manifestant·es. Parmi elles et eux, 200 personnes blessées ont été dénombrées dont certaines encore entre la vie et la mort, et de nombreuses autres avec de lourdes séquelles, tant physiques que psychologiques. Trois jours après le rassemblement, M. Darmanin entend ajouter à la violence policière la violence administrative en engageant la dissolution des Soulèvements de la Terre, co-organisatrice de la manifestation de Sainte-Soline contre les « méga-bassines ».
La violence de la répression policière qui s’abat sur les militant·es écologistes, comme sur les opposant·es à la réforme des retraites, est la continuité d’une politique qui restreint délibérément les libertés associatives et syndicales pour museler les voix discordantes, par tous les moyens. A chaque sanction, administrative, policière ou judiciaire, nous observons le même mécanisme : les représentant·es du pouvoir cherchent à disqualifier et criminaliser les militant·es et les organisations en ayant recours à des discours mensongers et l’utilisation de termes diffamatoires. Les termes « écoterroristes » ou « factieux » ont été employés récemment pour justifier les répressions les plus féroces. Mais qui pensent-ils et elles encore duper ?
Les cibles récentes de dissolutions administratives, décidées par le ministère de l’Intérieur et validées d’un décret du Président de la République, ont été aussi nombreuses récemment que l’usage du 49-3. Leurs cibles tendent à s’étendre à l’ensemble du spectre politique, à commencer par les associations de défense des droits des personnes musulmanes et de lutte contre les discriminations, celles qui s’opposent à l’extrême droite, celles de solidarité internationale avec les peuples opprimés et désormais les associations et mouvements écologistes. Ces dissolutions ont été rendues plus simples et plus expéditives depuis la loi confortant le respect des principes de la République, dite « loi séparatisme ».
Cette loi promulguée en août 2021, sous un prétexte sécuritaire et « anti-terroriste », est en réalité une loi gravement attentatoire aux libertés associatives dans leur ensemble. Ces libertés sont celles d’expression, de manifestation, de réunion et d’opinion sans lesquelles la liberté d’association, pilier républicain depuis 1901, serait une coquille vide.
Tous les prétextes sont bons pour retirer leurs moyens d’agir aux associations
La « loi séparatisme » a aussi mis en place le Contrat d’engagement républicain qui permet aujourd’hui de menacer, autant que de sanctionner réellement, des associations qui organisent des actions de désobéissance civile ou participent à des manifestations. Ce contrat cible également les associations qui ont le tort d’inclure trop de personnes issues des minorités comme récemment l’association Femmes sans frontières, basée à Creil. Ses conséquences que nous observons sont la perte de financement ou d’agrément pour agir en justice, la censure et l’ostracisation, le refus d’accès aux équipements publics comme par exemple des salles de réunion…
Désormais tous les prétextes sont bons pour retirer leurs moyens d’agir aux associations qui s’opposent aux orientations gouvernementales, tant à l’échelle nationale que locale. Les collectivités qui ne partagent pas ces orientations répressives sont aussi la cible de préfet·es empressé·es d’obéir à un État de plus en plus centralisé et autoritaire.
Le gouvernement pense pouvoir ainsi dissuader et neutraliser l’élan militant et politique qui anime des millions de personnes engagées dans la vie associative et syndicale. Mais il ne parviendra pas à dissoudre cet élan collectif pour plus de justice sociale et environnementale. Un mouvement qui se donne comme objectif de changer radicalement ce système qui aujourd’hui produit des discriminations, des violences, nourrit les inégalités, maintient les privilèges et repose sur l’arbitraire. Un système qui mortifie les corps et cherche à traumatiser les esprits, tant au travail que dans la rue ou dans les champs désormais, et qui menace partout sur cette Terre la vie dans son ensemble. Comme les soulèvements de la Terre, que nous soutenons, ont pu l’affirmer : « nous sommes bien curieux.ses de voir ce que représenterait la « dissolution » d’une coalition qui regroupe des dizaines de collectifs locaux, fermes, sections syndicales, ONGs à travers le pays. »
Nous sommes convaincu·es que les syndicats et les associations, qui animent quotidiennement une vie citoyenne riche et nécessaire au débat démocratique, sont, n’en déplaise au gouvernement, légitimes à s’exprimer sur l’avenir de notre société et à y participer pleinement.
Premiers signataires :
Action droit des musulmans, Sihem Zine, directrice
Action Non-Violente COP21 (ANV-COP21), Thibaut Godin, porte-parole
Alofa Tuvalu, Gilliane Le Gallic, présidente
Alternatiba, Emma Tosini, porte-parole
Alternatives agroécologiques et solidaires (SOL), Jacques Godard paysan et co président
Anafé, Alexandre Moreau, Président
Association les Allumeuses, Marie-Laure Guislain, déléguée générale
Association pour l’emploi sans carbone, Armel Prieur, président
Association France Palestine Solidarité, Gérard Larose, Sécrétaire général
Attac France, Youlie Yamamoto, porte-parole
Le Centre d’études et d’initiatives de solidarité internationaleCEDETIM,
Coalition pour les libertés associatives
Collectif les pieds dans le plat, Marine Jobert, coordinatrice nationale
Collectif Baronnies en Transition, Aline Hubert
Collectif des associations citoyennes, Gilles Rouby, président du CAC
Comité de Soutien des Faucheurs-euses Volontaires 49, Esther BILLAUD, co-présidente.
Coordination nationale Pas sans Nous, Bénédicte Madelin, vice-présidente
E-graine Normandie, François Bernard, président e-graine Normandie, et Silas Scott-Moncrieff, président e-graine pays de la Loire
Fédération nationale des arts de la rue, Judith Pavard, présidente
Fédération nationale de la Libre Pensée, Christian Eyschen, Secrétaire général
Femmes Egalité, Ana Azaria, Présidente
Fédération des Associations de Solidarité avec Tou-te-s les Immigré-e-s (FASTI)
Framasoft, Pierre-Yves Gosset, codirecteur
Foodwatch France, Karine Jacquemart, directrice générale
Greenpeace France, Jean-François Julliard, directeur général
Groupe d’information et de soutien des immigré·es (GISTI), Vanina Rochiccioli, co-présidente
La Cimade, Fanélie Carrey-Conte, Secrétaire générale
La Quadrature du net, Raquel Radaut, porte-parole.
Les Amis de la Terre France, Khaled Gaiji, président
Les Ami.e.s de la Confédération paysanne, Georges Jay
MRAP, Jean-François Quantin, coprésident
Observatoire international des prisons – section française (OIP), Matthieu Quinquis, Président
Paris d’Exil, Aubépine Dahan co-présidente et Alina Lasry, co-présidente
POLLINIS, Nicolas Laarman, délégué général
Résistance à l’Agression Publicitaire, Charlotte RIBAUTE Co-Présidente
Sherpa
Sciences Citoyennes, Kévin Jean, porte-parole
Syndicat de la magistrature, Kim Reuflet, Présidente
Syndicat des Avocats de France, Claire Dujardin, présidente
Tous Migrants, Michel Rousseau, coprésident
Union syndicale Solidaires, Murielle Guilbert et Simon Duteil co-délégués
Utopia 56 , Yann Manzi, délégué général
VoxPublic, Benjamin Sourice, responsable plaidoyer
Le Planning familial, Cécile Malfray membre du bureau confédéral et Sarah Durocher présidente
VIGILANCE OGM 33, Dominique Bohn, trésorière